Histoire de l'Afrique

 
Carte des entités politiques d'Afrique, ayant existé à des dates différentes entre env.  et env. .
 

L'histoire de l'Afrique commence avec l'apparition du genre humain, il y a environ 2,6 millions d'années.

Le continent est le berceau de l'humanité, où s'est élaboré, il y a 200 000 ans environ, l'humain moderne qui s'est par la suite répandu dans le reste du globe. Vers la fin de la Préhistoire, le Sahara, qui était alors formé de grands lacs, devint aride et « coupa » l'Afrique en deux, conduisant à des évolutions historiques distinctes mais non totalement indépendantes entre le nord et le sud, toujours reliés par divers corridors commerciaux passant par des réseaux d'oasis et parfois même unifiés sous une même puissance, comme celle des premiers Almoravides ou de l'Empire chérifien.

Le nom « Afrique » dérive du latin Africa, désignant à l'origine la province d'Afrique proconsulaire dans l'Empire romain, qui recouvrait approximativement ce qui est aujourd'hui la Tunisie, la région côtière d'Algérie et la Tripolitaine libyenne et qui a fini par désigner toutes les terres au-delà.

À l'origine, le terme utilisé était « Éthiopie », et les Africains étaient appelés « Éthiopiens » dans la mythologie, mais le terme « Afrique » a fini par le remplacer lorsque l'Éthiopie actuelle a réussi à faire reconnaître son droit à l'utiliser comme nom au lieu du traditionnel « Abyssinie » utilisé en Europe, en s'appuyant sur La Chronique des rois d'Aksoum, un manuscrit guèze du xviie siècle, où le nom Éthiopie est dérivé d'Ityopp'is, un fils de Koush inconnu de la Bible qui aurait fondé la ville d'AksoumPline l'Ancien1 exposait la même tradition en parlant d'« Æthiops, fils de Vulcain »n 1. Un phénomène analogue a eu lieu pour l'Asie : désignant à l'origine les terres situées à l'Ouest de l'Anatolie, (ce terme ayant été ensuite repris par les Romains pour désigner la province recouvrant ce territoire), ce terme finit par désigner toutes les terres à l'Est de celle-ci. Ce phénomène est symptomatique de la division historique entre les deux parties du continent, entre le Nord et l'Est intégrés à l'Eurasie et à la Méditerranée, et le reste du continent qui resta longtemps à l'écart des grandes routes commerciales intercontinentales comme la route de la soie.

À la période historique, la civilisation de l'Égypte antique se développa le long du Nil, et l'Afrique du Nord, rive sud de la Méditerranée, connaît l'influence des Phéniciens, des Grecs et des Romains, ainsi que dans une moindre mesure celle des Perses et des Assyriens lorsque leurs empires respectifs envahirent l'Égypte.

L'Afrique subsaharienne voit naître ses propres civilisations dans les zones de savanes. À compter de 3000 av. J.-C. l'expansion bantoue repousse les peuples Khoïsan. Du côté de l'Afrique de l'Ouest, le Royaume Mossi se démarque par sa remarquable ténacité à résister à tous les envahisseurs. Venu du Ghana, ce royaume fixe le terreau de sa forteresse en plein milieu de l'Afrique l'Ouest.

La religion chrétienne s'implanta en l'Afrique dès le ier siècle, essentiellement dans l'Afrique romaine du nord du continent puis dans l'actuelle Éthiopie. Le viie siècle voit les débuts de l'Islam en Afrique, lequel s'installe sur la côte est et dans le nord du continent jusqu'à la frange septentrionale de la zone subsaharienne. L'Afrique du nord s'arabise lentement et se convertit à l'islam dans le même temps à partir de la conquête islamique des vie et viie siècles. En Afrique subsaharienne, à partir du viiie siècle et jusqu'au xviie siècle, de puissants et riches empires se succèdent, tels quel'Empire du Ghana, le Fouta-Toro, l'Empire du Mali, l'Empire songhaï, le Royaume du Kanem-Bornou, l'Empire de Sokoto ou le Royaume du Bénin.

