DIOCESE DE LAGHOUAT - GHARDAIA .
BILLET MENSUEL Novembre 2015




Bien chers amis.

Après trois semaines de longs et parfois laborieux débats, le document final du 2ème Synode sur la famille a vu le jour, satisfaisant pour les uns, en deçà de leurs attentes pour d’autres. Je ne puis que vous inviter à relire les billets que nous a régulièrement fait parvenir l’évêque d’Oran, Jean Paul Vesco, dans son souci de nous partager ce qu’il vivait dans ce grand forum. Voici ce qu’il nous dit à propos du document final :

« Certains pourraient trouver que c’est bien peu, d’autres que c’est beaucoup trop. Pour moi, c’est énorme et je vois la trace de l’Esprit Saint dans le fait qu’il ait été adopté en tous ses articles avec la majorité des deux tiers… Ce vote a permis de sentir à quel point un synode n’est pas seulement une affaire humaine à l’instar d’un congrès politique qui aurait établi un texte de compromis. C’est tout autre chose que nous avons vécu...

Le pape François porte une dimension prophétique tout en étant à la tête d’une institution qu’il n’entend pas brader. Il nous faut répondre à son appel et monter résolument dans la barque du successeur de Pierre. C’est cette chance que nous offre ce synode. Et cette chance est aussi une responsabilité. ».


Je vous écris ces mots de Tamanrasset, où a vécu le Bienheureux Charles de Foucauld. Nous allons ouvrir l’année du centenaire de sa mort (1er décembre 1916). C’est pour cela que je voudrais revenir sur une méditation du Pape François à son sujet juste avant le Synode. Je trouve ses paroles saisissantes d’actualité, même si elles ont peu circulé dans les médias.

«Charles de Foucauld, peut-être comme peu d’autres, a deviné la portée de la spiritualité qui émane de Nazareth. Ce grand explorateur abandonna en hâte la carrière militaire, fasciné par le mystère de la Sainte Famille, de la relation quotidienne de Jésus avec ses parents et ses proches, du travail silencieux, de la prière humble. Regardant la Famille de Nazareth, frère Charles discerna la stérilité du désir de richesse et de pouvoir ; il se fit tout à tous par l’apostolat de la bonté ; attiré par la vie érémitique, il comprit qu’on ne grandit pas dans l’amour de Dieu en évitant la servitude des relations humaines. Parce que c’est en aimant les autres qu’on apprend à aimer Dieu ; c’est en se penchant vers son prochain qu’on s’élève jusqu’à Dieu. À travers la proximité fraternelle et solidaire avec les plus pauvres et les plus abandonnés, il comprit que, finalement, ce sont eux qui nous évangélisent, en nous aidant à grandir en humanité. Pour comprendre aujourd’hui la famille, entrons nous aussi – comme Charles de Foucauld – dans le mystère de la Famille de Nazareth, dans sa vie cachée, ordinaire et commune, comme celle du plus grand nombre de nos familles, avec leurs peines et leurs joies simples ; vie tissée de patience sereine dans les contrariétés, de respect pour la condition de chacun, de cette humilité qui libère et fleurit dans le service ; vie de fraternité qui surgit du fait de se sentir partie d’un unique corps».

Ce qu’il dit pour les familles n’est-il pas vrai aussi pour nos communautés chrétiennes ? Dans le Diocèse, il y a très peu de familles chrétiennes, étant donné notre situation un peu particulière. Mais la vie communautaire et « familiale » nous touche tous et toutes. C’est d’ailleurs à travers ce « vivre ensemble » que nous avons à porter le témoignage évangélique. On disait des premiers chrétiens « voyez comme ils s’aiment », et nous le chantons parfois !

Sans doute il faut nous démettre de l’image d’Épinal où l’on enferme parfois la famille de Nazareth ! Je n’imagine pas la vie de Joseph, Marie et Jésus isolée de l’ensemble de la grande famille à laquelle ils appartenaient. Jésus enfant a bien dû en découdre avec ses cousins et avec les gamins de son âge ! On parle dans les Évangiles de « ses frères et de ses sœurs ». Certains parmi eux (et sa Mère en était !) cherchaient à le remettre sur le bon chemin car, pensaient-ils, « il avait perdu la tête » !

Voilà qui donne plus de poids à la vie familiale de Jésus et plus de réalisme à notre vie ensemble. Notre existence communautaire et familiale est traversée elle aussi par des tensions et des crises. Mais elle est aussi un lieu de bonheur, d’ouverture à l’autre, d’accueil et de joie. Et l’expérience de la vie de Jésus et de ses ruptures nous apprend que finalement notre ouverture sur le monde et notre élan vers les autres est la meilleure façon de sortir de nous-mêmes en mettant nos pas dans les siens.


+ Claude, votre frère évêque.