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Plusieurs interventions de la cérémonie de clôture d'Assise
(RV) Documents - Quelques-unes des interventions prononcées, le 20 septembre 2016, à Assise sur la place inférieure de la Basilique de Saint François à l’occasion de la cérémonie de conclusion des trois jours de la 30° Rencontre interreligieuse pour la paix, “Soif de Paix, religions et cultures en dialogue”
Message du Patriarche œcuménique de Constantinople, Bartholomée Ier
Sainteté, Éminences, Excellences, Illustres Représentants des Religions et des Cultures, Autorités ici présentes, Frères et Sœurs,
Ce Rendez-vous International qui nous a permis de nous rencontrer tous, nous a donné une fois de plus la possibilité de nous regarder dans les yeux, de nous parler franchement, de nous écouter mutuellement, de jouir des richesses les uns des autres, d’être surtout des « Amis ». Grâce à cette amitié, qui est un véritable amour désintéressé les uns pour les autres, notre soif de paix trouve son réconfort. Désaltérés puisque la paix est libre, profonde, innée dans le cœur de tout homme, à image et ressemblance de Dieu pour les croyants, ou pour ceux qui forment la famille humaine avec ses cultures et sa pensée laïque.
Nous n’avons pas seulement commémoré un événement extraordinaire réalisé par nos prédécesseurs il y a trente ans mais nous avons renouvelé notre engagement pour la paix avec un esprit nouveau, à travers l’Amitié, des gestes courageux, en ouvrant de nouveaux chemins de dialogue et de collaboration entre les Cultures et les grandes Familles Religieuses du monde.
La Paix toutefois a besoin de pivots qui la soutiennent, même quand elle est en danger.
Il ne peut y avoir de paix sans respect et reconnaissance mutuelle, il ne peut y avoir de paix sans justice, il ne peut y avoir de paix sans une collaboration fructueuse entre tous les peuples du monde.
Ces dernières années nous voyons resurgir des majorités ethniques, religieuses, culturelles qui considèrent les minorités, un corps étranger, dangereux pour leur propre intégrité et qu’il faut écarter, arracher et malheureusement quelquefois même anéantir. Nous voyons des minorités qui, par peur de disparaître, se renferment dans leur ghetto, qui ont peur de la confrontation, qui trop souvent deviennent à leur tour violentes. Cela provoque le découragement, la migration massive et provoque des problèmes d’accueil, de solidarité, d’humanité.
Mais la paix a besoin aussi de justice.
Justice veut dire une économie mondiale renouvelée, attentive aux besoins des plus pauvres ; observer la condition de notre planète, la sauvegarde de son milieu naturel, qui est l’œuvre de Dieu pour les croyants, mais qui est Maison Commune pour tous. Justice veut dire sauvegarder les traditions culturelles, religieuses, artistiques de chaque peuple de la terre. Elle signifie avoir la capacité d’une solidarité qui n’est pas une simple assistance mais faire nôtre le besoin, la souffrance et la joie de l’autre. La justice veut dire être cohérents avec ce que nous professons et croyons et également capables de dialogue avec l’autre, capables de voir les richesses de l’autre, capables de ne pas opprimer l’autre, capables de pas nous sentir supérieurs ou inférieurs de notre prochain. Justice veut dire faire en sorte que chacun continue à vivre dans la terre de ses aïeuls, dans la paix et l’amour, que chacun puisse regagner son foyer pour la croissance de la société humaine.
La paix naît de la connaissance et de la collaboration mutuelle. En tant que Fois, Cultures laïques, en tant qu’êtres humains nous devons aujourd’hui répandre tout cela à travers de nouveaux gestes.
Nous croyons cependant qu’il est indispensable, à notre retour chez nous, que toute Famille religieuse, toute culture – en ce moment historique précis- sente le besoin d’une introspection ; nous croyons qu’il est nécessaire, dans le respect de chaque croyance religieuse ou laïque, de faire une autocritique et une introspection. Nous devons être capables de nous demander où nous avons commis des fautes, où nous n’avons pas été suffisamment attentifs, pourquoi sont nés les fondamentalismes qui menacent non seulement le dialogue avec les autres mais aussi le dialogue introspectif. Nous devons êtres capables de les isoler, de les purifier, à la lumière de nos fois, de les transformer en richesse pour tous.