Vers la fin de cette période, au xve siècle, les Portugais, suivis par d'autres nations européennes, installent sur la côte ouest un trafic d'esclaves, la traite atlantique, qui s'ajoute à la traite intra-africaine et à la traite orientale qui sévissent déjà sur le continent. Grâce à ce nouveau débouché commercial, certains royaumes africains prospèrent du trafic d'esclaves, comme ceux de la côte du Zanguebar, ou de la Côte des Barbaresques, en se fournissant chez leurs ennemis ou chez leurs voisins infidèles. Le xviiie siècle marque le début des explorations européennes de l'intérieur des terres, suivies par la colonisation massive du continent entre la fin du xixe et le début du xxe siècle (voir Partage de l'Afrique). La traite esclavagiste cesse à la fin du xixe siècle, mais elle est vite remplacée par une exploitation coloniale des peuples conquis, comme dans le Congo belge. L'Afrique est au début du xxe siècle presque entièrement sous domination coloniale et le restera en partie jusqu'à la fin du siècle, ce qui modèle encore aujourd'hui les frontières et les économies des pays concernés.

La plupart des États obtinrent leur indépendance entre la fin des années 1950 et le milieu des années 1970, parfois à l'issue de guerres d'indépendance sanglantes comme en Algérie. Les pays du continent présentent la croissance démographique la plus importante de la planète et une situation sanitaire qui s'améliore nettement tout en progressant moins vite que dans les autres pays en développement.

Préhistoire

Naissance de l'espèce humaine

Schéma structural simplifié du grand rift est-africain.
 

L'Afrique est considérée par les paléoanthropologistes comme le berceau de l'humanité, où est née l'espèce humaine (Ève mitochondriale)2,3. La vallée du Rift a livré un nombre important de vestiges archéologiques et de fossiles liés à la présence des premiers hominidés préhistoriques. Dans le courant du xxe siècle, les anthropologues découvrirent un grand nombre de fossiles et de preuves d'une occupation par des hominidés précurseurs de l'être humain, datés, par datation radiométrique, de 7 millions d'années avant le présent pour l'espèce Sahelanthropus tchadensis (fossile Toumaï)4,5, de 6 millions d'années pour Orrorin tugenensis, de 4 millions d'années pour le fossile Ardi de l'espèce Ardipithecus ramidus, de 3,9 à 3,0 millions d'années pour l'Australopithecus afarensis6, de 2,3–1,4 millions d'années avant le présent pour Paranthropus boisei7 et d'environ 1,9 million–600 000 ans avant le présent en ce qui concerne Homo ergaster.

Après l'évolution d'homo sapiens, il y a environ 200 à 100 000 ans, le continent fut principalement peuplé par des groupes de chasseurs-cueilleurs8,9,10. Selon la théorie de l'« origine africaine de l'Homme moderne », ces premiers humains modernes quittèrent l'Afrique et peuplèrent le reste du monde entre 80 et 50 000 ans avant le présent. Ils auraient quitté le continent en traversant la mer Rouge via le Bab-el-Mandeb11,12, le détroit de Gibraltar11,12 et l'isthme de Suez13.

Des migrations de ces humains modernes, à l'intérieur du continent, datent des mêmes époques, avec des traces de peuplement humain précoce en Afrique australeAfrique du Nord et au Sahara14.

