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Législatives et régionales au Togo: le recensement des électeurs débute dans la zone 3

Au Togo, le recensement des électeurs dans la zone 3 du pays, qui couvre une partie de la région centrale puis les régions de la Kara et des Savanes, débute ce 5 juin 2023. Une source proche de la Commission électorale nationale indépendante affiche sa confiance avant cette opération, tandis que plusieurs partis politiques réclament la reprise de l’enrôlement dans la région

 

Avec notre correspondant à Lomé, Peter Sassou Dogbé

Les opérations du recensement électoral en vue des prochaines échéances législatives et régionales se poursuivent au Togo. Le pays est subdivisé en trois zones pour faciliter l’enrôlement de toutes les personnes en âge de voter.

Après la zone 1 et 2, qui regroupent la région maritime, la région des plateaux et une partie de la région centrale, c’est le tour de la zone 3 qui couvre une dernière partie de la région centrale puis les régions de la Kara et des Savanes. Cette étape commence ce 5 juin 2023 

Un enrôlement prévu jusqu’au 12 juin

Tout est en place pour une bonne opération, confiait, la veille, une source proche de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) : il y a davantage de matériel disponible que pour les zones 1 et 2, les cartes d’électeur sont en nombre suffisant, les groupes électrogènes ont été vérifiés, explique cette source. Près de 2 000 comités sont déployés pour enrôler jusqu’au 12 juin toutes les personnes en âge de voter.

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Les personnes déplacées à cause des attaques des groupes armés dans l’extrême nord-est vont être recensées dans leur lieu d’accueil.

De son côté, l’opposition attend de voir, mais la Dynamique pour la majorité du peuple reste focalisée sur les problèmes signalés en zone 1, notamment à Lomé. De nombreuses personnes n’ont pas pu se faire enrôler pour, officiellement, des problèmes matériels.

Plusieurs partis politiques demandent la reprise de l’enrôlement dans la zone 1

À la veille de la dernière étape de ce recensement, plusieurs partis politiques, notamment Alliance nationale pour le changement (ANC) de Jean-Pierre Fabre, continuent de demander à la Commission électorale la reprise de l’enrôlement dans la zone 1. Ils appellent la Céni à se ressaisir afin de permettre à tous ceux qui remplissent les conditions, de s’inscrire sur les listes électorales, partout sur le territoire national.

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En Côte d’Ivoire, Hubert Oulaye défie Anne Désirée Ouloto, alias « Maman Bulldozer »

Le président exécutif du PPA-CI tentera de prendre la tête du conseil régional du Cavally, dans l’ouest du pays, dirigé par la ministre de la Fonction publique depuis 2018.

Par  - à Abidjan
Mis à jour le 5 juin 2023 à 13:50
 

 

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Hubert Houlaye (à g.) et Anne Désirée Ouloto (à d.) © MONTAGE JA – SIA KAMBOU/AFP – DR.

 

LE MATCH DE LA SEMAINE  La campagne n’a pas encore officiellement été lancée mais, depuis la publication des listes des candidats aux élections locales – régionales et municipales – du 2 septembre par les principaux partis, l’effervescence se fait sentir. Ministres, élus et autres têtes d’affiche ont commencé à sillonner le pays pour rencontrer leurs électeurs.

Après plusieurs années de boycott des élections, le Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI, de Laurent Gbagbo) participera au scrutin. Pour l’ancien président, rentré en Côte d’Ivoire en 2021 après son acquittement par la Cour pénale internationale (CPI), ces locales seront un premier grand test permettant de jauger l’implantation de sa nouvelle formation.

L’une des affiches phares de ces régionales se tiendra dans le Cavally, dans l’ouest du pays, où le président exécutif du PPA-CI, Hubert Oulaye, se présentera face à la présidente sortante du conseil régional, Anne Désirée Ouloto.

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Seule candidate du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) aux régionales, la ministre de la Fonction publique, 57 ans, tentera de conserver son siège. Membre du RDR dès les années 1990, puis du RHDP, elle a occupé plusieurs postes ministériels et est un poids lourd du parti présidentiel.

