La prière improvisée de l’imam dans les jardins du vatican suscite des réactions
Un épisode survenu lors de la prière pour la paix organisée par le pape François dans les jardins du Vatican, le 8 juin, en présence des présidents israélien Shimon Pérès et palestinien Mahmoud Abbas, a suscité l’émoi de certains chrétiens. Au cours de la séquence confiée à la délégation musulmane, qui faisait suite à la prière des deux autres traditions religieuses, juive et chrétienne, un imam a ajouté au texte officiel en arabe les trois derniers versets de la deuxième sourate du Coran, dite de la « Vache » : « Pardonne-nous (Allah), pardonne-nous et prends pitié de nous ! Tu es notre maître et notre protecteur. Soutiens-nous contre le peuple des kafir ! »
Un terme, qui peut se traduire par « infidèles » et qui est utilisé par les courants radicaux de l’islam pour justifier des attaques contre les non-musulmans. Ainsi, ce texte a été perçu par certains comme hostile aux deux autres religions. Ils en ont conclu à la « tricherie » et à l’« abus de confiance », et un discours souvent entendu selon lequel les chrétiens sont trop naïfs à l’égard des musulmans a resurgi sur plusieurs blogs. « Le monde musulman a jubilé à cause de la récitation du Coran “au Vatican”…
Cette interprétation n’est pourtant pas la plus répandue. Dans une interview donnée à la section allemande de Radio Vatican, le P. Felix Körner, jésuite, professeur de dogmatique et de théologie des religions à l’Université pontificale grégorienne, spécialiste de l’islam rappelle que « incroyant désigne, dans ce cas, les gens qui ne reconnaissent pas le Dieu unique. Donc quand ce verset coranique parle des incroyants contre lesquels on demande l’aide divine, ce ne sont donc clairement pas les juifs ni les chrétiens qui sont visés, puisqu’ils reconnaissent l’unité de Dieu ! »
Interrogé par La Croix, l’anthropologue des religions et philosophe algérien Malek Chebel confirme : « Personnellement, je traduis kafir par “incroyant”. C’est absolument conforme au Coran et cela ne vise personne en particulier. À la rigueur, si l’on veut se livrer à une interprétation contextualisée, cela vise les païens de l’Arabie ancienne, donc ni les juifs ni les chrétiens. Je ne vois donc aucune raison de soulever cette polémique insignifiante. (Source : la Croix/23.06.14/ Céline Hoyeau et Samuel Lieven)