Guinée : le combat de Damantang Albert Camara, ancien ministre d’Alpha Condé, pour recouvrer la liberté
Le bras de fer entre l’ancien ministre Damantang Albert Camara et le procureur Aly Touré se poursuit. Alors que le premier a obtenu de la Cour suprême qu’elle prononce sa remise en liberté, le second s’y oppose toujours. Dernier rebondissement en date : les avocats du détenu ont demandé l’intervention du ministre de la Justice. Révélations.
Albert Camara Damantang, lors de sa prise de fonction en tant que ministre de la Sécurité, le 16 novembre 2019. © DR / Albert Camara Damatang
Damantang Albert Camara, incarcéré depuis avril dernier dans l’attente d’un procès pour, entre autres, détournements de deniers publics, va-t-il être remis en liberté ? C’est en tout cas ce que réclament les avocats de l’ancien ministre de la Sécurité d’Alpha Condé, Boubacar Sow et Sékou Koundiano, dans une lettre de cinq pages adressée le 8 août 2022 au ministre de la Justice du gouvernement de transition, Alphonse Charles Wright, que Jeune Afrique a consultée en exclusivité.
Ce document révèle que la remise en liberté de Damantang Albert Camara a été une nouvelle fois confirmée par la Cour suprême de Guinée le 29 juillet dernier, malgré le pourvoi formé par le procureur en charge du dossier. Cependant, cette décision non susceptible d’appel n’ayant pas été exécutée, la défense de l’ancien ministre réclame désormais l’intervention de l’actuel garde des Sceaux.
Un long bras de fer
Dans leur lettre, les deux avocats demandent ainsi à Alphonse Charles Wright d’intervenir auprès du procureur spécial près la Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief), Aly Touré, afin que celui-ci ordonne enfin la remise en liberté de leur client dans l’attente de son procès.
C’est en février dernier que le procureur spécial près la Crief avait ouvert une information judiciaire contre l’ensemble des ministres d’Alpha Condé en fonction à la date du putsch du 5 septembre 2021. « Il existe des indices sérieux de détournements de deniers publics, d’enrichissement illicite, de blanchiment d’argent, de corruption et de complicité », écrivait-il alors dans un courrier daté du 17 février adressé à la Direction des investigations judiciaires de la gendarmerie.
Inculpé, l’ancien ministre de la Sécurité Damantang Albert Camara avait été placé sous mandat de dépôt le 21 avril à la Maison centrale de Conakry. Mais, dès le 2 juin, la Chambre de l’instruction de la Cour de répression des infractions économiques et financières avait accédé à sa demande de mise en liberté, en attendant l’organisation de son procès. Entre autres conditions, elle lui ordonnait de payer une caution de 500 millions de francs guinéens au Trésor public et de ne pas quitter Conakry.
Une liberté à 1 milliard
Le procureur Aly Touré s’était toutefois opposé à cette décision en interjetant appel devant la Chambre de contrôle de l’instruction de la Crief. Damantang Albert Camara était donc resté en prison. Deux semaines plus tard, le 16 juin, son appel était toutefois rejeté : la remise en liberté était confirmée, bien qu’assortie d’une caution dont le montant, 1 milliard de francs guinéens, avait été doublé.
Selon nos sources, cette somme a bel et bien été versée par la famille du détenu sur un compte de la Crief domicilié à la Banque centrale de la République de Guinée. Damantang Albert Camara n’avait toutefois pas recouvré la liberté. Le parquet spécial près la Crief avait cette fois formulé un pourvoi devant la Cour suprême, ultime recours juridictionnel.
Nouvelle défaite, le 29 juillet dernier donc, lorsque la plus haute juridiction du pays déclarait cette démarche irrecevable. « Il sied de constater que les agissements de monsieur le Procureur spécial près la Cour de répression des infractions économiques et financières violent les règles les plus élémentaires en matière de procédure pénale », dénoncent donc les avocats de l’ancien ministre dans leur courrier au ministre de la Justice.
« Nous sollicitons qu’il vous plaise d’intervenir auprès de monsieur le Procureur spécial, pour faire exécuter l’arrêt rendu par la plus haute juridiction de notre pays », concluent les associés du cabinet Les rivières du sud…