Guerre d'Algérie: les anciens appelés racontent leur révolte face aux violences commises

Des parachutistes français en patrouille dans le massif de l'Aurès, ont arrêté une caravane et interrogent les paysans algériens, le 12 novembre 1954, dix jours après la série d'attentats qui a marqué le début de la guerre d'indépendance algérienne. © AFP/Pierre Bonnin

 

Ce week-end, pour leur 60e anniversaire, les accords d’Évian étaient commémorés. Ces derniers ont mis fin au conflit algérien et ouvert la voie à l’indépendance de l’Algérie. Des deux côtés de la Méditerranée, les mémoires de ce conflit sont encore vives et pas toujours apaisées. En France, d’anciens appelés, contraints de participer à la guerre, témoignent au sein de l’Association des anciens appelés en Algérie contre la guerre (4ACG). Ils cherchent à transmettre ce qu’ils ont vu de cette guerre qui les a révoltés.

« Même quand on est montés sur le bateau, on ne savait pas où l'on allait. C'était la désinformation totale », se rappelle Stanislas Hutin, 92 ans, dont la mémoire est resté solide.

Issu d’une famille de journalistes, il sait qu’on pratique la torture en Algérie, mais la confrontation avec celle-ci va le heurter.

« Comme nous étions en plein bled et qu'il fallait absolument, selon les officiers, obtenir des renseignements, alors on est entré dans le cycle de la torture. Je raconte l'histoire de ce gamin de 15 ans que j'ai entendu hurler toute une partie de la nuit parce qu'il était à l'électricité, se souvient l'ancien appelé. Pour moi, ça a été vraiment le début de ma révolte. 

Dire l'absurdité de la guerre

Pour la plupart originaire de régions rurales, les jeunes appelés du contingent, comme Roger Winterhalter, découvrent l’envers de ce que la France appelle alors la « pacification ». « J'ai vu que, nous-mêmes, on était très vite entrainés par cette violence, par ce mépris des gens. Dans des manifestations, on a tué plus de 50 personnes et ils n'étaient pas armés. C'était le summum où j'ai vu que l'on ne pouvait plus vivre comme ça. »

Le temps passe, les acteurs s’éteignent, mais il est encore temps de témoigner, estime Rémi Serres, cofondateur de la 4ACG : « Ce qu'on peut faire, tant que l'on est vivant, c'est continuer à aller dans les écoles, dire ce que l'on a vécu. Parce qu'après nous, il y aura des historiens, mais plus de témoins. Profitons des quelques années qui restent pour dire l'absurdité de la guerre. »

Ces anciens combattants malgré eux espèrent qu’en France comme en Algérie, les jeunes seront capables de dépasser les querelles mémorielles.

►À écouter aussi : Reportage Afrique - L’Association des anciens appelés en Algérie tentent de transmettre la mémoire