Voix d'Afrique N°102.
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Rappel historique
Le Renouveau charismatique est né du contact des catholiques avec des chrétiens du pentecôtisme, mouvement issu du protestantisme. En 1900, le pasteur méthodiste Charles Parham de Topeka (Kansas) aux USA, s’interrogeait avec ses étudiants sur la morosité de leur Église, ainsi que d’autres Églises institutionnelles. Selon eux, cette morosité était en contradiction avec ce que vivait l’Église primitive qui était joyeuse, tonique et dynamique comme nous pouvons le lire dans les Actes des Apôtres. Le pasteur et ses étudiants se posaient des questions sur la disparition des charismes. Au cours d’une rencontre de prière avec imposition des mains, plusieurs reçurent des charismes, surtout celui de glossolalie. Désavoué par son Église, le pasteur Parham fonda une communauté qui mit l’accent sur les charismes que les apôtres avaient reçus à la Pentecôte. Ce fut la naissance du Pentecôtisme. Ce mouvement connut une expansion très rapide aux USA et dans le monde entier, surtout dans le tiers-monde.
La naissance du Renouveau charismatique
Avec la sécularisation, le développement de la technologie, le matérialisme, Dieu était de plus en plus marginalisé dans la vie de nombreux occidentaux après la deuxième guerre mondiale. Pour-tant, beaucoup de croyants sentaient comme un vide dans leur vie, un vide que rien ne semblait combler. Le besoin d’un profond renouveau spirituel devenait de plus en plus fort chez beaucoup de catholiques aux USA.
En août 1966, certains professeurs et étudiants de l’Université Duquesne à Pittsburgh, sentant que la Bible, le Saint-Esprit et les charismes manquaient à leur vie, entrèrent en contact avec des pentecôtistes. Ils voulaient apprendre d’eux comment recevoir le ‘baptême dans l’Esprit’. Ils se mirent alors à lire les Actes des Apôtres et les épîtres de saint Paul. Pendant une année, dans leur prière quotidienne, ils invoquèrent le Saint-Esprit par l’hymne “Veni Creator Spiritus”. Au cours d’un week-end de retraite, ils demandèrent à l’Esprit Saint de venir renouveler le visage de l’Église et de la terre. Ils firent alors une expérience semblable à celle des pentecôtistes, expérience qu’on appelle actuellement “l’effusion de l’Esprit”, avec le “parler en langues”. C’était le début du Renouveau charismatique dans l’Église catholique.
Lente et progressive reconnaissance par l’Église
Au tout début, beaucoup d’évêques et de prêtres étaient réticents face à ce nouveau mouvement. Mais ce dernier se propageait très vite à travers le monde entier. Certains, tel que le frère Ephraïm, (fondateur du “Lion de Judas” devenu la
communauté des Béatitudes) firent le déplacement et allèrent aux États-Unis pour être initiés au Renouveau charismatique. De retour dans leur pays, ils fondèrent des communautés charismatiques qui suscitaient bien des réticences de la part de certains évêques et curés ; quelques-uns cependant ont bien accueilli ce nouveau mouvement.
C’est en 1975 que le Pape Paul VI a reconnu officiellement le Renouveau charismatique comme mouvement de l’Église catholique, le qualifiant de “chance pour l’Église” en ces termes : « Rien n’est plus nécessaire à un tel monde, de plus en plus sécularisé, que le témoignage de ce ‘renouveau spirituel’ que le Saint-Esprit suscite aujourd’hui dans les régions et les milieux les plus divers. Les manifestations en sont variées : communion profonde des âmes, contact intime avec Dieu dans la fidélité aux engagements pris lors du baptême, dans une prière souvent communautaire, où chacun, s’exprimant librement, aide, soutient, nourrit la prière des autres… Comment alors ce ‘renouveau spirituel’ ne pourrait-il pas être une ‘chance’ pour l’Église et pour le monde ? Et comment, en ce cas, ne pas prendre tous les moyens pour qu’il le reste ? »
Diverses formes de vie dans le Renouveau charismatique
Au départ, il s’agissait de groupes de prière, chacun se réunissant à son rythme. Progressivement, certains se sont constitués en communautés de vie dans lesquelles, selon le charisme de chacun, laïcs, religieuses, religieux et prêtres peuvent vivre ensemble. Voici quelques-unes de ces “nouvelles communautés” : les Béatitudes, le Chemin Neuf, la Communauté de l’Emmanuel, le Pain de vie, le Verbe de vie, etc. Beaucoup de ces communau-tés sont ouvertes à la mission et en ont fondé d’autres ailleurs dans le monde. Elles mettent un accent particulier sur l’évangélisation. Elles proposent à leurs membres – et à tous et chacun - un cheminement d’approfondissement spirituel. Sur le plan vocationnel, on dirait qu’elles répondent mieux aux aspirations des jeunes que les congrégations traditionnelles : on y voit surgir beaucoup de vocations, même dans le monde occidental.
