titre du bulletin    Juin 2013

 

Assemble diocésaine 24-28 avril 2013

 

Bien chers amis,

Je voudrais rapprocher deux petits événements qui ne feraient certes pas la une des journaux, mais qui peuvent nous ouvrir au sens de notre vocation chrétienne dans ce pays.

Voici quelques jours, je suis parti en visite à l’autre bout du Diocèse avec Emmanuel, notre économe. Cette belle traversée du désert a représenté 1800 kms en voiture. Nous avons visité Sr Christiane et le P. Philippe à Adrar, Sr Renée à Timimoun, et le P. Georges à El Meniaa.

Pendant ce temps, Anne, secrétaire de l’évêché… faisait les statistiques demandées chaque année par un Service du Vatican : nombre de fidèles… de baptêmes, de mariages, de vocations dans le séminaire !!! Bref tout ce qui a trait aux activités proprement pastorales d’un diocèse. Nous sommes vraiment en décalage par rapport à cette demande, si légitime soit-elle. Disons-le, aux yeux de cette Congrégation romaine, et de beaucoup de membres de l’Eglise… allons ! Cela ne fait pas sérieux !

La conjonction de ces deux faits pose la question du sens de notre présence ici et de nos engagements. Les deux sœurs visitées œuvrent dans des activités féminines, et ont de nombreux autres engagements. Les deux prêtres répondent à différentes demandes ; entre autres ils donnent des cours de soutien en français et rendent de multiples services. On sait que les pères et les sœurs sont des personnes consacrées à Dieu et qu’elles sont d’abord là pour faire le bien. Et que dire des quelques laïcs permanents engagés dans notre Diocèse ? Evidemment, tout cela ne rentre pas dans des statistiques, si ce n’est dans le grand livre d’or du Royaume des Cieux ! Et là, je suis témoin que des pages entières s’écrivent au fil des jours qui passent, et pas seulement au bénéfice des membres de notre Eglise !

C’est sans doute à cause de cette apparente insignifiance – qui ne veut pas dire ici absence de sens – que l’on se pose parfois la question de « l’utilité » (excusez ce mot…) d’un diocèse comme le nôtre ! Il est certes difficile, si la question se pose en termes de rentabilité, d’être défendables ! Mais je suis sûr que les premiers à prendre notre défense seraient nos amis musulmans eux-mêmes ! Lorsqu’une communauté ou une personne engagée dans l’Eglise quittent un lieu, c’est toujours un drame pour elles mais aussi pour les gens… qui seraient parfois prêts à écrire au Pape pour lui demander qu’elle reste ! La présence de l’Eglise serait-elle réservée au seul service des Chrétiens ? Il me semble que l’Evangile déborde de témoignages où les premiers magnifiés sont ceux qui n’appartiennent pas au groupe visible des disciples de Jésus (tels que le centurion romain, la femme syro-phénicienne, le lépreux samaritain guéri…).

Vous comprendrez pourquoi je ressens (et je ne suis pas le seul) un certain malaise devant trop de tapage autour la « Nouvelle évangélisation ». Ne vise-t-elle pas d’abord à l’évangélisation des « évangélisateurs » ? Fort heureusement notre nouveau Pape semble faire prendre un sérieux tournant à cette question ! Ce terme lancé par Jean-Paul II au cours d'un voyage apostolique en Pologne en 1979 a été abondamment repris en diverses circonstances, mais est-il bien compris ? (1) Je ne remets pas en cause l’effort qui est fait pour que la Bonne Nouvelle atteigne chaque personne, chaque groupe humain, mais cela me gêne lorsqu’elle est transformée en statistiques et en campagne publicitaire.

C’est à chacune et chacun de nous d’être une nouvelle page de cette Bonne Nouvelle que Jésus est venu répandre sur la terre. Ce qui doit être toujours nouveau, ce n’est pas tant l’évangélisation en elle même, que cet amour dont Jésus parle : « Je vous donne un commandement nouveau, c’est de vous aimer les uns les autres… C’est à cela que tous vous reconnaîtront pour mes disciples ».

Là nous sommes devant une nouveauté à accueillir chaque matin.
Le Père Claude Rault, évêque de Laghouat

+ Claude, votre frère évêque.