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Côte d’Ivoire : dans les starting-blocks pour les législatives de novembre

 

Les législatives de novembre s’annoncent comme les plus ouvertes que le pays ait jamais connues. Et, dans les états-majors des principaux partis, on s’écharpe déjà pour savoir qui emportera l’investiture.

Décembre 2011. Huit mois viennent à peine de s’écouler depuis la fin de la crise post­électorale, et la Côte d’Ivoire se rend à nouveau aux urnes afin d’élire ses députés. Les enjeux et les inconnues du scrutin sont quasi nuls. Lassés par un conflit qui aura coûté la vie à près de 3 000 personnes, les Ivoiriens ne se rendent pas massivement aux urnes (le taux de participation ne sera que de 36,5 %, contre 80 % pour la présidentielle de 2010).

Encore sonné, le Front populaire ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo boycotte tout bonnement le scrutin. Les alliés de la présidentielle n’ont plus qu’à se partager l’Assemblée : le Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara remporte 127 sièges sur les 254 à pourvoir ; le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) d’Henri Konan Bédié en obtient, lui, 77.

Une nette croissance du nombre de candidatures

Juillet 2016, changement total d’ambiance. La commission électorale a plusieurs fois indiqué que les législatives auraient lieu dans les délais légaux, soit avant le 20 novembre, mais la date exacte du scrutin n’est pas encore connue. Pourtant, il y a cette fois-ci comme de l’excitation dans l’air. Peut-être pas chez les électeurs (la mise à jour des listes électorales, commencée fin juin, montre que l’approche du scrutin ne suscite qu’un faible engouement), mais au moins dans les états-majors des partis politiques.

En coulisses, même si les investitures ne seront annoncées qu’à la rentrée, les batailles ont bel et bien commencé. « Cela fait longtemps que l’on n’avait pas vu ça, résume un cadre du RDR. Les “candidatures aux candidatures” affluent de partout. Il y a des circonscriptions où nous comptions une dizaine de candidats à l’investiture en 2011. Aujourd’hui, on en dénombre parfois trois fois plus ! »

Rivalités internes aux partis

Sur le terrain, c’est déjà le temps des visites – « privées » ou « de courtoisie » – des potentiels candidats ; le temps des réunions avec les militants, pourtant souvent oubliés hors période électorale ; le temps aussi des dons et des cadeaux en tout genre.

« Pour les électeurs, c’est la période de la traite », ironise Alphonse, un militant du PDCI à Bonoua, à 60 km à l’est d’Abidjan. Dans sa circonscription, c’est un quasi-psychodrame qui se joue pour départager les candidats à l’investiture de son parti. Ils ne sont que deux, mais leur querelle rebondit à la une de la presse nationale – « La guerre fait rage au PDCI », titrait Le Nouveau Réveil le 21 juin dernier. Ce n’est pas mieux à Bouaké, où plus d’une vingtaine de candidats à l’investiture avaient déjà déposé leurs dossiers fin juin.

« Le nombre parfois pléthorique de “candidatures à la candidature” témoigne de la vitalité du parti, analyse un cadre du PDCI. Mais il montre aussi que les militants refusent de voir leur formation disparaître dans le RHDP [Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix, alliance électorale entre le PDCI et le RDR et probable nom du parti qui doit naître de la fusion des deux entités]. »

Ainsi, le PDCI, qui n’avait pas aligné de candidat à Grand Bassam (Sud-Est) ou à Mankono (Nord-Ouest) en 2011, laissant le champ libre au RDR, y compte déjà de sérieux prétendants, dont il s’apprête à négocier âprement la présence en cas de candidature unique RHDP. L’enjeu, pour le parti de Bédié, est simple : il veut maintenir son nombre de députés et prospérer dans les zones où il est absent.

Et si chacun des candidats à l’investiture PDCI a signé une déclaration sur l’honneur, s’engageant à ne pas se présenter en indépendant au cas où il ne serait pas choisi, nombreux sont ceux qui font déjà entendre une petite musique dissonante, arguant qu’ils pourront de toute façon financer eux-mêmes leur campagne.

Surtout, tous attendent de pied ferme la réforme constitutionnelle et le bouleversement institutionnel qui l’accompagnera. Le chef de l’État n’ayant pas intérêt à attendre l’élection de la nouvelle Assemblée, dont le prochain visage s’annonce incertain, le texte devrait bientôt être soumis aux députés. Il prévoit notamment la création d’un poste de vice-président et celle d’un Sénat.