« Maman Bulldozer »

En 2010, alors cheffe de cabinet d’Ibrahim Cissé Bacongo, ministre de l’Enseignement supérieur, c’est elle qui est choisie pour devenir la porte-parole d’Alassane Ouattara lors de la présidentielle. Elle contribue à mobiliser l’électorat de l’ouest du pays, dont elle est originaire.

Lorsque son mentor arrive au pouvoir après la crise postélectorale l’ayant opposé à Laurent Gbagbo, il lui confie le portefeuille de la Salubrité urbaine en 2011. Elle lance alors des opérations de déguerpissement et de destruction des installations anarchiques. Même s’il n’a duré qu’environ un an, cet épisode suffit à lui valoir le surnom de « Maman Bulldozer ». Elle a depuis assumé plusieurs autres fonctions au sein de gouvernements successifs, jusqu’à sa nomination, en avril 2021, comme ministre de la Fonction publique et de la Modernisation de l’administration.

Députée de Toulepleu depuis 2011, Anne Désirée Ouloto est élue présidente du conseil régional du Cavally en 2018. Cinq ans plus tard, à l’heure de remettre son fauteuil en jeu, elle compte mettre en avant ses réalisations dans la région.

« Nous partons favoris parce que notre bilan parle pour nous, estime Hippolyte Bayalla, maire RHDP de Thaï, une ville de la région, également candidat aux municipales. À notre arrivée, le taux d’électrification était d’environ 33,5 %. Aujourd’hui, il est de 99 %. Nous avons aussi un grand chantier de pont en cours de finition. Le bitumage de plusieurs axes a été achevé et d’autres doivent l’être dans les mois à venir », énumère l’élu, qui rejette les critiques de l’opposition basées sur le manque d’ancrage local d’Ouloto.

Oulaye, un enfant de la région

En plus du conseil régional, le RHDP a conquis trois des quatre mairies du périmètre aux dernières municipales. Il tient aussi les deux postes de sénateurs du Cavally. Si Anne Ouloto a indéniablement contribué à installer le parti au pouvoir dans ce bastion de l’opposition au fil des ans, les régionales du 2 septembre s’annoncent ardues. Cette fois, c’est une personnalité bien connue de la région qui lui tiendra tête : Hubert Oulaye, 68 ans.

En mars 2021, ce fidèle de Laurent Gbagbo avait réussi un coup de force aux législatives en remportant six des sept sièges de la région à la tête de la liste Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS). Au terme d’un scrutin très disputé, seule Anne Ouloto avait réussi à conserver son siège, à Toulepleu. Président du groupe parlementaire EDS à l’Assemblée nationale jusqu’au retour de Gbagbo, Hubert Oulaye, devenu député de Guiglo, était alors considéré comme l’un des meneurs des « GOR » (les « Gbagbo ou rien »). C’est donc sans surprise à ce compagnon de longue date que Laurent Gbagbo a décidé de confier la présidence du PPA-CI, en octobre 2021.

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Directeur de cabinet de l’ancien président à la fin des années 1990 puis ministre de l’Emploi et de la Fonction publique durant la décennie du pouvoir de Gbagbo (de 2000 à 2010), Hubert Oulaye s’est un temps exilé au Ghana après la crise postélectorale de 2010-2011. « Même si elle a un bon bilan à défendre, Anne Ouloto fera face à une icône de la région. N’importe quel Wè le connaît. Lorsqu’il était aux affaires, il a fait la promotion de beaucoup de personnes et a soutenu les jeunes cadres. Les gens se cotisaient pour subvenir à ses besoins quand il était en prison [de 2015 à 2017]. C’est un fétiche ! » explique un député de l’opposition.

Début mai, le député de Guiglo a effectué une tournée dans quelques villes de la région. Il a demandé au peuple Wè son appui et a dit compter sur l’aura de Laurent Gbagbo pour emporter la victoire.

Lors de ce scrutin, Hubert Oulaye devrait également bénéficier du soutien du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), avec qui EDS avait noué des alliances aux dernières législatives. Des discussions entre les cadres des deux formations sont en cours pour ces locales. Sauf grande surprise, dans le Cavally, le candidat du PPA-CI sera soutenu par le PDCI. En contrepartie, l’ancien parti unique devrait conserver une autre région de l’Ouest, le Guémon, où le président de son groupe parlementaire, Simon Doho, est candidat.

