Guinée : satisfaction d’un côté, contestation de l’autre après la victoire d’Alpha Condé

| Par - à Conakry
Mis à jour le 25 octobre 2020 à 13h23
Des affiches électorales pour la campagne présidentielle, le 12 octobre 2020.

Des affiches électorales pour la campagne présidentielle, le 12 octobre 2020. © JOHN WESSELS / AFP

 

Après la proclamation par la Ceni de la victoire d’Alpha Condé, son adversaire Cellou Dalein Diallo annonce qu’il saisira la Cour constitutionnelle et appelle ses partisans à la mobilisation.

Membres du corps diplomatique, représentants d’institutions, du gouvernement et du camp présidentiel… Ce samedi 24 octobre, des invités triés sur le volet avaient pris place dans la salle des congrès du Palais du peuple, situé à l’entrée de la presqu’île de Kaloum, à Conakry.

« Le candidat Alpha Condé est déclaré élu président de la République dès le premier tour », a déclaré Kabinet Cissé, le président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Dans la salle, le camp présidentiel savoure sa victoire et, le long de la route de Donka, militants et sympathisants laissent éclater leur joie.

« Il faut remercier le peuple de Guinée, qui a maintenu son ancrage démocratique en s’exprimant dans les urnes, se félicite Domani Doré, porte-parole du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG arc-en-ciel, au pouvoir). Sans surprise pour nous, il a renouvelé sa confiance au professeur Alpha Condé. Nous déplorons l’attitude de Cellou Dalein Diallo et nous travaillerons à ce que rien ne vienne entraver notre démocratie en construction. »

« Nous allons saisir la Cour constitutionnelle »

Dans les fiefs de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG, opposition) en banlieue de Conakry, l’ambiance était toute autre. La tension est restée vive plusieurs heures durant et aucun véhicule ne circulait sur la route Le Prince. Les populations sont restées chez elles tandis que les forces de sécurité patrouillaient dans les rues.

« Nous ne reconnaissons pas ces résultats. Nous avons des documents sortis des urnes qui disent autre chose. Nous allons préparer notre dossier conformément à la loi guinéenne et saisir la Cour constitutionnelle, a prévenu Aliou Condé, secrétaire général de l’UFDG. Nous espérons que le droit sera dit et que la Cour nous surprendra agréablement. Nous continuons la lutte ! »

Selon la Ceni, le taux de participation s’élève à 78,88 %. Dans certaines villes de Haute-Guinée acquises au pouvoir, il frôle les 100 %. Aliou Condé dénonce « des pourcentages gonflés ». « Est-il possible que tous les inscrits d’un bureau votent ? Nous avons les vrais procès-verbaux de ces zones, leurs taux de participation ne dépassent pas 50 %. Ce sont des chiffres fabriqués », dénonce cet homme de confiance de Cellou Dalein Diallo.

« On ne doit pas s’étonner que le RPG ait des scores élogieux »

« Il faut bien que l’une des parties trouve quelque chose à redire, rétorque Domani Doré. On ne doit pas s’étonner que le RPG fasse des scores élogieux en Haute-Guinée ou en Guinée forestière. Le président Alpha Condé a été très proche des électeurs de ces régions. »

« Il y a eu des anomalies, il revient aux partis concernés de les soulever devant la Cour constitutionnelle », assure pour sa part Dansa Kourouma, président du Conseil national des organisations de la société civile (CNOSC), qui a déployé six mille observateurs à travers le pays.

Si ce dernier estime raisonnable le taux de participation à l’échelle nationale, il reste toutefois dubitatif quant à certains chiffres annoncés localement. « Un taux de participation à 100 % est impossible dans le contexte guinéen. Cela va donner du travail à la Cour constitutionnelle, il y a un élagage indispensable à faire pour que ces chiffres soient conformes à la réalité. » Mais le plus important, selon lui, est d’appeler à la retenue, de privilégier le recours judiciaire et de renoncer à toute forme de violence.

Sera-t-il entendu ? « L’UFDG et ses alliés de l’Alliance nationale pour l’alternance démocratique (ANAD) rejettent catégoriquement ces faux résultats et appellent les populations à se mobiliser pour défendre, par tous les moyens légaux, la vérité des urnes qui donne leur candidat vainqueur à 53, 84 %, précise un communiqué du parti publié dès samedi. L’UFDG et ses alliés ne renonceront pas aux manifestations dans les rues et sur les places publiques pour protester contre ce hold-up électoral. »