Au RDR, Gon Coulibaly et Soro se font face

Qui seront les nouveaux nommés ? Le PDCI en sortira-t-il gagnant ? Dans le cas contraire, prévient-on en interne, « il sera toujours temps d’ajuster la stratégie pour les législatives ».

Au RDR, les négociations pour les investitures ne s’étalent pas encore dans les journaux, mais la bataille est lancée. Toutefois, ses contours sont différents, car, comme souvent ces derniers temps, la question de la succession de Ouattara en 2020 n’est jamais loin. Derrière une unité de façade, dont le but est évidemment de conserver un maximum de sièges, se joue une autre querelle : celle des tendances internes.

Deux d’entre elles se distinguent déjà clairement : celle du secrétaire général à la présidence, Amadou Gon Coulibaly, et celle du président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro. Le conseil politique du RDR, à qui reviendra le choix définitif des candidats, va-t-il privilégier un camp plutôt que l’autre ? Pour Guillaume Soro, qui a déjà annoncé qu’il souhaitait se succéder à lui-même, l’enjeu est de taille : sa réélection dans son fief de Ferkessédougou (Nord) ne fait aucun doute, mais rien ne dit que le consensus politique qui lui avait permis d’obtenir le perchoir sera reconduit.

« Il est président de l’Assemblée, ancien Premier ministre, ancien patron des Forces nouvelles et il a derrière lui un véritable électorat. Je ne vois pas comment il pourrait être mis sur la touche, commente un diplomate africain. Ni lui ni le RDR n’y ont intérêt pour le moment. À moins de vouloir lui permettre de s’émanciper complètement du parti. »

Au FPI, l’urgence est ailleurs. Son résultat reste la grande inconnue du scrutin à venir. Son président, Pascal Affi N’Guessan, a annoncé que l’objectif était de récupérer les 96 sièges occupés avant 2010, mais cela ne pourra se faire si le parti n’est pas réunifié.

« Le FPI compte avoir des candidats dans toutes les circonscriptions, affirme l’un de ses cadres. Nous travaillons en interne à résoudre au plus vite cette crise, afin que notre électorat, qui est encore intact, soit représenté au mieux dans la future Assemblée. » Problème : la tendance pro-Sangaré souffle le chaud et le froid. Elle n’a pas encore annoncé si elle participerait ou non aux élections. Et, si elle le faisait, rien ne dit que ce serait sous les couleurs d’Affi.


On prend les mêmes et on recommence

Une nouvelle classe politique s’apprête-t-elle à faire son entrée à l’Assemblée ? Celle-ci pourrait-elle être plus jeune (54 ans en moyenne aujourd’hui), plus féminine (90 % d’hommes actuellement) et plus diversifiée ? Rien n’est moins sûr ! Et pour cause, nombre de ténors ont déjà fait part de leur intention de rempiler. Au RDR, les ministres Adama Toungara et Affoussy Bamba Lamine sont de ceux-là, tout comme les députés Adama Bictogo, Alphonse Soro, Zoumana Bakayoko, Sidiki Konaté, Ibrahim Cissé Bacongo ou Adjaratou Traoré.

Au PDCI, en revanche, certaines personnalités ont du souci à se faire : Raymonde Goudou Coffie, l’actuelle ministre de la Santé, souhaite se faire élire à Toumodi (Centre) mais pourrait avoir du mal à s’imposer, tout comme son homologue à l’Enseignement technique, Paul Koffi Koffi, qui lorgne Bouaké, où la concurrence est acharnée. Quant à Alla Brou Florence, la députée sortante de Daoukro (Centre), il n’est pas dit qu’elle parviendra à obtenir de nouveau l’investiture du parti. Quant aux députés frondeurs que sont Kouadio Konan Bertin (Port-Bouët) et Yasmina Ouégnin (Cocody), ils pourraient peiner à recevoir le soutien de leur formation.

Côté FPI, Pascal Affi N’Guessan, qui devrait briguer un siège dans sa région natale de Bongouanou (Centre-Est), ne devrait pas avoir de difficulté à se faire élire. En revanche, Michel Gbagbo, le fils de l’ex-président, brièvement tenté par Yopougon, ne devrait finalement pas se présenter. Condamné à cinq ans de prison en mars 2015, il a fait appel mais est, pour l’instant, privé de ses droits civiques.

