Le groupe Pepit'arts en tournée: «au Bénin, avant, les filles n'avaient pas le droit de toucher un tambour»

 

Depuis 2018, ils font vivre le patrimoine musical du Bénin. Les jeunes du groupe de percussion Pepit'arts, originaires de la ville d'Adjarra, arpentent les scènes. La troupe revient en France ce mois-ci pour une série de concerts. Romain Da Costa, directeur des relations internationales de Rosny-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, et président du Haut Conseil des Béninois de l'Extérieur, est à l'initiative de cette tournée. Objectif : contribuer au développement du Bénin dans tous les domaines. 

RFI: Vous êtes ici pour accompagner la tournée en Europe du groupe de percussion béninois les Pepit'arts, un groupe composé d'enfants, crée en 2018. Comment est né ce projet ?

Romain Da Costa: J'ai suivi les Pepit'arts sur les réseaux sociaux et j'aurais bien voulu les découvrir, les rencontrer un jour. Une jeune béninoise qui avait pour projet de faire la promotion du patrimoine du Bénin ? dans le cadre de son master ici en France, est venue nous voir à la mairie de Rosny-sous-Bois et nous a dit qu’elle aimerait faire venir les Pepit'arts. C'est là où ça a fait tilt et que je me suis dit que ça faisait des années que je voulais les rencontrer. Je vais voir le maire de Rosny-sous-Bois et, dans le cadre de notre coopération avec le Bénin, nous avons donc fait ce premier travail.

C'est comme ça que nous avons décidé de les accueillir en France, à Rosny-sous-Bois, mais aussi d'aller taper aux portes des communes qui font des festivals en leur expliquant que ce que nous faisons, c'est un projet qui mise sur les qualités femmes/hommes, parce qu’au Bénin, entre-temps, et dans beaucoup de pays d'Afrique, les femmes et les filles n'avaient pas le droit de toucher aux tambours.

Non seulement les filles ont aujourd'hui accès aux tambours mais elles jouent un rôle très important et prépondérant autour du tambour. C’est ce qui nous a séduit. On a constaté également que cette activité améliore sincèrement leur condition, les mûrit intellectuellement et leur permet financièrement de récolter de quoi aller alimenter cet atelier.

On a aussi le projet de créer une académie parce qu'il n'y a pas d'école chez nous, en Afrique. Les écoles de musique sont très rares. Bâtir une académie du tambour au Bénin, moi j'y crois, on a envie donc de les pousser pour ce que projet puisse aboutir.

Parce que Romain Da Costa, vous êtes directeur des relations internationales de Rosny-sous-Bois en Seine-Saint-Denis, tout près de Paris, et président du Haut Conseil des Béninois de l'extérieur. Votre rôle, c'est donc d'établir ce lien entre le Bénin et la France ?

Comme toutes les coopérations décentralisées, on observe que le début c'est toujours un enfant du pays qui a pris la main à un officiel, ici, pour lui montrer son pays et le lien se crée comme ça. C'est comme ça qu'en 2004, après un voyage au Bénin, on a réussi à connaître le maire de Rosny-sous-Bois et mettre en place ce service de coopération décentralisée et nouer des partenariats avec deux villes, Cotonou et Sèmè-Kpodji.

D'autres communes qui nous voient arriver, en tant que fils du Bénin et aussi la ville dont sont issus les Pepit'arts, la ville d’Adjarra, me sollicitent comme d'autres, plein d'autres villes du Bénin. Moi, j'utilise le vecteur ville de Rosny-sous-Bois - relations internationales - pour permettre aux autres villes du Bénin de pouvoir établir ce point-là.

En tant que président du Haut Conseil des Béninois de l'extérieur, on a comme mission de rassembler tous les Béninois établis en dehors du Bénin. On doit les propulser, c'est-à-dire que lorsqu'on découvre qu'un béninois à un talent, a un projet, nous devons être tous autour de lui, pour qu'ensemble nous soyons forts pour aller contribuer au développement du Bénin dans tous les domaines : économique, politique, social et culturel.

Vous dites que ce groupe, les Pepit'arts, vous a épaté, en quoi ?

Je m'identifie un peu à eux. Aujourd'hui, je suis directeur des relations internationales à la mairie de Rosny-sous-Bois mais qui peut imaginer, en me voyant, que j'ai été comme eux quand j'avais quatre, cinq, six ans ? A l'époque, nos parents n'avaient pas les moyens de nous acheter des jouets, nos jouets c'était les tambours. Donc très tôt, j'ai joué au tambour, très tôt, mon père me prenait sur ses épaules pour aller assister à des spectacles et je chantais, je dansais et je jouais au tambour. Donc retrouver ces jeunes-là et moi, ce que j'étais il y a plus de 60 ans, c'est ce qui m'a touché.

Et puis, j'ai trouvé qu'ils ont une telle adresse, compétence, un tel talent que nous n’avions pas à l'époque. Nous, on jouait comme ça, on n'avait pas de chorégraphe, d'encadreur et eux, aujourd'hui, ils ont cette chance d'avoir un directeur artistique, quelqu'un qui les guide. De voir des jeunes qui réussissent et qui accompagnent les autres, c'est tout cela que j'ai trouvé formidable et je vous assure que si vous voyez une composition de 20 ou 40 Pepit'arts, ça pourrait emballer dans une grande salle en France.

Vous êtes donc en quelque sorte le tourneur du groupe. Comment s'organise une tournée en Europe comme celle que sont en train de vivre les Pepit'arts ?

Eh bien « tourneur », c'est un grand mot parce que ce n'est pas mon métier, c'est le cœur qui est en train de parler. Je crois que l'on est en train d'essuyer les plâtres, donc on est allés vers les mairies, en vendant le projet sous cet aspect-là. S'ils vont à Sarcelles, c'est parce que je me suis déplacé pour rencontrer le service culturel de Sarcelles. J’ai eu la chance de rencontrer le maire de Sarcelles que je remercie ici, qui a tout de suite approuvé. Ça s'est passé en moins de 15 minutes. Je suis arrivé, j'ai présenté le projet, le maire est passé par là, je lui ai expliqué le projet, et il a dit « on y va ».

On a essayé beaucoup d'autres communes qui nous ont promis que l'année prochaine, elles les mettront dans leurs festivals. C'est un début, amateur, mais qui, je vous le promets, va se professionnaliser très prochainement parce qu'on tient vraiment à les faire connaître parce qu'ils le méritent.