Du 25 au 28 Novembre 2014 à Ndjamena
A l’invitation de la « Plate-forme Interconfessionnelle du Tchad », La délégation malienne composée de Monseigneur Jean Zerbo, archevêque de Bamako, de l’Imam Mamadou Traoré de l’union des leaders chrétiens et musulmans, du Dr. Youssouf Dembélé secrétaire général de l’Alliances des Eglises évangéliques et du Père Adrien Mamadou Sawadogo, nouveau Directeur de l’IFIC, s’est rendue à Njamena le 24 Novembre 2014 pour prendre part à la : « Journée de prière pour la Paix, la Cohabitation pacifique et la concorde nationale », édition 2014.
Nature et Objectifs de la Plate-forme :
La Plate-forme Interconfessionnelle (PFI) est un regroupement des trois confessions religieuses (L’Eglise catholique au Tchad, le Conseil supérieur des affaires islamiques au Tchad et l’Entente des Eglises et missions évangéliques au Tchad). Elle est née du constat que les religions dans leurs histoires, ont été souvent manipulées par des groupes intégristes pour justifier la guerre, la division et la haine entre les hommes. C’est pourquoi, après avoir mené ensemble avec succès plusieurs activités dans le cadre de la promotion des valeurs susceptibles de promouvoir la Paix et la concorde nationale, la Plate-forme Interconfessionnelle estime que la conviction partagée par les trois confessions religieuses selon laquelle leurs activités culturelles et religieuses ne devraient pas être manipulées pour semer la violence et la division entre les peuples, mais plutôt un acquis à consolider pour la résolution des conflits au niveau national, sous régional et régional.
La Plate-forme entend participer à la formation des leaders religieux et d’opinion pour pacifier les conflits à travers des fora, des ateliers de formation et débats éducatifs basés sur les valeurs religieuses. Elle s’est alors fixé des objectifs principaux et secondaires.
Le premier des objectifs principaux est la formation pratique et efficace aux leaders religieux, et d’opinion afin qu’ils soient artisans de la paix dans les conflits. Le deuxième est de favoriser la coexistence pacifique intra-foi, interconfessionnelle, le respect de différence religieuse, et la collaboration sur des problèmes communs. Et le troisième est de participer au renforcement et au soutien du rôle des femmes, des jeunes dans les efforts de consolidation de la paix.
Parmi les objectifs secondaires figure en premier lieu le dialogue inter-religieux à travers la facilitation d’échanges réguliers des valeurs inter-religieuses dans les médias et lieux de culte et en entreprenant des travaux de réflexion sur les projets innovateurs d’adaptation de services sociaux et publics à leurs modes de vie; en deuxième lieu la sécurité à travers le soutien des efforts de certains pays dans la lutte contre l’insécurité en assurant le partage d’information et de mise en œuvre des recommandations issues de fora et ateliers et aussi en renforçant la coopération régionale en matière d’échange d’informations sécuritaires et de lutte contre l’intégrisme et la violence basée sur la religion. En troisième lieu, la PFI œuvre au développement des pays du sahel en soutenant la collaboration entre les pays de la région, en aidant les pays de la région dans la mobilisation de fonds pour les études de faisabilité et la réalisation de certains projets communs comme l’insertion socio-économique des jeunes et des femmes et enfin en appuyant les efforts nationaux et régionaux pour la préservation et la gestion durable des écosystèmes sahéliens.
Les moyens d’action de la PFI sont les suivants :
Les rencontres d’expériences
Les ateliers de formation et conférences débat
Les sensibilisations au sein de la population
Les émissions radio et télévisées
Les tables rondes.