 

Par Jeune Afrique avec AFP
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Les combats déclenchés mardi 9 août entre des hommes de la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA, ex-rébellion à dominante touareg) et du Groupe d'autodéfense touareg Imghad et alliés (Gatia), un mouvement de la Plateforme (coalition progouvernementale), se poursuivaient mercredi près de Kidal. Ces affrontements ont causé des "pertes en vies humaines", a annoncé le gouvernement malien dans un communiqué.

Le gouvernement malien, qui indique suivre avec « une vive préoccupation » ces affrontements, n’a pas donné plus d’informations sur le nombre de victimes. Le gouvernement « condamne la reprise des hostilités » et demande aux belligérants « d’y mettre fin dans l’intérêt supérieur des populations », selon le communiqué. Aucun bilan n’avait pu être obtenu auprès des belligérants.

Il estime que « la situation créée par la reprise des hostilités constitue une menace grave pour la mise en oeuvre de l’accord » signé en mai-juin 2015 par Bamako, la Plateforme et la CMA. D’autant qu’il s’agit du troisième épisode de violence en trois semaines. Les hommes du Gatia et de la CMA s’étaient affrontés les 21 et 22 juillet dans la ville de Kidal, à l’arme lourde, puis le 30 juillet à une quarantaine de kilomètres à l’est de la ville, selon plusieurs sources.

Un différend à caractère tribal intertouareg

D’après plusieurs sources, dont un élu local, les violences ont pour origine un différend à caractère tribal intertouareg, entre Imghads et Ifoghas, pour le contrôle de Kidal. Ces deux tribus sont représentées dans les camps adverses.

Dans un communiqué diffusé mercredi, le Gatia souligne à nouveau le caractère tribal de ces violences, qu’il avait déjà évoqué après les affrontements du 30 juillet. « Le conflit actuel n’oppose que les Imghad et les Ifoghas à cause de la gestion oppressante que les Ifoghas imposent à tous ceux qui vivent à Kidal », écrit le Gatia dans son communiqué.

La Minusma n’a pas réagi aux affirmations du Gatia, qui avait indiqué mardi avoir été attaqué à 65 km au nord-est de Kidal par des hommes à bord de « colonnes de véhicules parties » de cette ville, dont les accès sont censés être contrôlés par la Minusma. »La Minusma nous a invités à ne pas rentrer dans la ville de Kidal et a garanti qu’elle ne laisserait pas les autres s’organiser pour nous attaquer », avait assuré Fahad Ag Almahmoud, secrétaire général du Gatia.

Texte pris sur le site de "Jeune Afrique"

Niger : malgré son repli, Boko Haram continue de traumatiser la population

 

À Diffa, dans le sud-est du Niger, les habitants vivent dans la peur permanente. La libération de Damasak, de l’autre côté de la frontière, n’y change pas grand-chose. Reportage.

Au poste-frontière entre Diffa (Niger, à 7 km) et Damasak (Nigeria, à 30 km), la cahute de garde, côté nigérian, est vide, la barrière levée en permanence. Les gardes-frontières ont déserté les lieux. Depuis la prise de Damasak par Boko Haram, il y a un an, personne ne s’aventure ici… sauf les militaires nigériens. Ce sont eux qui, dans le cadre de la Force multinationale mixte (FMM), ont repris la ville au groupe jihadiste, le 27 juillet.

Chaque jour, un incessant chassé-croisé de blindés et d’automitrailleuses franchit la rivière. « Allah yakiyaye ! Que Dieu vous protège ! » leur lancent les villageois le long de la route inondée qui serpente entre les rizières.

Vers la fin de l’horreur

Il y a quelque temps, sur ce même pont dit de Doutsi, les jihadistes égorgeaient les habitants du coin, complices de l’armée, avant de jeter leurs corps dans la rivière Komadougou Yobé. « On les repêchait le matin, raconte un soldat. Ça semait la terreur jusque dans nos rangs. En gros, on savait ce qui nous attendait s’ils mettaient la main sur nous. » La peur, c’est d’abord ce que cherche à répandre Boko Haram. C’est peut-être ce qui explique la longue et minutieuse préparation de l’offensive fulgurante sur Damasak depuis la base militaire de Diffa.

