« Un chemin d’amitié est possible » : des jeunes musulmans et chrétiens rassemblés à Taizé
Du 13 au 17 juillet, la communauté de Taizé (Saône-et-Loire) accueille la cinquième rencontre d’amitié entre jeunes musulmans et chrétiens. Une centaine de participants viennent de France, mais aussi du Nigeria ou de Palestine. Frère Luc, de Taizé, revient pour La Croix sur le sens de cette rencontre.
La Croix : La rencontre d’amitié entre jeunes musulmans et chrétiens est organisée à Taizé depuis 2017. Cette 5e édition est guidée par le thème « Se découvrir dans l’amitié entre jeunes musulmans et jeunes chrétiens ». Comment Taizé réunit-elle ces jeunes ?
Frère Luc : L’an dernier, les participants musulmans étaient contents de préparer des ateliers de réflexion et d’être mis ainsi en valeur, mais ont surtout dit avoir été touchés par l’accueil simple que leur ont fait les chrétiens et heureux d’être mélangés avec des jeunes de partout. Ils ont demandé par exemple à participer au service, à la vaisselle, au nettoyage ou au jardinage, car ce sont des moments et des lieux où l’on est tous mélangés, où l’on vit cette traversée des frontières.
Nous avons voulu leur donner de telles occasions de faire connaissance et de partager leurs expériences. Les matinées, des temps de réflexion avec l’apport d’un imam et d’un frère, suivront les traces d’Abraham. Son appel, son hospitalité et la manière dont il a négocié une terre pour enterrer Sarah trouvent un écho pour les chrétiens comme pour les musulmans. Abraham, le père des croyants, est aussi « l’ami de Dieu » qui peut inspirer l’amitié entre nous.
Que vous ont appris les rencontres précédentes ?
Fr. L. : Qu’il est plus simple que ce que l’on pourrait imaginer de se rassembler entre chrétiens et musulmans. Les responsables de mosquée et les responsables catholiques sont confrontés aux mêmes questions et défis : accueillir les jeunes, les accompagner, les former et leur transmettre la foi dans une société post-croyante, où une grande portion n’a pas de référence à la foi. Quant aux jeunes, ils se retrouvent aussi dans le service. Ils sont de part et d’autre très engagés socialement, dans les maraudes ou dans l’accueil des réfugiés, par exemple.
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Comment les jeunes chrétiens et musulmans peuvent-ils dialoguer, quand chacun est convaincu de détenir la vérité de la foi ?
Fr. L. : Ceux qui viennent sont dans une démarche d’accueil et d’hospitalité mutuels. Un esprit d’écoute et de délicatesse est au cœur de leur foi respective. Ils ne viennent pas à Taizé pour un dialogue théologique théorique mais pour un partage de vie, pour s’inviter mutuellement à leurs prières. On met ainsi une salle à disposition des musulmans, et ceux qui le veulent peuvent les rejoindre. C’est cela qui est touchant : ils ouvrent leurs prières aux autres et sont très fiers si l’on vient avec eux.
Que leur apportent ces rencontres ?
Fr. L. : Les jeunes musulmans sont très intéressés de voir de jeunes chrétiens qui se retrouvent trois fois par jour dans une église pour prier. Ils n’ont pas l’impression qu’il y ait beaucoup de jeunes en Europe qui donnent du temps pour la prière. Cela les réjouit de voir ces jeunes qui, comme eux, donnent du temps pour Dieu, à travers le silence, l’écoute d’une parole et le chant.
L’an dernier, les jeunes chrétiens aussi étaient reconnaissants de pouvoir expérimenter et témoigner qu’une fraternité concrète n’est pas une utopie. On est ensemble, on partage le repas, on partage un service, on s’écoute les uns les autres. Cela atteste qu’un chemin de paix et d’amitié est possible. Voir que des musulmans ont leur place dans un lieu comme Taizé chasse toutes les voix qui jouent sur les peurs et les caricatures, ces voix qui voudraient construire des murs.