Mali : Paris suspend son aide au développement et acte un peu plus le divorce

Après les crispations diplomatiques et la fin de la coopération militaire entre les deux pays, ce sont désormais les liens économiques qui se délitent.

Mis à jour le 18 novembre 2022 à 18:11
 
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Manifestation antifrançaise, à Bamako, le 22 septembre 2020. © Stringer / Anadolu Agency via AFP

 

Un à un, tous les ponts qui relient Paris à Bamako sont coupés. En janvier 2022, déjà, l’expulsion de l’ambassadeur français au Mali avait marqué un tournant dans les relations entre les deux pays. Elle sera suivie, en février, par l’annonce du retrait des soldats de l’opération Barkhane. Viendra ensuite, au mois de mars, le rappel de Paris de ses coopérants en fonction au sein de l’administration malienne.

Dernier clou dans le cercueil de la coopération économique entre les deux pays, qui semblent irréconciliables : le gouvernement français a décidé de suspendre les financements publics dédiés aux programmes de développement au Mali. La décision, actée il y a moins d’un mois, n’a pas encore été rendue publique, mais a déjà fait réagir un certains nombre d’organisations non gouvernementales.

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Les ONG inquiètes

Une cinquantaine d’entre elles ont co-signé un courrier adressé à Emmanuel Macron, envoyé par Olivier Bruyeron, président de Coordination Sud, qui rassemble 170 organisations, dont Oxfam, Médecins du monde ou encore Solidarités international.

Les signataires craignent qu’une telle décision ne vienne « fragiliser, voire mettre en péril la continuité d’actions de nombreuses organisations de la société civile maliennes et internationales », dont le retrait du Mali serait inévitable.

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« Le risque est très grand que la confiance construite au fil des années avec les populations et les organisations maliennes soit soudainement rompue ; et il sera très difficile de reprendre des activités à moyen et long terme, quand bien même les financements seraient dégelés », alerte le collectif d’ONG.

Demandant au président français de « revoir [sa] position », le collectif d’ONG estime que l’aide publique au développement « doit absolument être déployée et garantie en dehors de tout agenda politique ou sécuritaire, et uniquement selon les besoins des populations ».

90 millions d’euros par an

Dans les faits, les projets de développement, pour l’essentiel mis en œuvre par l’Agence française de développement (AFD), une institution publique, ont pour la plupart été suspendus dès février. « À l’exception de certains projets à vocation humanitaire ou de ceux quasiment terminés », précise une source au Quai d’Orsay.

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Jusqu’à ce que les relations se tendent avec Paris, Bamako figurait pourtant parmi les bénéficiaires « prioritaires de l’aide française », publie l’AFD sur son site internet.  Deux-cent-six millions d’euros y ont été engagés en 2019, selon l’AFD, et environ 90 millions décaissés par an ces dernières années, précise une source diplomatique. Des fonds répartis dans des projets variés, allant de l’accès à l’eau potable, aux soins ou à l’éducation, jusqu’à l’appui au secteur privé.

La suspension ne concernera pas l’aide humanitaire, évaluée à hauteur de 9 millions d’euros en 2022, « ni les bourses pour les étudiants maliens qui viennent étudier en France », précise-t-on côté français.