Dans la salle d’état-major trône une immense carte de la région, avec des petits points censés représenter les bases ennemies. « Le problème avec Boko Haram, c’est qu’ils se dispersent, voyagent léger et rapidement. Ils tuent et disparaissent aussitôt dans la nature », précise le colonel Hamadou Djibo, chef des opérations. À Damasak, l’armée nigérienne a trouvé une petite cité vidée de sa population, aux murs remplis d’inscriptions en arabe attribuées à Boko Haram.

Mais derrière chaque volet qui claquait se dissimulait un combattant armé d’une kalachnikov. Une trentaine d’entre eux seraient morts, selon l’état-major. « En reprenant Damasak, nous avons coupé l’un des bras de Boko Haram qui menaçait Diffa, estime le colonel-major Oumarou Namata. Notre objectif, à présent, c’est de sécuriser la région en ratissant jusqu’au lac Tchad, où se cache le gros des terroristes. » Pour y arriver, l’état-major impose à ses hommes une discipline de fer, car les terroristes s’infiltrent dans la moindre faille.

Une peur constante

À Diffa, ville de transit autrefois vivante et commerçante, Boko Haram est nulle part et partout à la fois. En 2015, les attaques-suicides s’y sont succédé, et la paranoïa s’est installée durablement : la ville s’est barricadée derrière d’interminables check-points. « Une fois, on a même découvert des kalachnikovs entièrement démontées et cachées dans le ventre de gros poissons sur les palettes d’un camion en provenance du Nigeria », raconte un commerçant.

Depuis la mise en place de l’état d’urgence, Diffa est tous les soirs sous couvre-feu à partir de 19 heures. Et si les militaires quadrillent la ville de long en large, personne n’est vraiment à l’abri d’une attaque-suicide. « Tout le monde craint un peu son voisin, explique Walli, un habitant. C’est ça le problème, ils se fondent dans la masse. Un garçon qui vous regarde passer le long de la route est peut-être en train de renseigner les terroristes. »

À 20 km de la ville, les ouvriers chinois qui goudronnent la route vers le Tchad se terrent chaque soir, après le travail, derrière l’enceinte du PK50, forteresse géante construite au milieu de nulle part et entourée de miradors.

Le long des 200 km de frontière avec le Nigeria, la population vit dans la peur. « Aqmi [Al-Qaïda au Maghreb islamique], ils vous prennent en otage, mais avec un peu de chance, au bout de deux ou trois ans, ils vous relâchent. Alors que Boko Haram, ils vous tuent direct », résume Aziz, un chef d’entreprise de Niamey qui ne sort de son hôtel à Diffa que sous escorte. Depuis l’attaque de Boko Haram à Bosso, près du lac Tchad, le 3 juin, 60 000 déplacés se sont entassés le long de la route numéro 1 en provenance de l’est pour « fuir les égorgements massifs ».

« Ils ne ferment pas l’œil de la nuit, tous font des cauchemars, rapporte Djamal Zamoum, chef de mission au HCR. Plus que la faim ou les maladies, quand le soleil se couche, c’est le retour de Boko Haram qu’ils craignent. » Beaucoup d’entre eux se sont regroupés sur le site de Garin Wanzam, à 40 km de Diffa, qui abrite désormais 14 873 personnes, selon le dernier recensement de la Commission nationale d’éligibilité au statut de réfugié. Les plus chanceux rejoindront le camp de Sayam Forage, a priori mieux protégé par l’armée.

Des attaques à la ganja

Les anciens habitants de Bosso ont gardé en mémoire le visage de certains « enfants du marabout », comme on surnomme les combattants de Boko Haram. « On ne s’y attendait pas, on ne pensait pas qu’un tel carnage puisse arriver au Niger », raconte calmement Issiakou Shioaram, lui-même marabout tidjane, donc jugé déviant de l’orthodoxie sunnite par la secte islamiste. Ce Nigérian de 46 ans a fui pour la septième fois en cinq ans les exactions des hommes d’Abubakar Shekau. Pour lui, « BH » comme il dit, « c’est un serpent qui mord avant qu’on ait eu le temps de prendre un bâton pour le frapper ».

Mais, cette fois, ce réfugié originaire de la région de Maiduguri a été marqué par un détail : « J’ai vu des ombres dans la panique, celles d’enfants de 10 ou 12 ans avec des couteaux, des kalachnikovs, frappant, tirant sur tout ce qui bougeait. » Aux alentours, les villageois ont retrouvé des restes de feux, avec des mégots étranges dans les cendres. « Ils fument de la ganja avant d’attaquer », dit l’un des réfugiés.