Comment la cigarette contribue à affamer l’Afrique

L’OMS affirme que l’augmentation des zones de culture du tabac nuit à la sécurité alimentaire et nutritionnelle sur le continent africain.

Mis à jour le 1 juin 2023 à 17:54
 
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Par Damien Glez

Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.

 

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L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) aurait-elle enfin trouvé l’argument inédit pour ses campagnes anti-tabac qui s’essoufflent autant qu’un fumeur invétéré ? Les dangers sanitaires de la cigarette peinent à convaincre les consommateurs sujets à l’addiction. Les photos morbides ne choquent guère les blasés des réseaux sociaux « trash ». Quant à la dissuasion par l’augmentation du prix, elle touche moins le continent africain, objet d’un marketing particulièrement agressif de l’industrie du tabac et d’un environnement réglementaire plutôt laxiste.

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Le nombre de consommateurs de tabac dans la région africaine de l’OMS est passé d’environ 64 millions d’adultes en 2000 à 73 millions en 2018, tandis que les fumeurs sont de moins en moins nombreux à l’échelle de la planète.

Sécurité alimentaire et écosystèmes fragilisés

Dans un communiqué daté du 31 mai – journée mondiale sans tabac –, l’Organisation onusienne s’adresse moins au portefeuille ou aux poumonx qu’à l’estomac. La directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique, la docteure Matshidiso Moeti, affirme que l’abandon du tabac au profit de cultures vivrières nutritives pourrait permettre « de nourrir des millions de familles et d’améliorer les moyens de subsistance des communautés agricoles du continent ».

Selon les statistiques de l’OMS, la superficie consacrée à la culture du tabac a augmenté de 3,4 % en Afrique, entre 2012 et 2018, tandis qu’elle a diminué de 15,7 % au niveau mondial. Au cours de cette période, la production de feuilles de tabac a diminué de 13,9 % au niveau mondial, alors qu’elle a augmenté de 10,6% en Afrique.

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Non seulement les plans de tabac prennent la place des céréales ou des légumes, mais ils fragilisent les écosystèmes, épuisent la fertilité des sols, contaminent les masses d’eau et polluent l’environnement. In fine, la production de tabac exacerbe la insécurité alimentaire et nutritionnelle, dont souffrent 57,9% des Africains, à des niveaux modérés à graves.

Se tourner vers les cultures vivrières

Deux cent soixante-dix huit millions de personnes sont formellement confrontés à la faim en Afrique. Or l’intensification des conflits, des extrêmes climatiques et des chocs économiques contribuent, ces derniers mois, à une tendance fâcheuse, en matière d’accès à l’alimentation.

En parallèle des campagnes anti-cigarette grand public, l’OMS tente donc d’aider les cultivateurs de tabac à se tourner vers des cultures vivrières. Ces deux dernières années, des expériences ont été menées au Kenya, en Ouganda ou encore en Zambie. Les Nations unies invitent les gouvernements à mettre fin aux subventions fournies à la culture du tabac et à investir ces sommes dans les programmes de conversion agricole. Reste à savoir si le lobbying industriel saura contrecarrer cette évolution…

Ouattara, Gbagbo, Bédié… Les locales, tour de chauffe avant la présidentielle

Derniers scrutins avant la course à la magistrature suprême de 2025, les élections régionales et municipales du 2 septembre prochain représentent un test majeur pour les partis politiques. Et pour tous les Ivoiriens.

Mis à jour le 31 mai 2023 à 08:02
 
 

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Photo de famille avec les membres du Parlement réunis en Congrès, le 25 avril 2023, à Abidjan. Autour d’Alassane et Dominique Ouattara : Jeannot Ahoussou Kouadio, président du Sénat, et Adama Bictogo, président de l’Assemblée nationale (à g.), et Tiémoko Meyliet Koné, vice-président du pays (d.). © ISSOUF SANOGO/AFP

 

 

La campagne électorale n’est pas encore officiellement ouverte en Côte d’Ivoire, pourtant tous les ingrédients en sont déjà réunis. Sur le terrain, les alliances se font et se défont, des rapprochements se précisent, les dons aux plus démunis et les cadeaux aux associations locales se multiplient, des concerts pour les jeunes s’organisent, les promesses s’entrechoquent… Et les appétits politiques s’aiguisent.

