DIOCESE DE LAGHOUAT - GHARDAIA .
BILLET MENSUEL Mai 2015
Bien chers amis.
Comment faire revivre sous vos yeux notre Assemblée Diocésaine si vous n’avez pu y participer ? L’an dernier, nous l’avions ajournée en raison des troubles qui planaient sur Ghardaïa. Cette année, nous avons tenu le pari, et nous nous sommes retrouvés pour quatre jours bien remplis. Marie, très engagée dans sa préparation, va vous en donner le déroulement.
Je voudrais vous livrer quelques impressions plus personnelles, que je garde de cette rencontre que nous aimons voir se renouveler chaque année. L’enjeu en est important. Nous avions choisi comme thème de fond
« Tous appelés pour faire Eglise ». En effet tout au long de l’année, nous sommes géographiquement éloignés les uns des autres dans ce vaste et beau Sahara. Il n’est pas toujours facile de se percevoir comme membre d’une Eglise « locale » ! Et pourtant, j’ai été vraiment impressionné de voir l’intérêt éprouvé par tous et toutes de se rencontrer d’abord, et tout simplement. Rien que pour cela, ça en vaut la peine! Depuis deux années, de nouveaux visages sont venus se glisser dans le petit paysage de la communauté diocésaine. Faire ou refaire connaissance, mettre des visages sur les noms, des noms sur les visages, passer du temps pour se connaître, noter des adresses pour communiquer, voire même pour se visiter… Notre désir de rencontrer les hommes et les femmes de ce pays ne doit pas nous faire oublier de nous rencontrer et de mieux nous connaître. Ce fut je le crois le premier fruit de cette Assemblée. Nous ne sommes pas seuls dans notre isolement (et même parfois nos solitudes), mais reliés les uns aux autres par ce même souci d’être à notre façon Jésus présent à ce monde musulman. Nous y sommes immergés mais jamais noyés ! Cette communion entre nous est importante, elle est capitale. Car l’harmonie de nos différences ethniques, nationales, culturelles, générationnelles, est une belle école pour aller vers nos frères et sœurs de l’Islam avec lesquels nous créons des liens de solidarité, de partenariat et de fraternité. Le premier laboratoire de la différence, c’est bien notre communauté, qu’elle soit locale ou diocésaine. Sur près de cent « permanents » nous atteignons 20 nationalités, venus de tous les points de l’horizon. Et lorsque je parle de « permanents »…je compte bien sûr ces laïcs fidèles qui sont là depuis longtemps, n’est-ce pas Lidie, toi qui nous as dit bien fort que tu avais vu passer… quatre curés depuis ton arrivée dans le Diocèse !
La seconde impression forte que j’ai ressentie, c’est de voir combien nous aimons ce monde, ce monde concret dans lequel nous vivons.
Cela était perceptible à travers les différentes interventions. Certes, elles n’étaient pas d’un optimisme béat ! Elles laissaient bien filtrer la profonde crise qui traverse le monde musulman, avec ses souffrances, ses déformations, ses instrumentalisations. Elles n’ont pas caché non plus la responsabilité de l’Occident dans le déclenchement de cette crise. Elles ont tenu compte également du désarroi des chrétiens persécutés (et ils ne sont pas les seuls…), de la tentation de l’islamophobie. Mais à chaque intervention transparaissait aussi une Espérance déjà présente :
Des musulmans refusent un Islam trop souvent perçu ou utilisé comme porteur de violence et contestent ceux qui l’instrumentalisent et le détournent de son sens. Des musulmans, à visage découvert, s'engagent aux côtés d’hommes et de femmes de toute condition, assoiffés de justice et de paix. Des musulmans savants prônent une interprétation de leurs Ecritures, autre que littéraliste et détournée de son vrai sens.
Cet amour du monde dans lequel nous vivons était tout autant perceptible à travers les témoignages reçus, parfois émouvants :
Un enfant autiste relève la tête et met sa maman en mouvement pour le prendre en charge. Une association de migrants se met en marche pour aider d’autres migrants. Des prisonniers décident de rompre le mur de la haine et du racisme pour faire corps devant un avenir sombre. Des jeunes que tout semble désunir viennent s’asseoir dans la même salle pour mieux assurer leur avenir au lieu de se jeter des pierres… et que sais-je encore ! Quand on aime… tout devient possible.
Et enfin, ma joie a été de voir que contre vents et marées, notre petite et fragile caravane continue son chemin, rajeunie, renouvelée, et toujours au service de plus grand qu’elle.
Car le Royaume de Dieu est au milieu de nous. Ne le voyez-vous pas ?