DIOCESE DE LAGHOUAT - GHARDAIA .
BILLET MENSUEL Mars 2015


(cliché PdB)

Bien chers amis.

C’est de Rome que je vous écris et j’espère vous envoyer ce billet d’ici avant de revenir à Ghardaia. Sans prétention, ce ne sera pas une « Lettre aux Romains », mais un « Billet aux Sahariens ». Comme vous allez recevoir le communiqué final de la CERNA qui relate nos différentes visites, je ne vais pas entrer dans les détails. Vous avez eu aussi le discours du St Père qu’en fait il ne nous a pas lu, mais donné pour le lire plus tard, - le P. Vincent Landel, Président de la CERNA avait lui aussi préparé un mot d’introduction, et il en a été de même...- Il a donc mis de côté les beaux discours pour passer avec nous une heure et demie d’échange, à l’écoute de nos préoccupations.

Il s’est montré très attentif, se contentant de poser des questions, de faire quelques réflexions suite à nos interventions. Parmi les sujets abordés, son souci central était bien les personnes en migration. Il connaît les situations de ces hommes et de ces femmes qui, après avoir bravé la traversée du désert, essaient au prix de risques graves de passer la mer. Ils sont des milliers à entreprendre cette aventure. Et sans conteste, l’Italie est le pays européen qui est le plus accueillant et fait le plus pour ces personnes en détresse. Le Pape François est bien informé sur cette situation, et il pose des actes concrets pour sensibiliser les pays européens et les pays d’origine.

Nous l’avons senti aussi préoccupé par la situation en Libye. Le Père Martinelli, évêque de Tripoli, n’a pu venir pour des raisons de santé, et pour ne pas courir le risque de ne pas pouvoir revenir ! Il était représenté par son Vicaire Général. Par contre, le P. Sylvester Magro, évêque de Benghazi, a pu être présent malgré une situation à la limite du possible. Il a dû fuir son appartement et son église avec le strict nécessaire pour se réfugier avec deux de se prêtres dans un hôpital d’enfants. Presque toutes les communautés religieuses ont dû partir. La foi de ces hommes est impressionnante « Je resterai tant qu’il y aura ne serait-ce qu’un seul chrétien », écrivait le P. Martinelli. Pourtant une espérance vivace demeure chez ces Pasteurs, celle de voir enfin le peuple libyen libéré de l’oppression qu’il subit de toutes parts.

Nous avons enfin présenté la situation de nos Eglises. Nous vivons quelque chose d’assez particulier et le Pape a été attentif à cette « différence » qui est la nôtre. Son souci de la relation avec les Musulmans se lisait à travers ses questions et ses réflexions.

Bref ce fut un moment unique de vraie fraternité. Nous sentions un homme attentif, écoutant et sage dans ses propos. Il nous a semblé un peu fatigué, mais comment en serait-il autrement chez un homme qui porte à la fois le poids de l’âge et le souci d’une Eglise et d’un monde tellement bouleversé ?

Nous avons ensuite défilé dans les différents « Dicastères » du Vatican, ce qui représentait un certain nombre de déplacements dans Rome. Il est un fait que ce fut parfois l’étonnement pour eux de se trouver devant des évêques et des vicaires généraux plus préoccupés de la vitalité de leurs communautés que de leur nombre et des statistiques !

Nous avons senti qu’un souffle nouveau traversait l’Eglise, jusque dans les différents services qui nous ont reçus, et qui sont en pleine restructuration. Cela ne va pas tout seul, et les oppositions ne manquent pas. Le Pape veut visiblement rénover cette « grosse machine » de la Curie romaine et la rendre plus apte à servir l’Eglise Universelle. Sa façon de gouverner ne se fait plus à partir d’elle mais du fameux « groupe des 9 » Cardinaux venus des différents continents. Nous sommes là dans un mouvement irréversible.

Ce fut un moment assez unique dans ma vie, une étape encourageante, …une belle façon d’envisager de passer le relais (cela viendra en son temps !). Dans son message final le Pape nous confiait : « Vous êtes aux périphéries avec le service particulier de manifester la présence du Christ en son Eglise dans cette région. Votre témoignage de vie dans la simplicité et la pauvreté est un signe éminent pour toute l’Eglise. Soyez sûrs que le Successeur de Pierre vous accompagne sur votre rude chemin et qu’il vous encourage à être toujours des hommes de l’espérance. »

+ Claude, votre frère évêque.