Le 2 septembre, des millions d’Ivoiriens seront appelés à renouveler leurs représentants locaux dans le cadre d’élections régionales et municipales couplées. Un tour de chauffe pour les partis, à deux ans de la prochaine course à la magistrature suprême, prévue en 2025.

Qui contrôlera les mairies et les conseils régionaux ? En 2018, le camp présidentiel s’était imposé dans 18 régions sur 31 et avait raflé 92 mairies sur 201. Cette année, sa stratégie, planifiée bien en amont de celles de ses concurrents, tient en quelques mots : étendre un peu plus son maillage territorial et confirmer son hégémonie. Nombreux sont les observateurs qui parient sur une nouvelle percée de la majorité, face à une opposition qui peine, pour l’heure, à se rassembler, malgré des tractations visant à aboutir, dans certaines circonscriptions, à des listes communes.

Grande offensive du RHDP

Le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, au pouvoir) a dévoilé les noms de ses candidats le 20 avril. Mais, dès novembre 2022, le camp présidentiel s’était positionné dans les régions et dans les plus grandes villes du pays, s’octroyant une avance sur ses concurrents.

Ainsi, depuis plus de six mois, Adama Bictogo, le président de l’Assemblée nationale, fait activement campagne dans les dédales de Yopougon, immense et précaire commune de 1,5 million d’habitants dans l’ouest d’Abidjan, acquise à la majorité depuis 2013, mais où la liste commune du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, de l’ex-président Henri Konan Bédié) et de la plateforme Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS, pro-Gbagbo) s’était imposée lors des législatives de mars 2021. Le député d’Agboville y déploie des moyens importants et fait tourner à plein régime ses réseaux. Dernier coup d’éclat : la visite à « Yop » de la star congolaise Koffi Olomidé, en avril.

À LIRECôte d’Ivoire : Yopougon, le pari risqué d’Adama Bictogo

Alassane Ouattara sera, on le sait, très vigilant quant aux résultats de ces scrutins locaux. Il s’est personnellement impliqué dans le choix des candidats, réclamant la mobilisation de tous les poids lourds de la majorité.

Ainsi, le Premier ministre, Patrick Achi, brigue à nouveau la tête du conseil régional de La Mé (Sud-Ouest), qu’il dirige depuis bientôt dix ans. Son épouse, Florence Achi, est candidate pour la première fois à Adzopé, chef-lieu de la région et village de son époux.

Une dizaine de ministres sont sur la ligne de départ, à l’instar de Téné Birahima Ouattara, ministre de la Défense et frère cadet du président, dans la région du Tchologo (Nord), de Kobenan Kouassi Adjoumani, ministre de l’Agriculture, dans le Gontougo (Nord-Est), d’Anne Désirée Ouloto, ministre de la Fonction publique, dans le Cavally (Ouest), ou encore de Mamadou Touré, ministre de la Promotion de la jeunesse, porte-parole adjoint du RHDP, candidat dans le Haut-Sassandra (Centre-Ouest).

À LIREAmadou Koné, pièce maîtresse d’Alassane Ouattara dans le Centre

Le chef de l’État déploie aussi les membres de son cabinet. Fidèle Sarassoro, son directeur de cabinet depuis 2017, est en lice dans la région du Poro (Nord) – jusqu’à présent dirigée par un doyen du RHDP, Coulibaly Tiémoko Yadé, 82 ans –, tandis qu’Éric Taba, chef du protocole de la présidence, se présente dans la commune abidjanaise de Cocody.

Ralliements opportuns

Le RHDP fait feu de tout bois pour empêcher les candidatures indépendantes et peut compter sur les ralliements d’élus locaux. En novembre 2022, Bonaventure Kalou, ex-attaquant du Paris-Saint-Germain (PSG), élu en 2018 en tant qu’indépendant à Vavoua – une commune de plus de 500 000 habitants du centre du pays, très pauvre et dépourvue de toute infrastructure de base –, annonçait rejoindre la majorité.

