Comment sortir l’Afrique de l’Ouest de la dépendance aux oignons hollandais

Les grandes fluctuations du prix de cet aliment de base, notamment au Sénégal, sont révélatrices du manque de structure d’une filière qui, malgré son fort potentiel, reste dominée par les importations des Pays-Bas.

Mis à jour le 15 septembre 2022 à 18:11
 
 oignons
 
 
 

C’est la panique sur les marchés sénégalais, en ce mois d’août 2022. Les oignons manquent et leur prix a flambé. À Touba, le kilo d’oignons est passé du simple au triple, atteignant 2 500 F CFA (3 à 4 euros), ce qui a contraint de nombreux consommateurs à renoncer à cet aliment incontournable de la cuisine locale. Du jamais-vu pour ce légume populaire qui est pourtant habitué aux spéculations à l’approche du grand Magal, fête de la confrérie mouride qui réunit chaque année trois millions de pèlerins et se clôture cette fois ce jeudi 15 septembre.

À LIRESénégal : pourquoi le prix du kilo d’oignons a atteint des sommets

Paradoxalement, un an plus tôt, en septembre 2021, les Sénégalais vivaient la situation inverse. Les étals des marchés croulaient sous les oignons, bradés pour tenter d’écouler la récolte, dont plus du tiers s’est tout de même retrouvée aux ordures, faute d’acheteurs.

170 000 tonnes importées chaque année

Quelles sont les raisons qui ont conduit à cette situation absurde ? L’inflation, les mauvaises récoltes, la conjoncture internationale et les spéculations, entre autres. Mais la principale cause reste le manque de structure de la filière, et notamment les carences en capacités de stockage et de conservation de la production locale, qui oblige le pays, pourtant théoriquement autosuffisant en oignons avec plus 400 000 tonnes produites en 2020, à en importer près de 170 000 tonnes chaque année des Pays-Bas…

Le cas du Sénégal est loin d’être isolé. Le Nigeria, le Ghana, le Bénin ont eux aussi recours aux importations malgré de bonnes productions. D’autres pays, comme la Côte d’Ivoire ou la Guinée, dépendent eux presque totalement de l’étranger. Dans le cas du Niger, principal exportateur ouest-africain, cette culture, peu exigeante en eau notamment, et rentable, pourrait devenir le nouvel « or violet » du pays. Mais, faute de financement et de compétitivité, le pays reste éclipsé par les Pays-Bas.

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Pourquoi les prix varient-ils tant ? Quels sont les pays qui importent le plus ? Quel est leur degré de dépendance ? Et d’où viennent ces oignons importés ? Décryptage, en infographies, du marché si volatile de cet aliment de base de la cuisine populaire ouest-africaine.

Malgré une bonne dynamique, la filière ouest-africaine de l’oignon ne parvient toujours pas à satisfaire les besoins de sa propre région. Ainsi, certains pays théoriquement autosuffisants ne parviennent pas à écouler leur production tout au long de l’année – faute de moyens de stockage adéquats – et doivent compenser les creux entre deux récoltes en important. C’est ce qui a notamment provoqué une grande fluctuation des prix au Sénégal.

Malgré sa proximité géographique et la qualité de ses oignons – les violets de Galmi, réputés pour leur petit goût piquant –, le Niger exporte tout de même, selon les données officielles, sept à dix fois moins que les Pays-Bas. En voici les principales raisons :

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