Tous savent d’où viennent ces enfants. La plupart ont été enrôlés discrètement via des prédicateurs locaux dans les villages de la région, de part et d’autre de la frontière. « Ça commence par de l’endoctrinement. Un jour, un homme barbu vient au village pour expliquer aux jeunes le “vrai islam”. Et puis un matin, tu te réveilles, et ton fils a disparu », explique Moustapha Mallam, un déplacé nigérien de 36 ans.

Traquer Sheckau pour mettre fin aux enlèvements

Quel est le mode opératoire des terroristes ? « Ils arrivent souvent la nuit, poursuit Moustapha. En général, ils tuent d’abord puis font des prisonniers, qu’ils attachent par les pieds et les mains pour éviter qu’ils n’aillent prévenir les secours. Et, pendant ce temps, ils pillent tout ce qu’ils trouvent, ils cassent tout sur leur passage. Certains prisonniers ont pu rester dix jours attachés comme ça ! » Les attaques se font le plus souvent à moto.

« Pour pouvoir dissocier les habitants des combattants de Boko Haram, nous avons donc interdit les deux-roues dans toute la région », explique le colonel-major Oumarou Namata. Depuis, des villages ont déjà été attaqués à cheval. En général, les éléments de Boko Haram font une incursion rapide et repartent se cacher dans la brousse.

Depuis février 2015, 163 incidents, la plupart avec mort d’hommes, ont été répertoriés dans la région de Diffa, selon une source onusienne. Le dernier en date a eu lieu le 30 juillet et aurait fait 24 victimes civiles, « toutes égorgées » selon cette même source, dans le village de Gaduraa. Djamal Zamoum, du HCR, ne comprend pas très bien : « Pourquoi s’en prennent-ils aux populations civiles ? Ils veulent vider la région du lac Tchad de sa population, mais dans quel but ? »

Face aux risques d’une pénétration durable de Boko Haram dans cette région autrefois paisible et dynamique, et devant l’afflux toujours plus important de réfugiés aux alentours de Diffa (241 000, selon les derniers chiffres du HCR), le mot d’ordre de l’armée nigérienne et de la FMM est « gama aiki » – finir le travail. « Traquer Abubakar Shekau, tel est l’objectif, quitte à le tuer lors d’une opération secrète comme celle qui fut organisée au Pakistan contre Ben Laden », confie un capitaine nigérien.

Pour l’instant, le leader de Boko Haram, que l’on a dit mort puis grièvement blessé, se terre. Shekau, « l’homme invisible », porte d’ailleurs un autre surnom, « Damasak ». De bon augure si son destin est lié à celui de la ville libérée du joug de Boko Haram…

Dans le dernier bulletin d'abcburkina.net, cet article

Situation potentiellement explosive à Guiaro

La saison des pluies est celle à laquelle il y’a le plus de conflits entre agriculteurs et éleveurs. A Guiaro, des dégâts causés le 27 juillet 2016 par des bœufs a mis le feu aux poudres. Conséquence, plusieurs dizaines de personnes sans abris. Le calme est revenu suite à une médiation. Mais pour combien de temps ?

Des cases démolies, des bois de chaumes éparpillés, des greniers partis en fumée, du matériel calciné, le bétail éparpillé. C’est ce visage désolant que présentait le campement peul du quartier Koeniassa du village de Bouya, commune rurale de Guiaro, dans la province du Nahouri, le jour 28 juillet 2016. Dans l’urgence, ces sinistrés sont temporairement logés dans les salles de classes du CEG de la commune mais d’autres sont pour le moment portés disparus. Bandé Sadjo, représentant des victimes rapporte que : « Nos mamans, nos femmes et nos enfants se sont dispersés et nous ne savons pas où ils se trouvent actuellement ».Selon le maire de la commune, l’on dénombre 127 personnes sans-abris.

