Convention baptiste du Sud : Rick Warren plaide en faveur des femmes pasteures
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Rick Warren, l’un des pasteurs évangéliques les plus célèbres des États-Unis, connu aussi dans les milieux catholiques charismatiques en France, s’est fait depuis quelques années l’avocat des femmes dans le monde baptiste américain. Alors que les pasteurs des Églises évangéliques sont encore en grande majorité des hommes, il a lancé un site Internet avec des vidéos destinées à encourager la promotion des femmes dans la gouvernance et à récuser les arguments selon lesquels le ministère de pasteur serait réservé aux hommes.
Le sujet le concerne au premier plan. Saddleback, la megachurch californienne qu’il a créée en 1980 et qui demeure l’une des plus importantes du pays avec 57 000 fidèles, a été exclue, en raison précisément de la présence de femmes pasteures dans ses rangs, de la puissante et conservatrice Convention baptiste du Sud (SBC), la première union d’Églises américaine. Mardi 13 juin, Rick Warren a plaidé pour la réintégration de son Église et pour une plus grande inclusion des femmes devant les 12 000 représentants de la SBC réunis en Assemblée annuelle à La Nouvelle-Orléans (Louisiane).
Seul derrière son pied de micro, face à une audience loin d’être acquise à sa cause, Rick Warren, 69 ans, s’est montré offensif. « Depuis 178 ans, la SBC est un mélange de plusieurs clans, a-t-il déclaré. Si vous pensez que les baptistes pensent tous comme vous, vous vous trompez. » Sans appeler à un changement de cap théologique, l’auteur du best-seller Une vie motivée par l’essentiel a plaidé en faveur de l’unité : « Puisque les baptistes du Sud ont historiquement acté leurs désaccords sur des points doctrinaux essentiels (…), pourquoi cette question (du ministère féminin, NDLR) devrait-elle dissoudre notre communauté ? »
« Nous devons exclure les églises coupables de péchés sexuels, raciaux, financiers et de gouvernance parce que cela porte atteinte à notre témoignage, a-t-il poursuivi. Mais les 1 928 églises avec des équipes pastorales composées de femmes n’ont pas péché. » Alors qu’il rappelait que le télévangéliste Billy Graham, l’une des figures du baptisme moderne, avait lui même soutenu sa fille dans le pastorat, son micro a été coupé, son temps de parole étant écoulé. Seuls quelques discrets applaudissements se sont fait entendre dans le public.
Lettre ouverte
Depuis plusieurs jours, le pasteur n’hésitait pas à diffuser sur les réseaux sociaux des extraits de son discours et à affirmer une position contraire à celle de la majorité de la SBC. Alors que la constitution en vigueur de la Convention baptiste affirme que le ministère de pasteur est réservé aux « hommes », il a relevé non sans ironie sur Twitter que son Église et la SBC ne sont en désaccord « que sur un seul mot : hommes ». « Nous sommes d’accord à 99,99 %. N’est-ce pas assez ? » pour rester membre de cette institution, a-t-il insisté.
Souvent décrit comme membre de l’aile « progressiste » de la SBC, Rick Warren ne milite que depuis peu pour une meilleure inclusion des femmes dans les Églises de sa dénomination. Cette évolution de sa pensée, il l’explique en vidéo sur son site Internet, sur lequel il fournit aux fidèles un argumentaire biblique détaillé en faveur du pastorat féminin. Il indique avoir changé d’avis après plusieurs d’années d’étude des textes. Rejetant tant l’égalitarisme que la complémentarité homme-femme selon laquelle les deux ne sont pas destinés aux mêmes tâches, il affirme que ces positions ont des « faiblesses » et « ignorent des versets ».
Dimanche, Rick Warren a également publié une lettre ouverte intitulée « Mes excuses aux femmes chrétiennes », dans laquelle il présente comme son « plus grand regret en 53 années de ministère » son absence « d’exégèse personnelle » sur le sujet. « Honte à moi (…). Je les ai empêchées d’utiliser les dons spirituels et les compétences de leadership que le Saint-Esprit a souverainement placés en elles, conclut-il, pressentant que son argumentaire lors de l’Assemblée de la SBC ne suffira pas à convaincre la majorité des représentants. J’aimerais pouvoir tout recommencer. Femmes chrétiennes, voulez-vous me pardonner ? » Lui-même a quitté son poste à la tête de Saddleback, un mois après avoir ordonné pasteures trois femmes en 2021.
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Les baptistes du Sud en assemblée plénière
- L’assemblée annuelle de la Convention baptiste du Sud (SBC) s’est tenue à La Nouvelle-Orléans du mardi 13 au mercredi 14 juin. La question de la réintégration de la méga-église Saddleback, fondée par le célèbre pasteur Rick Warren doit y être tranchée.
- Le président sortant de la dénomination, le pasteur texan Bart Barber, a été réélu mardi. Considéré comme le chef de file du courant conservateur dominant, il a été reconduit avec une large majorité des voix.
- Une modification de la constitution interdisant formellement aux femmes de servir dans un rôle pastoral d’enseignement devait être soumise au vote mercredi. Si elle est approuvée, aucune femme au sein de la SBC ne pourra porter le titre de pasteur, sous peine d’exclusion de son Église.