À LIRECôte d’Ivoire : pourquoi Bonaventure Kalou rejoint le RHDP

Un mois plus tard, Richard Yara, conseiller régional dans la Nawa (Sud-Ouest) et membre du bureau politique du PDCI, et Raymond Yapi N’Dohi, ancien maire de Koumassi, prenaient le même chemin. Ils seront suivis par N’Cho Acho Albert, le maire d’Agboville, Narcisse N’Dri, l’ancien directeur de cabinet d’Henri Konan Bédié, Kouamé Kouakou Lacina, ancien maire de la commune de Bocanda (Centre), ou encore Zézé Souassou Nicole Gohourou, élue maire en indépendante à Guibéroua (Centre-Ouest) la ville natale de Charles Blé Goudé.

À LIRECharles Blé Goudé : « Tôt ou tard, Laurent Gbagbo et moi allons nous voir »

Cette dernière qualifiait ce virage de « logique pour améliorer les conditions de vie des populations ». Bitumage des routes, travaux de voirie, etc., les élus locaux le savent, mieux vaut se rapprocher de l’appareil d’État pour bénéficier de ses moyens. Une expression a même été popularisée par un député, lui-même transfuge : « aller au restaurant ».

Le PPA-CI à l’épreuve du terrain

À la grande question « qui pèse quoi aujourd’hui ? » répondront les résultats du Parti des peuples africains de Côte d’Ivoire (PPA-CI), de Laurent Gbagbo, particulièrement attendus. L’ancien président ivoirien a mis sur pied cette formation « panafricaniste et souverainiste » en 2021, à son retour en Côte d’Ivoire, après son acquittement définitif par la Cour pénale internationale (CPI) alors qu’il était inculpé pour crimes contre l’humanité durant la crise postélectorale de 2010-2011.

Exit le Front populaire ivoirien (FPI), laissé à Pascal Affi N’Guessan après des années de bras de fer juridique. Le PPA-CI, nouvel instrument politique de Gbagbo, prépare son baptême du feu. Il tentera de se faire une place dans 22 des 31 régions du pays et dans 129 communes sur 201.

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Aux régionales, à l’exception du Poro, à la frontière malienne, où le parti présente Seydou Soro, alias « Soro Coton » (président du conseil d’administration de l’Intercoton sous Laurent Gbagbo), le PPA-CI évite le nord du pays. Dans ce septentrion traditionnellement acquis au camp présidentiel, le PPA-CI le sait, ses chances de victoire sont extrêmement minces. Mais ce n’est pas la raison qui aurait poussé sa direction à concentrer ses efforts dans la moitié sud du pays.

Justin Koné Katinan, le porte-parole du parti, avance « la fracture sociopolitique […] encore forte » en Côte d’Ivoire et accuse les autorités d’« institutionnalisation de la violence comme mode de conservation du pouvoir », ce qui empêche son déploiement dans le Nord.

Plus au sud donc, elle a choisi Stéphane Kipré, vice-président exécutif du parti, chargé de l’implantation, et ex-gendre de Gbagbo, pour ferrailler dans le Haut-Sassandra. Le député Hubert Oulaye, président exécutif du PPA-CI, se positionne pour sa part dans le Cavally. Quant à Assoa Adou, compagnon de route historique de Gbagbo et président du conseil stratégique du parti (CSP), il se lance dans l’Indénié-Djuablin (Sud-Est).

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Dans la région voisine du Sud-Comoé, Georges Armand Ouégnin, également membre du CSP, fera face au président de région sortant, Aka Aouélé, qui préside aussi le Conseil économique, social, environnemental et culturel. L’ancien ministre de Gbagbo Sébastien Djédjé Dano, lui, est attendu dans le Gôh (Sud).

