Quand les coopératives d’épargne ouest-africaines se mettent à la tech
La Confédération des institutions financières en Afrique de l’Ouest vise 10 millions de clients d'ici à 2023. © Luis TATO / AFP
Six réseaux de microfinance lancent à partir de Ouagadougou un dispositif commun de transactions financières devant permettre à plus de 4,5 millions de clients d’opérer en temps réel dans 800 points de vente.
C’est une révolution numérique qui va permettre à quelque 4,5 millions de clients des réseaux de microfinance, membres de la Confédération des institutions financières en Afrique de l’Ouest (CIF) de pouvoir réaliser des transactions financières en temps réel.
Il s’agit du Réseau des caisses populaires du Burkina, de Kafo Jiginew et de Nyèsigiso au Mali, de la Fececam au Bénin, de la Fucec au Togo ou encore du Pamecas au Sénégal. Dénommé Système d’information et de gestion (SIG), le dispositif a été lancé le 8 octobre à Ouagadougou par les autorités burkinabè et les dirigeants de la CIF.
Partenariat digital avec le français SAB
L’institution financière a réuni ses principaux acteurs autour d’une retraite stratégique censée tracer sa nouvelle trajectoire avec, en point de mire, la mise en service d’offres digitales. Un segment très concurrentiel sur lequel se trouvent déjà des mastodontes comme le leader de la mésofinance Cofina ou encore le groupe français Baobab.
https://www.jeuneafrique.com/wp-content/themes/ja-3.0.x/assets/img/mondial2018/quote-article.png") left top no-repeat;">NOS PAYSANS DOIVENT POUVOIR UTILISER N’IMPORTE OÙ DES MOYENS MODERNES DE PAIEMENT
« Nous voulons offrir l’opportunité aux membres de ces coopératives d’épargne et de crédit de profiter des technologies pour réaliser des opérations à partir des terminaux de dernière génération, d’un smartphone ou d’une carte bancaire. Ce chantier transforme notre système d’information et organisationnel afin que les paysans ouest-africains, à l’image de ce qui se fait en Occident, puissent utiliser n’importe où des moyens modernes de paiement », explique à JA Mathieu Soglonou, directeur général de la CIF, basée à Ouagadougou.
Pour déployer ce nouveau dispositif de transaction, la CIF a noué un partenariat avec le français SAB, absorbé par Sopra Banking Software, un fournisseur de solutions informatiques. La CIF explique avoir déboursé 10 milliards de F CFA (plus de 15 millions d’euros) pour l’acquisition de cette technologie.
Réduire les formalités administratives
Le partenariat consiste à moderniser le système d’exploitation des six réseaux de microfinance afin d’être capable de produire en temps réel des données financières comme le nombre de transactions réalisées et in fine d’offrir de nouveaux services.
https://www.jeuneafrique.com/wp-content/themes/ja-3.0.x/assets/img/mondial2018/quote-article.png") left top no-repeat;">NOUS VISONS 10 MILLIONS DE CLIENTS D’ICI À 2023
« Nous lancerons d’ici à janvier 2021 de nouveaux produits. Nos clients auront par exemple accès au SMS Banking pour les opérations de dépôt et de retrait d’argent. À terme, d’autres services visant à réduire les formalités administratives pour l’octroi de crédit seront mis en service. De ce fait, nous visons d’ici à 2023 le cap de 10 millions de clients », assure M. Soglonou.
Opérationnel au Burkina à travers le Réseau des caisses populaires qui contrôlent 70 % du marché burkinabè de la microfinance, le logiciel sera progressivement étendu au Sénégal avec l’intégration d’une composante finance islamique, selon les mots du directeur général de la CIF. « Nous mettrons ensuite le cap sur le Bénin, le Togo et enfin le Mali en 2021 », détaille le dirigeant béninois.
Soutien aux petits producteurs, aux PME agricoles et à l’économie verte
En 2018, ces réseaux ouest-africains de microfinance avaient mis en branle les activités de la Financière de l’Afrique de l’Ouest (Finao), un établissement de crédit qui a vocation à devenir une banque sous-régionale.
N’agissant pas comme une banque de détail, la Finao, implantée à Dakar, utilise l’excédent des ressources collectées auprès des 4,5 millions de clients dans 800 points de vente, notamment pour appuyer les petits producteurs, les PME agricoles ou l’économie verte.
Avec la Finao (détenue à 47 % par la Faîtière des caisses populaires du Burkina, et à 45 % par le fabricant suisse d’intrants agricoles Éléphant Vert), la CIF s’est également engagée sur un chantier d’envergure : proposer une offre digitale partout en Afrique de l’Ouest.
Une collecte toujours plus importante
Baptisée Danaya, la plateforme mise en service en 2018 par le Réseau des caisses populaires du Burkina cible principalement la béninoise Fecacam, les maliennes Kafo Jiginew et Nyèsigiso, Pamecas au Sénégal et la Fucec au Togo.
Danaya permet d’offrir des services de porte-monnaie électronique : à partir de comptes virtuels, les clients peuvent effectuer directement via leur téléphone mobile ou leur interface web diverses transactions financières comme le paiement de factures (eau, électricité, etc.) et de salaires ou des transferts d’argent sans se déplacer.
En 2019, l’épargne collectée par ces six institutions a franchi le cap des 400 milliards de F CFA, contre quelque 327 milliards de F CFA de crédits octroyés. Avec des fonds propres estimés à plus de 163,5 milliards de F CFA, le Réseau CIF a vu son bilan s’établir, à la fin de décembre 2019, à plus de 601 milliards de F CFA.