13e dimanche du temps ordinaire  C : suivre Jésus

Dans l’évangile de Luc qui est lu à la messe du dimanche 26 juin 2022, Jésus pointe les obstacles qui peuvent nous faire renoncer à le suivre. Sœur Bénédicte Rollin, de la communauté des religieuses de l’Assomption de Vilnius (Lituanie), explique ces paroles un peu rudes.

  • Sr Bénédicte Rollin, 
13e dimanche du temps ordinaire  C : suivre Jésus
 
« Les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel ont des nids ; mais le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer la tête. » (Luc 9, 58)CRISTINA CONTI - STOCK.ADOBE.COM

L’Évangile (Lc 9, 51-62)

Comme s’accomplissait le temps où il allait être enlevé au ciel, Jésus, le visage déterminé, prit la route de Jérusalem. Il envoya, en avant de lui, des messagers ; ceux-ci se mirent en route et entrèrent dans un village de Samaritains pour préparer sa venue. Mais on refusa de le recevoir, parce qu’il se dirigeait vers Jérusalem. Voyant cela, les disciples Jacques et Jean dirent : « Seigneur, veux-tu que nous ordonnions qu’un feu tombe du ciel et les détruise ? » Mais Jésus, se retournant, les réprimanda. Puis ils partirent pour un autre village. En cours de route, un homme dit à Jésus : « Je te suivrai partout où tu iras. » Jésus lui déclara : « Les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel ont des nids ; mais le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer la tête. » Il dit à un autre : « Suis-moi. » L’homme répondit : « Seigneur, permets-moi d’aller d’abord enterrer mon père. » Mais Jésus répliqua : « Laisse les morts enterrer leurs morts. Toi, pars, et annonce le règne de Dieu. » Un autre encore lui dit : « Je te suivrai, Seigneur ; mais laisse-moi d’abord faire mes adieux aux gens de ma maison. » Jésus lui répondit : « Quiconque met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le royaume de Dieu. »

Comprendre

« Il prit la route de Jérusalem. » Dans ces versets-clés de l’Évangile de Luc, l’idée de « faire route » revient cinq fois. La route de Jérusalem, Jésus devait bien la connaître pour être monté au Temple trois fois par an comme tout juif fidèle. L’Évangile de Jean mentionne plusieurs de ces pèlerinages. Cependant les synoptiques ne rapportent qu’une seule de ces montées, présentant de manière schématique la mission de Jésus en deux temps : le ministère galiléen et la montée à Jérusalem.

Ce déplacement physique devient alors, particulièrement chez Luc, métaphore du chemin pascal du Fils, venu du Père et retournant au Père (cf. Jn 13, 1), accomplissant son exode à Jérusalem (Lc 9, 31). La symbolique du chemin traverse toute la Bible : le grand retour de l’humanité à Dieu commence par la mise en route d’Abraham, se fait par la sortie d’Égypte, la traversée du désert, puis le retour de l’exil à Babylone et, quotidiennement, en « marchant selon la Loi du Seigneur », « sur le chemin de ses volontés ». Dans les Évangiles, est disciple celui qui marche derrière Jésus, qui non seulement montre la route mais se nomme lui-même le Chemin (Jn 14, 6).

Méditer

Prenons le temps de contempler Jésus se mettant en route… Il « durcit sa face », comme le serviteur souffrant d’Isaïe qui ne se dérobe ni à l’appel de Dieu ni à la violence des hommes (cf. Is 50, 4-7). Regardons-le, tout tourné vers le Père et la mission reçue. Ce qui le meut n’est pas la volonté durcie d’un kamikaze stoïque mais un grand amour, le feu de l’Esprit qui le brûle et qu’il est venu apporter sur la terre (Lc 12, 49).

Sur la route, des obstacles surgissent aussitôt. Obstacle extérieur : le non-accueil d’un village samaritain. Jacques et Jean, fidèles au surnom de « fils du tonnerre » que leur a donné Jésus, veulent faire tomber le feu du ciel sur les impies. Supprimer l’opposition en supprimant l’opposant : solution simple et si tentante… Mais c’est une vue humaine qui n’est pas celle de Dieu. Le jugement apporté par Jésus se fera par le pardon : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23, 34). La réponse de Dieu au mal passe par sa non-violence et sa non-puissance.

D’autres obstacles sont intérieurs : suivre Jésus partout où il va, d’accord, mais… Or, celui qui suit Jésus doit accepter comme lui de ne pas avoir de « tanière » ni de « nid ». Sa vie est une itinérance qui le force sans cesse à quitter sa « zone de confort », selon l’expression à la mode. Aucun lieu, matériel ou spirituel, ne peut lui faire oublier que sa demeure est ailleurs, et, s’il est appelé à la mission, aucune relation, si chère soit-elle, ne peut freiner son élan. On ne peut pas labourer à reculons. Enterrer un père, dire adieu à ses parents sont des choses louables mais relatives face à l’urgence du Royaume. Jésus, à 12 ans, n’a-t-il pas fait souffrir ses parents en orientant leur regard vers son origine et son but, le Père (Lc 2, 40) ? L’Évangile de Luc est celui de la miséricorde, il nous montre l’humanité pleine de tendresse du Christ, mais il contient aussi des enseignements d’une exigence radicale (par exemple au chapitre 14). Le texte de ce jour est une invitation à nous ouvrir dans la confiance à cette parole-glaive qui pénètre les méandres de nos cœurs enclins aux compromis.

Prier

Jésus, sur ton chemin d’Incarnation et de Pâques
tu t’es donné sans retour dans un amour allant jusqu’à l’extrême.
Fais moi brûler du même Esprit que toi
et accorde-moi de te suivre sans regarder en arrière.