Genèse et Objectifs de la « Journée de prière pour la paix »
Depuis quelques années, les trois confessions religieuses au Tchad, à savoir l’Eglise Catholique au Tchad, le Conseil Supérieur des Affaires Islamiques (CSAI) au Tchad et l’Entente des Eglises et Missions Evangéliques au Tchad (EEMET), ont organisé ensemble une journée de prière en faveur de la paix au Tchad. Chaque confession religieuse mobilisait ses fidèles pour cette grande rencontre de prière. Cette initiative a plu aux hautes autorités de la République ; car c’est une activité qui a pour but de promouvoir l’unité et la paix. C’est dans cette optique que le Président de la République, chef de l’Etat, a décrété la journée nationale de prière pour la Paix, la Cohabitation pacifique et la Concorde nationale par le décret N°1341 du 17 Novembre 2011. Depuis lors, les confessions religieuses organisent chaque année cette journée pour appeler à la réconciliation, la paix et la justice.
L’objectif de cette journée est de s’adresser à Dieu le créateur en tant que Nation pour implorer la Paix au Tchad; elle vise aussi à sensibiliser les fidèles de ces trois confessions religieuses à l’urgence de la Paix au Tchad, à vulgariser les valeurs susceptibles à la promotion de la Paix, à savoir la tolérance, le dialogue et le respect mutuel prônés par les livres saints; enfin elle vise à faciliter le brassage des fidèles des trois confessions religieuses pour faire tomber certains préjugés. La délégation malienne et les délégations nigérienne, camerounaise et centrafricaine ont pris part aux activités suivantes :
Une conférence à l’intention des femmes sur le thème : « La contribution des femmes dans la consolidation de la Paix au Tchad » le 26 Novembre 2014 à l’Amphithéâtre de la faculté de Médecine.
Les femmes, par les voix des représentantes des trois confessions religieuses, ont à travers un sketch attiré l’attention des femmes sur « la puissance de la langue » dont elle dispose; un pouvoir par lequel elles peuvent provoquer la guerre ; En rappelant aux femmes leur nature paisible et douce, leur art à tisser des relations les unes avec les autres, les représentantes ont invité leurs sœurs à mettre ce pouvoir de la langue au service de la promotion de la paix qui est l’acceptation de l’autre dans sa diversité. Elles rappellent qu’à travers les mariages mixtes s’accomplit une alliance inter-religieuse, ethnique, raciale etc…et que la femme étant celle qui souffre le plus des effets de la guerre est donc la mieux habileté à promouvoir et défendre la paix. Elles ont conclu en appelant à l’éducation, la formation et la sensibilisation de la femme sur les droits humains afin qu’elle soit équipée pour identifier les causes de la guerre et ainsi défendre efficacement la paix.
La délégation a pris part aussi à la une conférence sous régionale sur le thème : « La problématique de l’extrémisme religieux en Afrique : la religion et la promotion de la Paix » le 27 Novembre 2014 au palais du 15 Janvier.
La conférence a débuté par les discours d’ouverture conclus par celui du premier ministre tchadien qui a attiré l’attention sur le danger que court la jeunesse en proie à un intégrisme violent et menaçant pour la paix dans le monde; aussi a-t-il appelé les leaders religieux à jouer leur rôle d’éducateurs auprès des jeunes pour un monde plus harmonieux; Il reconnait en la Plate-forme interconfessionnelle, un forum d’échanges sur la problématique de la paix et de la cohabitation pacifique.
Cette conférence a aussi été marquée par le message des enfants qui pourrait se résumer en une phrase : « prenons le bien pour détrôner le mal ».
Après les enfants, c’était au tour des jeunes de partager à travers un sketch le défi auquel ils font face, à savoir celui de se détacher d’une culture d’intolérance interconfessionnelle et de rejet mutuel dont leurs parents sont héritiers.
Les jeunes ont conclu leur message en affirmation leur engagement à ne pas pérenniser cette culture d’exclusion réciproque et de « vivre tous ensemble pour la cohabitation entre Musulmans et Chrétiens du Tchad».
Chaque délégation a été ensuite invitée à partager son expérience de la paix et de la cohabitation pacifique dans son pays.