 

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Le député Michel Gbagbo, candidat désigné par le PPA-CI pour défendre ses couleurs dans l’immense commune abidjanaise de Yopougon, où il affrontera Adama Bictogo, le président de l’Assemblée, qui y mène campagne pour le RHDP. © ISSOUF SANOGO/AFP

Sans surprise, à Yopougon, Michel Gbagbo, député et fils de l’ancien président a été choisi pour affronter Adama Bictogo. Il pourrait bénéficier d’un accord avec le PDCI, qui y présente le député Dia Houphouët Augustin Yohou. C’est à « Yop », considéré comme l’un de ses fiefs, que le septuagénaire Laurent Gbagbo a tenu un grand meeting le 31 mars dernier, dans le cadre de sa « fête de la renaissance ». L’occasion pour le Woody, relativement discret depuis son retour à Abidjan, de rassurer ses partisans « sur son envie et sa volonté de faire du PPA-CI le principal parti d’opposition et sur sa détermination en vue des prochaines élections locales », avait alors confié Katinan.

Où en est le PDCI ?

Du côté du PDCI, de longues tractations ont finalement accouché des noms de 27 candidats aux régionales, parmi lesquels l’ex-secrétaire général du parti, Alphonse Mady Djédjé, dans le Haut-Sassandra, et Simon Doho, président du groupe parlementaire du parti, dans le Guémon (Ouest) .

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Dans la capitale, Yamoussoukro, le parti a finalement désigné Patrice Kouamé Kouassi, au détriment du maire sortant, Jean Kouacou Gnrangbé Kouadio, édile depuis une vingtaine d’années et qui souhaitait se représenter. Il affrontera, côté majorité, Souleymane Diarrassouba, le ministre de l’Industrie et du Commerce.

À Grand-Bassam, Linda Diplo représentera l’ancien parti unique, malgré le soutien exprimé par la base à Georges-Philippe Ezaley, secrétaire exécutif en chef adjoint de Bédié. Enfin, dans la commune abidjanaise de Cocody, le PDCI a désigné le maire sortant, Jean-Marc Yacé. Quant à la députée de la commune, Yasmina Ouégnin, qui convoite ce mandat, elle a déjà fait savoir qu’elle se présenterait, mais en indépendante : un coup dur pour le parti, qui, comme le RHDP, tente à tout prix de limiter l’éparpillement des voix.

Le FPI, partenaire particulier du RHDP

Après des mois de négociations, le FPI, dirigé par Pascal Affi N’Guessan, s’est pour sa part entendu avec le RHDP sur « un accord de partenariat » pour « la réconciliation nationale, la cohésion sociale et la démocratie ». À Cocody, son candidat, Issiaka Sangaré, secrétaire général du parti, a d’ores et déjà fait part de son soutien au RHDP.

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Le camp présidentiel n’a cependant pas manqué d’aligner des candidats dans le Moronou (Centre-Est), l’unique région acquise au FPI. Et c’est Mathias Ahondjon N’Guessan qui a été désigné pour y affronter Pascal Affi N’Guessan, candidat à sa réélection. Le FPI sera cependant dans la course sur l’ensemble du territoire, sans cacher le manque de moyens financiers dont pâtiront ses candidats pour faire campagne.

Bola Tinubu prend les rênes du Nigeria

Le « faiseur de rois » a prêté serment ce lundi 29 mai à Abuja pour devenir officiellement le nouveau président du Nigeria. De la dette à l’insécurité, le pays est confronté à de nombreux défis, auxquels le dirigeant va devoir faire face.

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 29 mai 2023 à 17:27
 
 
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Bola Tinugu salue les invités lors de sa cérémonie d’investiture comme nouveau président du Nigeria, place de l’Aigle à Abuja, le 29 mai 2023. © KOLA SULAIMON / AFP

 

« En tant que président de la République fédérale du Nigeria, je m’acquitterai de mes devoirs et de mes fonctions honnêtement, au mieux de mes capacités, fidèlement et conformément à la Constitution », a déclaré le nouveau président, Bola Ahmed Tinubu, lors de sa cérémonie d’investiture à Abuja, la capitale fédérale. Il a également appelé à l’unité du Nigeria et a promis de faire de la sécurité « sa priorité ». De nombreux chefs d’État africains ont fait le déplacement pour la cérémonie, comme les présidents Nana Akufo-Addo(Ghana), Cyril Ramaphosa (Afrique du Sud) ou Paul Biya (Cameroun). Un important dispositif sécuritaire était déployé dans la capitale.

