[Exclusif] Tiémoko Meyliet Koné reconduit à la tête de la Bceao
Tiémoko Meyliet Koné, gouverneur de la BCEAO, le 27/10/2016 à Dakar © Clement Tardif pour JA
Selon les informations de Jeune Afrique, le gouverneur de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) effectuera un nouveau mandat de six ans à la tête de l’institution.
C’est un satisfecit général qu’a reçu Tiémoko Koné, gouverneur de la Bceao en fin de mandat, des hautes autorités de l’Union économique et monétaire ouest-africaine.
Dans un courrier adressé au gouverneur et dont JA a obtenu la teneur, elles informent ce dernier de sa reconduction dans ses fonctions tout le félicitant pour les prouesses accomplies. « Sa reconduction traduit la pleine satisfaction des plus hautes instances de l’Union pour les résultats positifs », assure un habitué de l’institution monétaire ouest-africaine basée à Dakar. «Le gouverneur tient bien la maison et c’est l’essentiel », explique à JA un ancien cadre de la Commission bancaire, établie à Abidjan.
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Ancien directeur de cabinet de Guillaume Soro, alors Premier ministre, le gouverneur Koné a eu un passé politique comme ministre de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat, et a brièvement – de décembre 2010 à mai 2011- occupé le poste de conseiller spécial en charge des questions économiques et financières auprès du président ivoirien, Alassane Ouattara, avant de prendre les commandes de l’institution monétaire ouest-africaine.
Inclusion financière, fintech, mesures prudentielles…
Nommé le 30 mai 2011, lors d’un sommet des dirigeants de l’Uemoa à Lomé, il avait alors achevé le mandat prévu jusqu’en 2014 de son prédécesseur, Philippe-Henri Dacoury-Tabley, contraint à la démission quelques mois plus tôt.
Joint au téléphone par Jeune Afrique, Jean-Luc Konan, patron de Cofina, salue une « bonne décision ». Et de citer quelques-unes des réalisations d’un gouverneur qui a selon lui eu un « impact majeur » sur le secteur bancaire. Il a notamment été à l’initiative de la Semaine de l’inclusion financière, « qui est aujourd’hui un événement incontournable », ou encore Bureau d’information sur le crédit, « qui permet de vérifier la fiabilité de nos contreparties et in fine permet de faire baisser les primes de risques ».
« Sous l’impulsion de son gouverneur, la BCEAO s’est également positionnée en amont de la réflexion sur le rôle des fintech dans le processus de la digitalisation et de l’inclusion financière », poursuit le patron de Cofina, qui relève enfin « l’implémentation des réformes de Bâle II et Bâle III » et les mesures adoptées dans le cadre de la gestion de la pandémie du Covid-19, « qui ont notamment permis aux entreprises de bénéficier de reports d’échéances afin de soulager leur trésorerie ».
Austère et réservé
Recruté au sein de l’institution sur concours en 1975, Tiémoko Meyliet Koné connaît bien les rouages d’une administration dans laquelle il a passé plus de trente ans. D’abord adjoint au directeur national de la BCEAO pour la Côte d’Ivoire, il y a gravi les échelons pour passer conseiller spécial du gouverneur et membre du gouvernement de la banque, avant son départ en 2006. À ce dernier poste, il été partie prenante de toutes les décisions liées à la gestion de l’institution, à la conception et à la mise en œuvre de la politique monétaire des États membres.
Personnage austère et réservé, Tiémoko Meyliet Koné considère sa fonction comme un sacerdoce, selon les mots d’un fin connaisseur de l’institution, et « s’est toujours inscrit dans la continuité de ses devanciers tout en adaptant les choix à l’évolution du contexte ».
Plusieurs défis l’attendent pour ce nouveau mandat, au premier rang desquels la question sensible de la réforme du franc CFA . « Nous n’avons pas beaucoup de visibilité sur cette réforme. Nous sommes dans une sorte d’imbroglio à ce stade. Faut-il mettre en avant le franc CFA ou l’Eco ? », nous glisse un banquier sous couvert de l’anonymat.
Franc CFA-Eco, une réforme à accélérer
Il devra accélérer cette réforme d’autant plus que depuis l’annonce, les primes de couverture de risque de change ont accru, malgré une inflation faible – moins de 3 %, selon un analyste financier ouest-africain. « Les banques et les entrepreneurs refusent de s’endetter en euros, craignant des conséquences en cas de changement de parité », précise notre source.
« Stoïque » selon les mots d’un connaisseur de l’institution monétaire face aux critiques, parfois acerbes, contre le franc CFA, la monnaie utilisée par ses huit pays membres, le gouverneur de la BCEAO rappelle que c’est avec cette même monnaie, aujourd’hui décriée, que les économies de la zone réalisent une croissance moyenne de 6,5 % par an.
Autre question délicate qui attend le gouverneur de la Bceao, celle du crédit à l’économie, actuellement autour de 20 %. Un ratio trop faible aux yeux des dirigeants bancaires de la place, qui mettent en avant le taux de 100 % en vigueur en Europe. Ces derniers rappellent en outre que les banques commerciales empruntent à 2 % dans la zone Uemoa mais financent le risque souverain des États à 6 % en moyenne.
« Mon objectif, c’est d’apporter une contribution significative aux politiques ambitieuses engagées par les États pour accélérer la croissance et atteindre leurs objectifs d’émergence économique », expliquait-il fin 2016 à JA, dans l’une des rares interviews qu’il ait accordées.