Les quatre membres de la délégation malienne sont au milieu
La délégation malienne a saisi l’occasion, par la voix de Mgr. Jean Zerbo archevêque de Bamako, pour remercier le peuple tchadien pour les sacrifices consentis afin que le Mali retrouve l’intégrité territoriale et la liberté; il assuré toutes les tchadiens de la prière du peuple malien pour les âmes des défunts et le réconfort des familles éplorées, ainsi que le retour à leurs pays respectifs de tous les soldats engagés dans la restauration de la paix au Mali. Il a aussi exprimé l’espoir qu’il porte sur les pourparlers d’Alger à une issue favorable à une paix définitive au Mali. A la suite de l’archevêque, le Dr. Dembélé a partagé l’expérience malienne caractérisée par la création et le rôle intercesseur de « l’Alliance Sacrée » au Mali.
Le partage du pays hôte, a porté sur le parcours fait pour arriver à la création d’une Plate- forme et d’une telle célébration nationale pour la paix et la cohabitation entre les confessions du Tchad. Dans leur parcours, ils ont commencé par faire des ateliers en faveur de la paix et de la cohabitation pacifique entre Chrétiens et Musulmans, et ce après plus de deux décennies de guerre ; c’est en 2009 que le leader Musulman et l’ancien archevêque de Ndjamena ont fait une déclaration commune pour la paix et la cohabitation pacifique entre Musulmans et Chrétiens.
Les autorités gouvernementales, ayant été touchés par cet événement nouveau qui est de voir les trois confessions religieuses parler pour la première fois d’une seule voix, ont décrété par la voix du Président tchadien à l’occasion de la célébration du cinquantenaire de l’indépendance du pays, que le 28 Novembre de chaque année soit dédié à promotion commune de la paix et de la cohabitation pacifique au Tchad. Comme l’a si bien souligné l’Imam Hussein, président du haut conseil pour les affaires islamiques, « nous avons réalisé que la cohabitation pacifique est une obligation »; Il en a profité pour remarquer que les visites de courtoisie entre leaders de confessions religieuses différentes est à la fois expression et source d’Amour ainsi qu’instrument de communication, d’information et de connaissance mutuelle.
A l’issue de la conférence sous régionale, les recommandations suivantes ont été faites :
I. A l’attention du Gouvernement :
Mettre à la disposition de la Plate-forme des moyens nécessaires au fonctionnement de ses activités.
La construction d’un Centre qui sera animé et géré par la Plate-forme.
Impliquer davantage la Plate-forme dans les résolutions de conflits divers.
II. A l’attention des Religieux :
Etendre l’expérience de la Plate-forme à la sous-région.
Préparer des conférences pour poursuivre l’échange d’expériences.
III. A l’attention de la sous-région :
Instaurer une journée de prière pour la paix et la concorde nationale.
Etablir des visites d’échanges entre Etats de la sous-région.
Montrer l’image réelle de la religion pour contrer l’extrémisme.
IV. A l’attention des populations :
Faire de la Cohabitation pacifique, de la concorde nationale et de la paix une culture dans la sous-région.
La dernière activité à laquelle la délégation a pris part était la célébration de la Journée nationale de prière pour la Paix, la cohabitation pacifique et de la concorde nationale, le vendredi
28 Novembre 2014 à la place de la nation en présence des trois leaders des trois confessions religieuses ainsi que leurs fidèles, tous rassemblés autour du président tchadien, de son gouvernement et des autorités administratives. La célébration a été marquée par les messages et prières de remerciement à Dieu pour la paix au Tchad et les appels à persévérer dans la promotion de la paix et de la cohabitation pacifique entre les différentes confessions religieuses au Tchad.
La délégation malienne, dans son évaluation ad hoc, a exprimé sa reconnaissance à la Plate-forme interconfessionnelle du Tchad pour l’invitation très enrichissante dont elle a bénéficié. La délégation a aussi exprimé son ardent désir d’enrichir l’expérience malienne de celle du Tchad. Elle a invité la Plate-forme tchadienne à étendre son expérience à la sous-région.
P. Adrien Mamadou Sawadogo, Mafr.
IFIC Bamako