Un conflit qui couvait depuis une dizaine d’années

Cette situation a été causée par un conflit intercommunautaire qui a opposé les autochtones gourounsi, dont la quasi-totalité est composée d’agriculteurs, aux migrants peulhs, en majorité éleveurs, le mercredi 27 juillet 2016. A la base de ce conflit, des dégâts causés par des animaux des migrants dans les champs des autochtones le 25 juillet 2016. Pendant que les différentes parties s’attelaient à un règlement à l’amiable, intervient un second saccage de champs 2 jours plus tard par des animaux. Remontés, les autochtones mènent une expédition punitive contre les migrants. En réalité les dégâts des champs ne sont que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. L’origine du conflit remonte à 2015, lorsque l’Etat a entrepris d’aménager la zone pastorale de la commune de Guiaro. Depuis la création de cette zone pastorale, le climat est tendu entre les agriculteurs et les éleveurs. Ces derniers sont sommés de déguerpir de leurs lieux d’habitation et de rejoindre la zone pastorale qui, malheureusement est en cours d’aménagement, l’Etat n’ayant pas encore balisé cette zone pour faciliter l’installation définitive des éleveurs concernés

Terminer les aménagements prévus

Ce jour, lundi 8 août, au moment ou nous tracions ces lignes, les autorités locales sont à pied d’œuvre pour apaiser la situation. Une première rencontre a lieu le jeudi 28 juillet 2016, entre les différents protagonistes et les autorités politiques, coutumières, religieuses ainsi que les services de sécurité et les services techniques, pour tenter de régler ce différend. Les 2 parties ont pris l’engagement de se pardonner pour que la paix et la stabilité reviennent dans la commune.

En guise de recommandation à très court terme, PASMEP (Plateforme d’Actions à la Sécurisation des Ménages Pastoraux) estime que pour résoudre durablement ce conflit, l’Etat et ses partenaires devraient accélérer les travaux de finition et d’attribution de la zone pastorale. Ce qui permettra à chaque groupe d’acteurs d’occuper les terres qui lui reviennent. Au-delà de cette situation à Guiaro, l’Etat, les partenaires au développement, les collectivités territoriales et les communautés, devront mettre du prix dans l’application effective des différentes législations et règlementations relatives au pastoralisme, au foncier rural, à l’environnement, etc.

En rappel, la commune de Guiaro fait partie des six (6) communes d’intervention de PASMEP. 4 groupements de pasteurs, dont le groupement mixte Konafata de Bouya, sont ainsi pris en compte dans les activités de mise en œuvre du projet PRECOP/CS (Projet de renforcement des capacités des organisations pastorales du Centre Sud, projet financé par Miséreor). Les victimes de ce conflit sont des membres du groupement Konafata.

Fatimata VALEA

Chargée de suivi évaluation/PASMEP

Sur le site de "Jeune Afrique"

 

APE : Bruxelles fait monter la pression sur les pays d’Afrique de l’Ouest

 

Si l'Accord de partenariat économique (APE) avec les pays de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cedeao) n'est pas ratifié avant le 1er octobre 2016, la Côte d'Ivoire et le Ghana perdront les préférences douanières dont ils bénéficient, selon une décision de la Commission européenne, consultée par "Jeune Afrique". Seule alternative : signer à temps les APE ou rétablir, en ordre dispersé, les accords bilatéraux antérieurs.

L’Union européenne semble bien décidée à voir entrer en vigueur les Accords de partenariats économiques (APE) conclus avec les pays africains.

Seule option, selon Bruxelles, pour mettre ses relations commerciales avec plusieurs pays africains en conformité avec les règles commerciales internationales de l’OMC et pour s’éviter d’éventuelles litiges avec des pays tiers — États-Unis et Chine en tête — qui pourraient contester des régimes d’exception qu’ils considèrent injustes.

Signe de cette détermination, la Commission européenne a approuvé la sortie à partir du 1er octobre 2016 du Botswana, du Ghana, de la Côte d’Ivoire, du Kenya, de la Namibie et du Swaziland du système de préférences douanières favorables prévu par le Règlement d’accès au marché (RAM).

Cette décision, en date du 08 juillet et que Jeune Afrique a pu consulter, doit encore être approuvée par les députés européens et le Conseil des ministres européens, dans un délai de deux mois.

Un régime temporaire

Entré en vigueur en 2008, le RAM a instauré un régime qui garantit de façon temporaire l’accès de plusieurs pays africains au marché européen sans droits de douanes ni quotas. Un tel accès est déjà garanti par défaut aux 48 Pays les moins avancés — dont une trentaine sont africains* (0 % sur toutes les lignes de produits à l’exception des armes), dans le cadre de l’initiative Tout sauf les armes, approuvée par l’Union européenne en 2000.