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L’investiture s’est tenue trois mois après la présidentielle du 25 février, dont le résultat est contesté par les deux principaux candidats de l’opposition, Atiku Abubakar et Peter Obi, qui dénoncent des fraudes massives du parti au pouvoir. Leurs recours en justice sont en cours d’examen. Le nouveau président est aussi visé par des accusations de corruption, qu’il a toujours niées, mais n’a jamais été condamné. Sa santé est également un sujet de préoccupation.

Différence de style

Surnommé « le faiseur de rois » ou « le parrain », du fait de son immense influence politique, Bola Tinubu avait fait campagne en soulignant que c’était « son tour » de diriger la première économie du continent. Il avait mis en avant son expérience à la tête de Lagos, locomotive du Nigeria, qu’il a gouvernée de 1999 à 2007. Nombreux sont ceux qui affirment que cet habile homme politique et d’affaires a contribué à moderniser et sécuriser la capitale économique de 20 millions d’habitants. Ils espèrent qu’il aura un impact similaire sur le reste du pays.

Âgé de 71 ans, le dirigeant d’ethnie yorouba, originaire du sud-ouest du pays, succède ainsi à Muhammadu Buhari, du même parti que lui. Cet ancien général de 80 ans, un peul du Nord, se retire après deux mandats, comme le prévoit la Constitution, et un bilan jugé très décevant. La première élection de Muhammadu Buhari, en 2015, avait suscité un grand espoir, en termes de lutte contre la corruption et l’insécurité rampante. Mais il a a largement déçu. Après huit années au pouvoir, il laisse le Nigeria face à d’immenses difficultés économiques (inflation à deux chiffres, explosion de la dette et de la pauvreté) et aux violences massives de groupes jihadistes et criminels.

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Sa présidence a montré « qu’il était possible pour un individu perçu par beaucoup comme incorruptible de diriger une administration qui est néanmoins définie par la corruption et l’incompétence », selon le chercheur Ebenezer Obadare, du groupe de réflexion Council on Foreign Relations, basé à Washington. « Avec le nouveau gouvernement de Bola Tinubu, les Nigérians verront bientôt si un dirigeant largement considéré comme corrompu peut présider une administration relativement exempte de malversations et raisonnablement compétente ».

Les deux hommes diffèrent en termes de style et de réputation, mais tous deux sont musulmans dans un pays divisé à parts presque égales entre chrétiens et musulmans, et tous deux ont un âge avancé. Durant ses deux mandats, Muhammadu Buhari s’est rendu à plusieurs reprises au Royaume-Uni pour raisons médicales, et Bola Tinubu a passé du temps à l’étranger pendant la campagne électorale et avant son investiture. Avec les spéculations sur sa santé, les regards se sont tournés vers son vice-président, Kashim Shettima, ancien gouverneur de l’État de Borno (nord-est) âgé de 56 ans.

Redresser l’économie

Bola Tinubu devra s’atteler à redresser l’économie du pays. L’un des principaux défis du Nigeria, riche en pétrole, est qu’il échange du brut valant des milliards de dollars contre du carburant importé (en raison des défaillances de ses raffineries) qu’il subventionne ensuite pour son marché. Cette situation a entraîné une énorme perte de revenus et de devises, contribuant à l’explosion de la dette.

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Selon la Banque mondiale, plus de 80 millions des 215 millions de Nigérians vivent en dessous du seuil de pauvreté. Les Nations unies ont prévenu que plus d’un quart d’entre eux seraient confrontés à un risque élevé d’insécurité alimentaire cette année. Le géant anglophone a beau être l’un des pays les plus dynamiques du continent, notamment grâce à sa florissante industrie culturelle (entre le Nollywood et l’Afrobeats), il fait aussi face à une grave fuite des cerveaux.

Une autre priorité du nouveau gouvernement sera de lutter contre l’insécurité. Le pays fait face à une insurrection jihadiste vieille de 14 ans dans le nord-est, à des bandes criminelles qui ravagent le nord-ouest et le centre, qui pratiquent tueries de masse et enlèvements contre rançon, et à une agitation séparatiste dans le sud-est.

(avec AFP)