Les Abolitions de l’esclavage,
Marcel Dorigny, Puf, 2018, 128 p., 9 €


La France a aboli l’esclavage en 1794, pour le rétablir en 1802 et l’abolir à nouveau en 1848. Avant cela, il avait été supprimé à Saint-Domingue en 1793 suite à la révolte des esclaves.

L’Angleterre, quant à elle, l’a aboli en 1833, après avoir interdit la traite négrière en 1807.
Pour les États-Unis, il faut attendre 1865, et au Brésil 1888, année où l’esclavage lié à la traite transatlantique prend véritablement fin. Il a donc fallu environ un siècle de mouvements critiques pour mettre un terme à cette abomination.

Pour Marcel Dorigny, qui en rappelle ici les grandes étapes, cette émancipation procède de plusieurs facteurs.
Il y a bien sûr le développement des idéaux de justice au siècle des Lumières. Si l’esclavage avait été critiqué avant cette époque, son abolition avait très rarement été réclamée. Mais, à la fin du 18e siècle, l’idée qu’il peut et doit être aboli se répand dans les esprits éclairés.

Cette prise de conscience n’aurait toutefois pas été aussi forte sans les révoltes récurrentes des esclaves qui, par leur résistance, manifestaient l’injustice de leur sort. Ces rébellions eurent aussi pour effet d’entretenir un sentiment d’insécurité chez les propriétaires d’esclaves qui pouvaient dès lors réaliser la fragilité de ce système d’exploitation. Enfin, le développement du salariat dans les pays européens et la mutation du commerce international (l’Angleterre se tournait davantage vers l’Inde) autorisèrent à concevoir un monde sans esclavage. Le mouvement abolitionniste était toutefois tiraillé entre ceux qui réclamaient une interdiction immédiate et ceux qui pensaient qu’en procédant par étapes, la condition allait disparaître d’elle-même. Certes, le système esclavagiste n’a pas été aboli en un coup, mais, remarque l’auteur, les mesures intermédiaires (comme l’interdiction de la traite) ne l’ont nullement affaibli. Pour y mettre un terme, il a fallu la détermination des abolitionnistes radicaux et la persistance des révoltes. De là à faire de cette histoire une source d’inspiration pour de futures nobles causes… 

Thomas Lepeltier  Octobre 2018