Le RAM a été mis en place dans l’attente du bouclage des longues et laborieuses négociations des APE, entreprises avec les 79 pays de la zone Afrique Caraïbes Pacifique (ACP), comme le prévoyait l’accord conclu à Cotonou au Bénin en 2000.

Si les APE ont été approuvés, ils n’ont pas encore tous été ratifiés par les législations et les exécutifs des pays africains concernés. Et ne peuvent donc pas entrer en vigueur, pour l’instant.

Retour à un système de préférences moins avantageux pour les pays africains

Or le régime du RAM ne peut pas être maintenu indéfiniment, puisqu’il est jugé très faible juridiquement par les juristes bruxellois. D’où le coup de pression supplémentaire décidé par la Commission européenne le 08 juillet dernier.

Les échanges commerciaux entre l’UE et l’Afrique de l’Ouest ont atteint 56,4 milliards d’euros en 2015.

Si à la date limite du 1er octobre, les APE ne sont pas définitivement ratifiés, tous les pays africains qui ne sont pas PMA et ne sont pas couverts par un accord bilatéral spécifique à cette date, tomberont dans une catégorie moins avantageuse, celle du Système généralisé de préférences qui prévoit des réductions de droits de douanes sur environ 66 % des exportations des pays en développement.

Dans le cas du Botswana, de la Namibie et du Swaziland, les services européens disent avoir déjà l’assurance d’une ratification avant l’échéance d’octobre. Mais en Afrique de l’Ouest, si la plupart des pays ont signé l’APE régional, le Nigeria, la Mauritanie et la Gambie ne l’ont pas encore fait.

Malgré les assurances d’Aisha Abubakar, la ministre nigériane de l’Industrie, du Commerce et des Investissements, qui s’est rendue à Bruxelles en mars, les autorités européennes prennent pour acquis que l’APE ouest-africain ne sera pas ratifié au 1er octobre.

Or les enjeux sont importants : les échanges commerciaux entre l’UE et l’Afrique de l’Ouest ont atteint 56,4 milliards d’euros en 2015, dont 29 milliard d’euros d’exportations européennes.

Pour parer aux conséquences de leur sortie du RMA, certains pays de la région, la Côte d’Ivoire et le Ghana notamment, se prépareraient déjà à revenir à des accords bilatéraux antérieurs, conclus avec l’Europe en 2007. Un choix qui est toutefois lourd de conséquences pour la cohésion régionale.

Les accords bilatéraux créent le risque d’un retour des droits de douane entre les pays de l’Uemoa.

Un risque sur l’intégration régionale ouest-africaine

« Ces pays sont libres de revenir aux accords bilatéraux. Mais la conséquence immédiate serait un recul grave de l’intégration régionale », avertit Cheikh Tidiane Dieye, directeur exécutif du Centre africain pour le commerce, l’intégration et le développement, basé à Ouagadougou.

« La Côte d’Ivoire est dans l’Union douanière de l’Uemoa et n’a donc plus droits de douanes avec ses voisins. La Cedeao vient pour sa part de mettre en œuvre un tarif extérieur commun qui la fait évoluer vers une union douanière », rappelle l’analyste, pour qui un retour en ordre dispersé aux accords bilatéraux fait courir le risque d’un rétablissement des droits de douane entre les pays d’Afrique de l’Ouest.

L’Afrique de l’Ouest n’est pas la seule région actuellement sous pression pour la ratification à temps des APE.

La signature de l’APE par les pays d’Afrique de l’Est (dont le Kenya) était prévue le 18 juillet dernier à Nairobi en marge de la 14e session de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (Cnuced). Elle a été annulée, la Tanzanie ayant choisi de s’en dissocier dans la foulée du vote pour le Brexit.

Les trois APE régionaux en cours de négociation entre l’UE et la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) et la Communauté pour le développement de l’Afrique australe (SADC)

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* En 2015, les PMA africains qui bénéficiaient par défaut du « Tout sauf les armes » sont les suivants : Angola, Bénin, Burkina Faso, Burundi, Centrafrique, Tchad, Comores, RDC, Djibouti, Guinée équatoriale, Érythrée, Éthiopie, Gambie, Guinée, Guinée-Bissau, Lesotho, Liberia, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Mozambique, Niger, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, Somalie, Soudan du Sud, Soudan, Togo, Ouganda, Tanzanie et Zambie.