MSC, nouveau mastodonte du transport logistique en Afrique de l'Ouest
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Un porte-conteneur de la compagnie MSC dans le port de Norfolk aux Etats-Unis (image d'illustration). AP - Steve Helber
Numéro un mondial du transport maritime, l'italo-suisse MSC va reprendre pour 5,7 milliards d'euros la filiale Bolloré Africa Logistics, du groupe de Vincent Bolloré. MSC, géré par la famille de son fondateur Gianluigi Aponte, cherchait à développer son réseau africain.
Ce serait faire insulte à l'intelligence de Gianluigi Aponte d'affirmer qu'il doit sa fortune à sa belle-famille. Néanmoins, c'est bien grâce aux capitaux apportés par Rafaela, son épouse, fille de banquier suisse, que le jeune capitaine Aponte achète en 1969 son premier cargo.
Ce fils de marin italien qui a vécu en Somalie se lance alors dans l'aventure du transport maritime avant de prendre le virage des porte-conteneurs dans les années 1980. C'est alors que le groupe italo-suisse Mediterranean Shipping Company acquiert une dimension mondiale.
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Désormais, il manipule chaque année 21,5 millions de conteneurs dans plus de 40 ports répartis sur la planète. Cette entreprise familiale, au capital soigneusement protégé, est aussi très en cour auprès des dirigeants français. Le bras droit d'Emmanuel Macron, Alexis Kohler, est en effet lié à la famille Aponte. Il est d'ailleurs soupçonné de collusion d'intérêts avec le groupe MSC.
Néanmoins, cette proximité est vue par Paris comme un atout dans la préservation des positions commerciales et des bonnes relations avec les dirigeants africains. Quant à MSC, très présent dans le transport terrestre en Afrique via sa filiale Medlog et ses 650 camions, il renforce depuis plusieurs années ses actifs portuaires.
Situation de quasi-monopole à Lomé
Mais si toutes les autorisations sont obtenues et que le rachat de Bolloré Africa Logistics se concrétise, MSC deviendra un mastodonte en Afrique de l’Ouest, rapporte notre correspondant à Abidjan, Pierre Pinto. En Côte d’Ivoire, Bolloré opère le premier terminal à conteneurs du port autonome d’Abidjan. Et bientôt le deuxième, en consortium avec son partenaire APM Terminals, filiale portuaire du danois Maersk.
Ce deuxième terminal, qui devrait être opérationnel d’ici quelques mois, donnera au port d’Abidjan une autre dimension lui permettant de rivaliser avec ses voisins dans la région : Téma au Ghana, où Bolloré est aussi très implanté, mais surtout Lomé ou Lagos dont le français se partage le port avec les Chinois de China Merchants Ports, les Italiens de Grimaldi, et Maersk notamment.
C'est vraiment la fin d'une époque où il y avait aussi une rente politique compte tenu de la proximité des pouvoirs africains avec les pouvoirs à Paris.
Antoine Glaser, journaliste et auteur de plusieurs ouvrages sur les relations entre la France et l’Afrique
À Lomé, en reprenant les activités de Bolloré, MSC qui avait installé au Togo son hub continental, se retrouvera en situation de quasi-monopole sur le trafic de conteneurs. Toujours dans la région, MSC est aussi déjà implanté à San Pedro, dans l’ouest de la Côte d'Ivoire, porte de sortie des matières premières ivoiriennes et porte d’entrée pour certains pays de l’hinterland.
Au-delà des ports, MSC desservira donc également les pays enclavés de la sous-région. D’abord grâce à la Sitarail. Cette filiale de Bolloré relie par voie ferrée Abidjan à Ouagadougou via Bobo-Dioulasso. Avant le Covid-19, elle transportait 200 000 passagers et 900 000 tonnes de marchandises par an. Le groupe italo-suisse pourra aussi compter sur plusieurs ports secs : trois à Bamako et un à Kayes, au Mali, deux à Ouagadougou et un autre à Bobo-Dioulasso, au Burkina Faso.