Côte d’Ivoire: Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé
acquittés devant la CPI
La Cour pénale internationale a décidé ce mardi 15 janvier 2019 de l’acquittement de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé. Les deux hommes étaient poursuivis pour crimes contre l’humanité après les violences postélectorales de 2010 et 2011. Les juges ont ordonné la remise en liberté immédiate des deux accusés, mais elle a été suspendue à la demande du procureur dans l'attente d’un nouvel appel. Une nouvelle audience aura lieu sur ce sujet mercredi matin.
A la CPI, le climat était d’abord assez tendu ce matin, dans la galerie qui surplombe la salle d’audience, une salle pleine. Il y avait là des diplomates, des journalistes et beaucoup, beaucoup de militants du FPI. Puis l’audience a débuté à 11 heures. Le juge principal a pris la parole, il a fait l’historique de la procédure, puis a donné son délibéré. La CPI s'est prononcée en faveur de l'acquittement de l'ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo.
Les juges considèrent que le procureur n’a pas été capable d’apporter suffisamment de preuves pour démontrer que Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé étaient à l’initiative d’un plan commun visant à se maintenir au pouvoir et de ce fait à user de violence pour y parvenir. Les juges estiment par ailleurs que le procureur n’a pas démontré que les deux prévenus ont prononcé des discours de haine contre les populations civiles. La CPI a également ordonné la mise en liberté immédiate de l'ancien chef de l'Etat ivoirien.
Explosion de joie dans la galerie. On entendait des cris, des personnes pleurer de joie. « C’est fini ! C’est fini ! », pouvait-on entendre parmi ces cris. Les cris étaient tellement forts que les juges et même les deux prévenus ont dû faire des signes au public pour que la séance puisse se poursuivre.
Les accusés impassibles
Tout au long du délibéré, Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé sont restés impassibles, concentrés à écouter le délibéré des juges. Ils ont attendu la suspension de la séance pour se prendre dans les bras et se féliciter chaudement. L’une des avocates de Laurent Gbagbo a même versé une larme, signe de l’émotion qui régnait également dans le prétoire.
Mais, finalement, quelques minutes plus tard, l'ordre de mise en liberté a été suspendu jusqu'à demain en attendant de savoir si le procureur faisait appel. Une nouvelle audience doit donc avoir lieu demain à 10 heures, heure locale. Audience qui déterminera donc si Laurent Gbagbo sera remis ou non en liberté.
Cela fait sept ans que Laurent Gbagbo est en détention. Il était accusé de quatre chefs d'inculpation de crimes contre l'humanité : meurtres, viols, persécutions et autres actes inhumains. Des faits qui couvrent la période de crise postélectorale en Côte d'Ivoire entre novembre 2010 et avril 2011. Des violences qui ont causé la mort de plus de 3 000 personnes en cinq mois. Des faits pour lesquels Laurent Gbagbo avait plaidé non coupable.
A la sortie de la CPI, les avocats de Laurent Gbagbo, dont maître Altit, ont montré leur satisfaction : « C’est une victoire, une victoire pour la justice. C’est aussi une victoire pour la Cour pénale internationale. Vous savez, la Cour pénale internationale a été critiquée ces derniers temps. Par cette décision, les juges ont montré qu’ils étaient de grands professionnels et qu’ils étaient indépendants. Ils ont assuré, de notre point de vue, la pérennité de la Cour pénale internationale. C’est certainement une décision qui fera date de ce point de vue. C’est ensuite et surtout la victoire d’un homme, le président Gbagbo qui a été injustement accusé. La justice est passée, les accusations sont tombées et le président Gbagbo peut savourer une véritable victoire parce que c’est la victoire de la réalité, de la vérité. Et puis, c’est aussi une victoire d’une équipe de défense qui pendant des années, et des années, a porté la parole du président Gbagbo et s’est battue pour faire prévaloir la vérité et pour que la justice puisse être rendue ».
Autre réaction, celle de l'avocat de l'Etat ivoirien, Jean-Paul Benoit qui n'était pas présent à la CPI : « Nous avons suivi cette procédure avec sérénité. Ce n’’est pas un règlement de compte ».