Richard Archambault, M. Afr., préparant la fête de l'Aïd el kebir, la Tabaski. On le voit au milieu des représentantes de l'Association des mères chrétiennes qui offrent un mouton à l'Association des femmes musulmanes.

'Small small'
le dialogue islamo-chrétien au Ghana

Dans chaque langue ghanéenne on trouve l'expression small small (petit petit), que ce soit ka kra, ka kra en twi, fii fii en gurune ou biel biel en kusaal. Je dirais donc que dans notre région, au nord-est du Ghana, le dialogue islamo-chrétien est également small small. Je veux dire que chaque année nous faisons de petits pas en direction d'une meilleure connaissance mutuelle entre chrétiens et musulmans. Je veux donner ici quelques exemples.

Lors de la dernière fête de l'Aïd al fitr, à la fin du ramadan, j'ai invité l'évêque de notre diocèse, Mgr Lucas Abadamloora à lire la lettre aux musulmans de Mgr Michael Fitzgerald, alors président du Conseil pour le dialogue interreligieux à Rome. Comme le vice-président du Ghana venait de parler à cette fête, je ne pus prendre moi-même la parole, mais l'imam principal me demanda de présenter la lettre de Rome dans la grande mosquée à la prière du vendredi suivant. J'ai pu traduire le message dans la langue locale, le gurune et un interprète fit de même en haoussa. L'assemblée répondit par quelques Allah w'akbar! (Dieu, le plus grand !) qui fusaient spontanément de temps en temps pendant notre lecture. Oui, nous nous sentions tout petits !

La semaine suivante, les différents groupes religieux de Bolgatanga organisèrent une marche de la paix en préparation aux élections qui devaient se tenir le 7 décembre. Nous nous sommes retrouvés sur la rue ensemble, musulmans, chrétiens, croyants des religions traditionnelles, marchant au rythme des tambourinaires à travers la ville. Des souhaits de paix étaient offerts aux habitants de Bolgatanga : 'Asalaam Aleikum', 'Peace be with you', 'Yen de naba (God is Chief)', entre autres. La marche dura trois heures et se regroupa ensuite dans un parc où quelques brefs discours furent prononcés par des chrétiens, des musulmans et des représentants des religions traditionnelles. Ensemble ils levèrent le drapeau national.


Né en 1948, Peter Kodjo Appiah Cardinal Turkson, est depuis 1992 archevêque de Cape Coast, Ghana. On le voit ici à Rome, le 21 octobre 2003, jour où Jean-Paul II lui remit la barrette rouge.

Un autre événement, fut la visite du nouveau cardinal du Ghana, Mgr Peter Kodjo Appiah Turkson. Pendant une semaine il fut l'hôte du diocèse de Navrongo-Bolgatanga. Au cours de ses visites de courtoisie aux chefs traditionnels, aux autorités locales et régionales, à différentes paroisses, le cardinal Turkson ne manqua pas d'aller saluer l'imam principal de Bolgatanga. L'imam manifesta sa joie d'avoir un cardinal chez lui. Le cardinal aussi se dit enchanté et rappela le souvenir de ses amis d'enfance musulmans quand il vivait dans la région des mines d'or.

L'imam, El Hadji Youssuf Adam offrit alors au cardinal Turkson deux gros coussins en cuir, un produit local qui fait la gloire de Bolgatanga. L'imam avait demandé qu'on y inscrive le nom du cardinal. « Ainsi, à chaque sieste 'small-small' que prendra son Éminence, elle pourra se rappeler sa visite chez les musulmans du diocèse de Navrongo-Bolgatanga. » La communauté musulmane, quant à elle, garde le souvenir du prophète de paix qui l'a visitée.

Richard Archambault,
Diocèse de Navrongo-Bolgatanga
Ghana