Séparatisme : la Conférence des Églises européennes exprime son « inquiétude »
Les faits
La Conférence des Églises européennes (CEC), organisation œcuménique rassemblant 114 Églises d’Europe, a exprimé dans un courrier au gouvernement français, sa « vive inquiétude » quant au projet de loi séparatisme, porteur selon elle d’une « culture de la suspicion » vis-à-vis des religions.
Lecture en 2 min.
L’« inquiétude », répétée trois fois au cours du texte, est sans nul doute le cœur du message que la Conférence des Églises européennes a voulu adresser au gouvernement français par une lettre datée du jeudi 4 février. En cause, le projet de loi visant à « conforter le respect des principes de la République », en discussion depuis le 1er février à l’Assemblée nationale, et qui devrait faire l’objet d’un vote solennel mardi 16 février.
Sans se limiter à la France, cette organisation œcuménique rassemblant 114 Églises de toute l’Europe a vocation à s’élever face à toutes les réformes de pays membres de l’Union européenne qui « risquent de porter atteinte aux droits fondamentaux constituant le socle de l’état de droit et de l’UE ». Or c’est, selon elle, le cas de ce projet de loi, qui vise à lutter contre le séparatisme islamique mais suscite depuis plusieurs semaines des réserves chez des croyants de toutes les religions.
Contraintes administratives
Réserves justifiées, à en croire la CEC, qui déplore une « culture de la suspicion » vis-à-vis des communautés religieuses, dont « l’immense majorité » reconnaît pourtant les valeurs démocratiques tout en apportant à la société une « culture de l’accueil, de la solidarité et du lien » et en contribuant à sa « quête de sens ».
→ TRIBUNE. Séparatisme, un projet de loi qui nourrit une image négative des religions
Dans le détail, la CEC déplore des contraintes administratives et financières « de nature à rendre plus complexe l’expression religieuse et donc d’en réduire la liberté ». Est notamment évoquée l’obligation pour des associations cultuelles (loi 1905) d’obtenir, à leur constitution puis tous les cinq ans, la reconnaissance par le préfet de leur caractère cultuel (art. 27). « Pourquoi, en France, un culte établi depuis le IIe siècle, devrait-il soudainement se soumettre à une démarche administrative récurrente pour obtenir droit de cité ? », relève la CEC.
→ ANALYSE. Loi séparatisme : un « alourdissement administratif » pour les cultes
La lettre mentionne également le « contrat d’engagement républicain » que devront désormais signer les associations touchant des subventions de l’État, et dont certaines sont liées à des cultes, comme le Secours catholique ou la Fédération de l’entraide protestante. Ce contrat « n’est-il pas de nature à limiter la capacité des associations à questionner, voire contester, dans le cadre d’un plaidoyer les politiques publiques ? », interroge le courrier.
Pour une « réelle concertation avec les cultes »
Précisant qu’elle ne manquera pas d’exprimer sa « vive préoccupation » lors de ses prochaines rencontres avec la présidence du Parlement européen et de la Commission européenne, la CEC ouvre et clôt sa lettre par la même invitation : que le gouvernement français « renoue avec une réelle concertation avec les cultes ».
Fondée en 1959 pour maintenir les relations entre les Églises séparées par le rideau de fer, la CEC rassemble toujours, en lien avec les institutions politiques, des Églises de tradition orthodoxes, protestantes et anglicanes, ainsi que des organisations œcuméniques de toute l’Europe.