Les forces du Renouveau charismatique
Le Renouveau possède des richesses que nous allons juste mentionner sans les développer : l’importance et le sens renouvelé de la prière communautaire et personnelle ; la revalorisation des sacrements ; l’aspect d’évangélisation ; l’aspect missionnaire ; l’attention aux pauvres et aux marginalisés, les exclus de la société et les psychologiquement faibles s’y sentent à l’aise ; l’exercice des charismes tels que la guérison, le parler en langues ; la prise en compte du corps dans la prière ; un goût nouveau pour les saintes Écritures ; l’importance de la compassion et de l’intercession ; la créativité liturgique et artistique ; l’ouverture à la vie religieuse. Des catholiques allaient chercher ces “richesses” dans des sectes. Avec le Renouveau charismatique, ils peuvent rester dans l’Église où ils retrouvent ce qui leur manquait ! De façon générale, ceux qui deviennent charismatiques s’engagent un peu plus dans leur vie de foi, dans la vie paroissiale, dans la pratique de la charité chrétienne, même si des exceptions ne manquent pas.
Les faiblesses du Renouveau charismatique
À côté de ces richesses, mentionnons aussi certaines faiblesses : la tendance au sectarisme ; la prétention d’être des saints et, par là, de considérer les autres comme des pécheurs ; le sentiment d’incompréhension ; le danger de fidéisme ; la tendance au fondamentalisme ; la tendance à une lecture naïve et littérale de la Bible ; le repli sur soi ; la manipulation ; le surnaturalisme exagéré ; la ‘monopolisation’ du Saint-Esprit ; la recherche du merveilleux ; le mauvais usage des charismes ; la tendance au ‘syncrétisme’ religieux ; trop d’extériorité ; des ‘séances divinatoires’… Parfois trop d’autoritarisme de la part de certains bergers.
Que faut-il faire ?Les membres de ce mouvement ont besoin d’être accompagnés pour un meilleur discernement et éviter ainsi le risque de dérive. Il faut les encourager à faire fructifier les richesses du Renouveau et à combattre ses faiblesses. Une bonne formation biblique et doctrinale s’avère né-cessaire pour éviter le fidéisme et le fondamentalisme et permet-tre ainsi aux charismatiques d’avoir une véritable approche des Écritures, de l’Église et de la vie. Qu’ils sachent que la raison a aussi sa place dans la vie de foi. Un minimum d’exégèse ne fait aucun mal.
Contribution à l’évangélisation
Personnellement, sans en être membre, bien qu’il m’arrive de fréquenter l’un ou l’autre groupe, je suis convaincu que le Renouveau charismatique contribue efficacement à la mission évangélisatrice de l’Église. En voici deux exemples : Le 21 juin, journée mondiale de la musique, on voit en France des concerts en plein air, dans des rues, etc. Certaines communautés charismatiques vont aussi chanter sur les places publiques. Des gens s’y intéressent et certaines personnes retrouvent le chemin de l’Église par ce biais. À Lubumbashi (en RD Congo), depuis plusieurs années, le Renouveau charismatique organise un congrès à la fin du mois d’août. Lors de la célébration marquant la clôture du congrès, on présente des fidèles catholiques qui avaient quitté l’Église pour aller dans des sectes et qui reviennent dans l’Église par l’intermédiaire du Renouveau charismatique. On présente aussi des personnes qui n’ont jamais été catholiques, mais qui le deviennent grâce au Renouveau charismatique.
Arsène Kapya
M.Afr
