Au Mali, Assimi Goïta joue la fibre patriotique

Les Maliens sont désormais invités à manifester leur attachement à leur « souveraineté retrouvée » chaque 14 janvier, en souvenir de la mobilisation populaire contre les sanctions de la Cedeao.

Mis à jour le 13 janvier 2023 à 12:51

 
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Sur décision du colonel Assimi Goïta, la journée du 14 janvier sera « chômée et payée » au Mali. © Twitter Assimi Goita

 

Son principe avait été évoqué dès la fin 2022. Il vient de se concrétiser et vise même à être inscrit dans le marbre de la République : le 6 janvier, le conseil des ministres a adopté un projet de décret instituant le 14 janvier de chaque année comme « journée nationale de la souveraineté retrouvée ». Selon le compte-rendu de ce conseil, cette date sera célébrée « en souvenir de la grande mobilisation contre les sanctions illégales, illégitimes et inhumaines de la Cedeao et de l’Uemoa. »

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Le 9 janvier 2022, face au non-respect des engagements électoraux pris par les autorités de transition maliennes, la Cedeao et l’Umeoa avaient imposé de lourdes sanctions économiques, financières et diplomatiques au Mali – avant d’être finalement levées le 3 juillet. Dès le lendemain, le gouvernement malien avait annoncé le principe de mesures de réciprocité puis organisé, le 14 janvier, des manifestations massives à travers tout le pays pour dénoncer ces sanctions et soutenir la transition.

Pas de grand rassemblement ?

C’est pour commémorer cette date « historique » de mobilisation populaire que le colonel Assimi Goïta veut célébrer chaque 14 janvier. D’après le compte-rendu du conseil des ministres du 6 janvier, cela « vise à renforcer le sentiment patriotique » et « à magnifier la souveraineté » nationale. Le texte rappelle les nouveaux principes cardinaux régulièrement mis en avant par la junte au pouvoir à Bamako : « le respect de la souveraineté du Mali », « le respect des choix stratégiques et de partenariats opérés par le Mali », et « la défense des intérêts vitaux des populations maliennes dans toutes les décisions prises ».

MANIFESTER SON ATTACHEMENT AU MALI À SA FAÇON

Samedi prochain, les Maliens seront donc invités à manifester leur fibre patriotique dans tout le pays. Sur décision du colonel Assimi Goïta, le président de la transition, cette journée sera « chômée et payée ». Assistera-t-on à un remake des images de milliers de personnes défilant dans les rues de Bamako, Kayes ou encore Gao, comme le 14 janvier 2022 ? Très probablement pas. Mettant en avant des problèmes d’insécurité et de potentielles attaques jihadistes, les autorités de transition n’ont pas prévu d’organiser de grandes manifestations.

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Aucun grand rassemblement populaire n’est prévu place de l’Indépendance, à Bamako, haut lieu du soutien à la transition depuis l’arrivée au pouvoir des colonels, en août 2020. « L’idée est d’instaurer une journée citoyenne, pendant laquelle chacun manifeste son attachement au Mali à sa façon, par exemple en brandissant notre drapeau. Il y aura sûrement des regroupements, mais plus dispersés et à moins grande échelle que l’année dernière », explique une source proche du pouvoir.

Selon le gouvernement, la célébration de cette journée sera notamment marquée par « la montée des couleurs avec chant de l’hymne national dans les établissements scolaires », « l’animation des leçons en milieu scolaire sur le thème du patriotisme, de la souveraineté, de la résistance nationale et de la refondation », ou encore « l’organisation des conférence-débats en milieu universitaire et dans les capitales régionales ».

Critiques contre la transition

Certains adversaires d’Assimi Goïta voient, eux, dans cette journée, une action de « propagande » pour tenter de remobiliser les foules. Longtemps tues par craintes de représailles, les critiques contre les autorités de transition sont de plus en plus audibles. Ex-soutiens de la junte, tels Ben le Cerveauleaders religieux (très) influents, comme Chérif Ousmane Madani Haïdara ou Mahmoud Dicko, syndicats et mouvements de la société civile… Les voix discordantes se font entendre. « Les sanctions ont été levées par la Cedeao, l’armée française est partie, les soldats ivoiriens ont été libérés… Il leur fallait quelque chose de nouveau pour montrer qu’ils ont un pseudo soutien populaire et essayer de masquer leur échec », ironise un ancien ministre et opposant à Goïta.

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Des critiques qui n’affectent guère les partisans du pouvoir, convaincus qu’ils sont sur la bonne voie. « Ce n’est nullement l’heure de la propagande mais bien celle de la vérité. Nous ne sommes soumis à aucun diktat. Le peuple malien est souverain et soutient cette transition, que cela plaise ou non », conclut l’un d’entre eux.