Enlèvement d’Olivier Dubois au Mali : l’armée française mise en cause

Selon une enquête conjointe de plusieurs médias français, des militaires auraient tenté de se servir du journaliste comme appât pour localiser un chef jihadiste malien. L’armée aurait renoncé in extremis, sans toutefois essayer d’empêcher le rapt du reporter.

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 17 mai 2023 à 13:12
 

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Le journaliste français Olivier Dubois à son arrivée à l’aéroport international Diori Hamani de Niamey, le 20 mars 2023. © Souleymane AG ANARA / AFP

 

Une enquête menée par plusieurs médias français – Le Monde, Libération, RFI et TV5 Monde – affirme que l’armée aurait tenté d’utiliser le journaliste français Olivier Dubois à son insu pour tenter de localiser un chef jihadiste d’Al-Qaïda, sans empêcher son enlèvement au Mali en 2021.

À LIREDu Mali au Niger, comment Olivier Dubois a été libéré

Selon leurs informations, la force française Barkhane était informée du projet du journaliste de rencontrer dans le nord du Mali Abdallah Ag Albakaye, émir affilié à Al-Qaïda, via un fixeur servant aussi d’indicateur aux armées. Les militaires ont alors envisagé d’utiliser cette prise de rendez-vous pour localiser cet émir, avant de renoncer in extremis en raison des risques encourus.

Défaillances ?

Mais l’armée n’aurait pas déployé les moyens adaptés pour empêcher l’enlèvement d’Olivier Dubois à Gao, où il devait rencontrer Abdallah Ag Albakaye. Kidnappé le 8 avril 2021 dans la cité du nord du Mali par le GSIM, principale alliance jihadiste au Sahel liée à Al-Qaïda, Olivier Dubois, qui collaborait notamment avec Libération, Jeune Afrique, Le Point et vivait au Mali depuis 2015, a été libéré en mars dernier. 

Chargée d’enquêter en interne sur cette affaire, l’inspection générale des armées (IGA) a conclu fin 2021 qu’il n’y avait « pas eu de faute personnelle au sein de la force Barkhane ». Mais l’IGA précise que « la sensibilité du sujet n’a pas fait l’objet d’une prise en compte à un niveau suffisant permettant de conduire (…) une action dissuasive à l’encontre du journaliste ».

« Lettre rouge »

Le ministère français des Affaires étrangères a refusé tout commentaire « en raison de l’instruction judiciaire » en cours. L’état-major n’a quant à lui pas souhaité faire de commentaires.

De source diplomatique, on rappelle qu’une « lettre rouge » avait été envoyée à Olivier Dubois la veille de son rapt pour le dissuader de faire ce voyage. Sans toutefois mentionner, selon Le Monde, le risque particulier d’enlèvement encouru par le journaliste, que les renseignements recueillis par l’armée laissaient pourtant présager.

(Avec AFP)