Togo : la stratégie à double niveau de Faure Essozimna Gnassingbé contre les groupes armés
Face à la menace terroriste, en particulier dans la région des Savanes, placée sous état d’urgence depuis la mi-juin, Lomé mobilise les grands moyens.
Le président togolais Faure Essozimna Gnassingbé, en juillet 2022, à Kpendja. © Emmanuel Pita
Réorganisation militaire sur le terrain, renforcement des effectifs, achat d’équipements, renseignement… En six mois, l’extrême-nord du Togo, frontalier avec le Burkina Faso, a été la cible de terroristes à cinq reprises. Il a subi sa première attaque dans la nuit du 10 au 11 mai 2022, contre le poste militaire de Kpékpakandi : 8 soldats ont été tués et 13 autres blessés. À la mi-juillet, des incursions jihadistes ont frappé des villages de Gnoaga et Gouloungoussi, où l’état-major général des Forces armées togolaises (FAT) a déploré « plusieurs morts ».
Alliance nationale
Condamnées et qualifiées de « barbares » et de « lâches » par le gouvernement togolais, ces attaques sont suivies de près par le président Faure Essozimna Gnassingbé, qui est monté au front en personne. D’une part, pour rassurer la population et les FAT ; d’autre part, pour réaffirmer son engagement à protéger l’intégrité du territoire, en misant sur le patriotisme et la proximité, appelant à une alliance nationale contre le terrorisme.
Au lendemain des attaques de Gnoaga et Gouloungoussi, c’est dans une atmosphère lourde que le chef de l’État s’est exprimé en chef de guerre devant les représentants des forces vives de la région des Savanes, placée sous état d’urgence sécuritaire depuis le 13 juin. La voix était ferme, le ton rassurant : « En ces moments d’affliction, je réaffirme ma détermination à lutter contre le terrorisme, afin de protéger nos populations et de garantir la paix et la quiétude. »
Davantage d’effectifs et d’équipements
Pour donner davantage de moyens aux FAT, qui verront leurs effectifs s’étoffer de plus de 2 000 hommes, un budget de 43,4 milliards de F CFA (plus de 66 millions d’euros) est prévu pour l’achat d’équipements de guerre, auxquels s’ajoutent 21,9 milliards pour la formation et le déploiement des forces. Quant à la loi de programmation militaire 2021-2025 – adoptée fin 2020 –, elle a été dotée d’une enveloppe de 722 milliards de F CFA, avec pour objectif de renforcer les équipements des FAT.
Déjà, le bataillon d’intervention rapide (BIR) de Sokodé a été déplacé vers une base de Dapaong et pourvu de drones d’attaques turcs TB2, certains postes avancés ont vu leurs effectifs renforcés et une cellule d’analyse de risques a été ouverte au début de juillet pour recevoir des informations sur les menaces terroristes auxquelles sont confrontés d’autres pays et aider les experts togolais à proposer de meilleures réponses.
Dans le nord du pays, l’opération Koundjoaré a été institutionnalisée au début d’août avec la nomination d’un commandant, le lieutenant-colonel Latiembé Kombaté – ex-chef de corps du régiment parachutiste commando (RPC). Sa mission est de sécuriser les frontières pour prévenir une éventuelle infiltration terroriste, de défendre l’intégrité territoriale du nord du pays et d’y assurer la sécurité des populations et des biens.
Protection sociale renforcée
La lutte contre la pauvreté fait aussi partie intégrante du combat contre la menace terroriste. Parallèlement aux investissements en matière de sécurité et de défense, les autorités exécutent un plan d’urgence de 16 milliards de F CFA pour le développement de la région des Savanes, la plus pauvre du pays.
Ce programme prévoit, entre autres, la construction de forages dans près de trente localités frontalières et de 150 kilomètres de pistes rurales pour désenclaver la région, l’installation de lampadaires solaires, la création d’unités de soins périphériques (USP) à Nassiégou et à Safobé, ainsi que le renforcement des plateaux techniques des hôpitaux existants. Objectif : garantir le mieux-être des habitants et leur protection, sociale cette fois-ci.