Lucy, un squelette relativement complet d’Australopithecus afarensis

Formation du Sahara

La taille du Sahara a considérablement varié au fil du temps, essentiellement du fait des conditions climatiques15. À la fin de la glaciation qui a lieu aux alentours de , le Sahara était un territoire vert et fertile. On trouve, dans le Tassili n'Ajjer, des peintures rupestres, datant d'environ , représentant un Sahara fertile et largement peuplé16. Vers 5000 av. J.-C., l'échauffement et l'assèchement du climat font que le Sahara devient de plus en plus chaud et hostile. À l'occasion d'une évolution qui dure jusqu'aux alentours de 3900 av. J.-C., le Sahara connaît une période de désertification17,18. Une récession climatique importante se produit, entraînant une diminution des pluies en Afrique de l'est et du centre. Depuis cette époque, ce sont des conditions sèches qui prédominent en Afrique de l’est19. Le Sahara devient un « hiatus climatique […] qui joue un rôle capital dans le cloisonnement géographique d'une grande partie de l'Afrique20 ». Cela réduit la quantité de terres propices au peuplement et provoque des migrations des communautés agricoles vers le climat plus tropical de l'Afrique de l'Ouest19 et vers la vallée du Nil, en dessous de la seconde cataracte, où s'établissent des implantations permanentes ou semi-permanentes. Cette émigration a permis l'émergence de sociétés complexes et hautement organisées durant le IVe millénaire av. J.-C.21, comme en témoigne le site de Nabta Playan 2. Ce hiatus climatique est un obstacle à la circulation nord-sud ; Pierre Gourou22 parle de « hiatus isolant ». La vallée du Nil devient le couloir privilégié de circulation et l'Égypte suit un processus de développement distinct du reste de l'Afrique, tout comme les États de la Corne de l'Afrique qui se trouvent mieux intégrés aux systèmes économiques du Moyen-Orient qu'au reste de l'Afrique23,n 3.

Développement de l’agriculture et métallurgie[modifier | modifier le code]

La domestication du bétail en Afrique précède l’agriculture ; ainsi le bœuf est-il domestiqué depuis 7 500 à 6 000 ans av. J.-C. en Afrique du nord24,25. Dans l'aire nilo-saharienne, de nombreux animaux sont domestiqués, dont l'âne24. Elle se développe parallèlement aux cultures de chasseurs-cueilleurs. Les Khoïsan, qui furent la population la plus nombreuse dans l'histoire de l'humain moderne26 se divisent entre les chasseurs-cueilleurs San, appelés aussi « Bochimans » et les pasteurs Khoïkhoïs27.

L'agriculture apparaît en plusieurs lieux selon un processus complexe28 vers 29 Il s'agit d'abord d'une adoption par l'Égypte de plantes venant du sud-ouest asiatique. L’Éthiopie (et la Corne de l'Afrique en général) se distingue nettement de ses voisines et entretient des contacts intermittents avec l’Eurasie après l’expansion de l’espèce humaine hors d’Afrique. La culture, la langue ainsi que les espèces cultivées en Éthiopie (café, sorgho, teff) sont particuliers à cette région. Vers , une migration majeure de populations d'agriculteurs venus du Proche-Orient a lieu en direction de l'Afrique30. Cette implantation de nouvelles populations est notamment présente dans la corne de l'Afrique30. Vers 2 000 ans av. J.-C., une agriculture autochtone se développe avec la domestication du mil, du riz africain, de l'igname et du sorgho31.

En Afrique de l'Ouest, la population de culture Nok (vers 1500 AEC - ier siècle EC), au Nigéria, pratique l'agriculture (mil, haricot) et la cueillette de plantes sauvages. Ils maîtrisent la technologie du fer dès 800 AEC, mais sans la "complexité sociale" imaginée auparavant (sans inégalité ni hiérarchie)32.

En Afrique australe, des groupes d'éleveurs probablement d'origine est-africaine ont commencé à arriver dans la région il y a environ 2 000 ans. Cette expansion du pastoralisme en Afrique de l'Est semble montrer une migration à prédominance masculine. Ils introduisent de nouvelles pratiques de subsistance et d'élevage pour les chasseurs-cueilleurs locaux33.

Les agriculteurs parlant des langues bantoues, originaires d'Afrique de l'Ouest, apportent leur mode de vie en Afrique de l'Est il y a environ 2 000 ans, puis en Afrique du Sud il y a environ 1 500 ans. Elle entraîne le remplacement complet des chasseurs-cueilleurs locaux dans certaines régions34.

La métallurgie du fer apparaît précocement en Afrique, dès le IIIe millénaire av. J.-C. en Afrique de l’Ouest et du centre (territoires des actuels GabonCameroun et République du Congo) et dans la région des Grands Lacs35,36.