Les organisations de journalistes condamnent la suspension de RFI et France 24 au Mali
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Les ondes FM de RFI sont coupées dans tout le Mali depuis ce jeudi à la mi-journée. Conséquence de la décision des autorités maliennes de transition de suspendre RFI et France 24, après la diffusion de témoignages faisant état d’exactions de l’armée malienne dans le centre du pays. Une suspension que dénoncent les différentes organisations de journalistes d'Afrique de l'Ouest.
Bamako, qui note que des allégations similaires ont été rapportées par les Nations unies et par l’association de défense des droits humains Human Rights Watch, estime qu’il s’agit, selon le communiqué officiel du gouvernement de transition, d’une « tentative de déstabiliser la transition, de démoraliser le peuple malien, et de discréditer les vaillantes Fama », les forces armées maliennes.
Le porte-parole du Secrétaire général de l’ONU, Stéphane Dujarric explique que les Nations unies font un travail indépendant sur le terrain. Il est au micro de notre correspondante à New York.
Stéphane Dujarric: «nous sommes très concernés par le rétrécissement de l'espace donné à la société civile, aux médias... qui sont des ingrédients clés d'une démocratie»
Le groupe France Médias Monde, maison mère de RFI et France 24, « déplore cette décision et proteste vivement contre les accusations infondées et rappelle son attachement sans faille à la liberté d’informer comme au travail professionnel de ses journalistes ».
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De son côté, le journaliste ivoirien Noël Yao, président de l’Union des journalistes de la presse libre africaine, demande aux autorités maliennes de réviser leur position, estimant que la liberté de la presse est « fondamentale et sacrée », et qu’elle « participe de tous les efforts démocratiques qui doivent être faits pour sortir ce pays de la crise ».
« Il est important que les autorités maliennes revoient leur position et reviennent sur cette décision, qui n’est bonne ni pour le processus démocratique, ni pour la liberté de la presse en Afrique, note Noël Yao. Lorsque des faits sont allégués, il existe toujours la possibilité de réagir, de porter le droit de réponse, de répliquer, pour que la version des autorités soit connue et qu’il y ait un équilibre de l’information. Mais la méthode n’est pas de faire taire ces deux médias parce qu’on n'est pas d’accord avec les faits relatés. La presse libre africaine ne peut pas accepter que des médias soient ainsi interdits. »
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Même son de cloche du côté de l’Ujao, l’Union des journalistes d’Afrique de l’Ouest, dont le journaliste sénégalais Bamba Kassé est le secrétaire général. « Même si la junte au Mali a des problèmes avec le gouvernement français, nous ne pensions pas que ça allait s’étendre aux médias français. Or, dans cette affaire, la junte vise les médias français qu’il considère certainement comme étant des relais. Alors que la réalité est tout autre. Les journalistes sont des professionnels qui ne répondent pas à des commandes, qui font un travail d’information. »
Bamba Kassé rappelle que « si la junte pense que les médias incriminés n’ont pas fait leur travail correctement, il existe au Mali des mécanismes prévus par la loi : ils peuvent porter plainte. » Il souligne par ailleurs que « la même question a été traitée par l’ONU, par HRW, c’est tout à fait normal que des médias en parlent ». « Où est le problème ? », interroge-t-il.
La junte y voit la preuve d’une stratégie concertée pour déstabiliser la transition. « Quand on veut tuer son chien, on l’accuse de rage, rétorque le journaliste. Peut-être que ces deux médias les dérangeaient dans leur politique actuelle. Ils cherchaient la petite bête pour s’en débarrasser. »
La CPJ se dit inquiète
Au delà du continent, l’organisation américaine de protection des journalistes - la CPJ (Committee to protect journalists) – appelle, elle aussi, les autorités maliennes de revoir leur décision. Pour la CPJ cette décision – ainsi que la suspension d’accréditations de plusieurs journalistes, et l’interdiction des médias locaux de retransmettre RFI - est inquiétante.
Elle dresse un tableau peu reluisant de la liberté de la presse dans le pays, s’inquiète Angela Quintal, coordinatrice de la CPJ, qui demande aux autorités de cesser leurs efforts pour contrôler les médias. « En ce qui nous concerne, il faut une diversité et une pluralité de l’information. Et donc, que le gouvernement tente de bâillonner la presse - alors que les gens ont besoin de plus d’informations - est vraiment inquiétant. Nous savons que RFI, à travers son travail, est un élément clé pour propager l’information. »
Angela Quintal pointe notamment le cas du journaliste Olivier Dubois : « Prenons un exemple – en plus de ce que cela représente pour les Maliens pour obtenir des informations crédibles et justes – j’ai pensé à ce reporter français Olivier Dubois, actuellement en captivité au Mali. Dans une vidéo récente, il demande qu’on redouble les efforts pour obtenir sa libération. Mais il parle également des messages de soutien de sa famille qu’il entend. Cela m’a marqué que, dans une telle situation, le gouvernement malien ferme ce canal de communication ».
« Soyons clairs, le plus important est que la majorité des Maliens a besoin d’informations fiables, insiste la coordinatrice de la CPJ. Ce n’est pas qu’une question de liberté de la presse mais pour les citoyens du droit à l’information. »