Le Père Jean Bipendo
Le dialogue interreligieux, une nécessité
pour la cohabitation pacifique des croyants

Nous vivons aujourd’hui dans le contexte de la mondialisation et du pluralisme religieux, où adeptes de différentes confessions religieuses se côtoient. Dans ce contexte, la cohabitation pacifique est un besoin fondamental et un devoir pour chacun. Or, nous constatons de plus en plus que, dans nos sociétés actuelles, beaucoup de nos contemporains manquent de points de repère. En outre, l’intolérance, la violence, les conflits et les guerres sont omniprésents, parfois même au nom de la religion. On assiste parfois à l’instrumentalisation de la religion ; on utilise la religion à des fins économiques. Quel est alors le rôle des religions ? Les religions sont-elles des facteurs de paix ou de division ?

Les religions, baromètres de nos sociétés
L’être humain étant sacré, il me semble que, dans notre contexte actuel, les religions doivent être le baromètre de nos sociétés. Tel est d’ailleurs le souhait du Pape Benoît XVI. Les religions doivent aider à guérir le monde, l’Afrique en particulier, des virus du matérialisme et de l’intégrisme qui guettent les populations. Soulignant le rôle de l’Église dans ce contexte, Benoît XVI déclare que l’Église catholique en Afrique doit “être toujours un des poumons spirituels de l’humanité, et devenir chaque jour davantage une bénédiction pour le noble continent africain et pour le monde entier !” (Africae Munus n° 177).

Bien connaître son identité religieuse
Les religions doivent être des lieux où les gens viennent se guérir et se prémunir de ces virus. Cela suppose que les religions soient ouvertes les unes aux autres et que leurs adeptes respectifs soient soucieux de bien connaître leur propre identité. Ne peut concrètement s’engager dans le dialogue interreligieux que celui qui est réellement convaincu de ce qu’il croit. Car l’ignorance est la mère de la méfiance et du mépris. Et c’est dans la mesure où les adeptes de différentes confessions connaîtront bien leur identité religieuse qu’ils pourront s’ouvrir les uns aux autres et participer à la mission de pacifier et d’humaniser le monde.

Le dialogue interreligieux s’appuyant sur les valeurs sociales, morales et culturelles des populations, est ainsi un élément important pour la cohabitation pacifique des croyants. Dans cette perspective, l’exhortation de la Déclaration conciliaire sur les relations de l'Église avec les Religions Non-Chrétiennes reste d’actualité : “L’Église exhorte donc ses fils, pour qu’à travers le dialogue et la collaboration avec les adeptes d’autres religions, menés avec prudence et charité, et en témoins de la foi et de la vie chrétiennes, ils reconnaissent, préservent et fassent progresser les valeurs spirituelles, morales et socioculturelles découvertes chez ces personnes.” (Nostra Ætate 2).

La religion est une dimension constitutive de la personne humaine et donc de la société comme telle. La religion doit aider à pacifier le cœur de l’homme : “Les hommes attendent des diverses religions la réponse aux énigmes cachées de la condition humaine qui, hier comme aujourd’hui, troublent profondément le cœur humain : Qu’est-ce que l’homme ? Quel est le sens et le but de la vie ? Qu’est-ce que le bien et qu’est-ce que le péché ? Quels sont l’origine et le but de la souffrance ? Quelle est la voie pour parvenir au vrai bonheur ? Qu’est-ce que la mort, le jugement et la rétribution après la mort ?” (Nostra Ætate 1).

Les réponses à ces questions, pour être crédibles aujourd’hui, ne peuvent plus être données en ordre dispersé ou avec des formules toutes faites. Il est nécessaire que les grandes religions se concertent, cherchent à se connaître, à rapprocher leurs points de vue, à découvrir tout ce qu’elles ont en commun, pour empêcher que les hommes se réfugient dans le fondamentalisme et le sectarisme. Les religions doivent ainsi apporter un plus aux valeurs culturelles et sociales des populations, transformer la vie des croyants et les aider à s’accueillir mutuellement et à mieux vivre.

Sensibiliser les jeunes
Cela dit, il me semble qu’il est important aujourd’hui de mettre un accent particulier sur la sensibilisation et l’éducation religieuses des jeunes. La mise en valeur de ces deux activités les aidera à prendre conscience de la nécessité de la tolérance et de la cohabitation pacifique, pour prévenir toute forme de criminalité et éviter toute sorte de violence présente aujourd’hui dans toute tranche d’âge. Benoît XVI affirme cela en ces termes : “Si nous tous, croyants en Dieu, désirons servir la réconciliation, la justice et la paix, nous devons œuvrer ensemble pour bannir toutes les formes de discrimination, d’intolérance et de fondamentalisme confessionnel… L’Église témoigne ainsi de l’amour de Dieu, créateur de tous et encourage les adeptes d’autres religions à une attitude respectueuse et à une réciprocité dans l’estime.” (Africae Munus n° 94). Les jeunes étant l’avenir du monde, doivent être éduqués à l’accueil de l’autre dans la différence de sa foi afin de sauvegarder la paix sociale.

Le dialogue interreligieux est donc une nécessité pour la cohabitation pacifique des croyants. Il doit être encouragé et soutenu. Que les religions soient des lieux où les gens viennent s’enrichir les uns aux autres en vue de participer à la mission de pacifier et d’humaniser le monde.

Jean Bipendo, M.Afr
Centre Foi et Rencontre, Bamako


Tiré du Petit Echo N° 1033 2012/7

 

Le Père Jean Bipendo est maintenant nommé à Abidjan, dans notre centre de formation de troisième étape (Théologie)