Tout cela permettra au dialogue de devenir réel, vital. L’abus ne remplacera pas la collaboration. Collaborer signifiera intervenir ensemble dans l’histoire, écrire ensemble nos destins. Nous avons le devoir de sauvegarder tout Être humain dès sa conception jusqu’à sa fin naturelle, en respectant chaque étape de sa vie. Nous avons le devoir de nous efforcer à sauvegarder notre maison commune et tout ce qui s’y trouve. Parce que Dieu, dans sa création n’a pas voulu une seule plante, un seul animal, un seul homme, une seule planète, une seule étoile, il en a voulu beaucoup, de toutes sortes et espèces, tous liés par les mêmes intentions et le même amour. C’est la richesse que nous devons annoncer, sauvegarder et vivre ensemble.
Témoignage de la Syrienne Mikalli Tamar, réfugiée en Italie (voir article prrécédent)
Intervention du Grand Rabbin de Savyon en Israël, le Rabbin Brodman, témoin de la Shoah
En 1943, j’étais un enfant de 7 ans, je fus déporté dans les camps de concentration.
Depuis 1973, je suis Rabbin près de Tel Aviv.
Cette année, je participe pour la dixième fois à cette rencontre merveilleuse. Je suis profondement impressioné et reconnaissant pour tout ce que Sant’Egidio a fait pour moi et pour le monde. Grâce à eux, j’ai eu aussi la possibilité de rencontrer mon cher ami, le Saint-Père. Comme Rabbin, j’emploie le terme «Saint» car Maïmonide dit que la vertu la plus grande est l’humilité et l’humilité est signe de sainteté.
J’ai vu en Pape François un exemple visible d’humilité et de sainteté pour notre temps, tout comme Saint François le fut pour son époque.
Plusieurs fois j’ai parlé aux jeunes, car ceux qui ne connaissent pas l’histoire sont condamnés à la répéter. Je pense que l’esprit d’Assise est le meilleur exemple d’humilité et de sainteté et c’est la réponse à la tragédie de la Shoah et de toutes les guerres. Parce qu’ici nous disons au monde que devenir des amis et vivre ensemble dans la paix est possible, même si nous sommes différents.
Je suis devenu à mon grand âge partie prenante de cet esprit unique : TOUS DIFFÉRENTS MAIS TOUS ENSEMBLE avec le courage du dialogue, pour prévenir tout conflit et créer un monde humain où chacun pourra reconnaître en l’autre l’image de Dieu.
«Un monde sans haine ni mépris» : Intervention du Vénérable Morikawa Tendaizasu, 257° Patriarche du bouddhisme Tendai
Je suis Koei Morikawa, Tendaizasu, le 257e prêtre patriarche du bouddhisme Tendai. Je viens d’un lieu sacré du bouddhisme japonais, le Mont Hiei, situé près de Kyoto, au Japon. La rencontre de prière pour la paix des leaders religieux mondiaux promu par sa Sainteté le pape Jean-Paul II commença il y a 30 ans. Elle s’est déroulée dans plusieurs villes de l’Europe et aujourd’hui elle est revenue à son point de départ, Assise. Pouvoir prier aujourd’hui à l’âge de 91 ans avec les leaders religieux mondiaux et avec vous tous, réunis ici pour les personnes qui ont besoin de soutien est un des plus beaux jours de ma vie.
L’histoire nous a montré que la paix obtenue par la force sera renversée par la force. Nous devrions savoir que la prière et le dialogue ne sont pas le chemin le plus long mais le plus court pour obtenir la paix. Nous ne pouvons pas, cependant, sous-estimer le courant de mouvements mondiaux qui divise le dialogue de l’unité et de la coopération et exige l’isolement et le pouvoir. Cette tendance peut engendrer de la haine autocentrée, de la rage et de l’antipathie pure.
Bouddha l’illuminé nous a appris que «la haine n’est pas effacée par la haine ; la haine peut être effacée seulement en abandonnant la haine». Saicho, le fondateur du bouddhisme Tendai au Japon, nous apprend à soigner la haine par la vertu et Saint François d’Assise nous apprend à apporter l’amour là où règne la haine.
Pour créer un monde vertueux et d’amour là où règnent l’inimitié et la haine, nous, religieux, devons prier ensemble main dans la main et continuer à faire de notre mieux. Pour cela, la présence de Sa Sainteté nous encourage tous.
L’an prochain nous célébrerons le 30° anniversaire de la «Rencontre de prière pour la paix des leaders religieux mondiaux» qui se tient sur le Mont Hiei, au Japon, dans l’esprit d’Assise. Je prie sincèrement afin que les prières ininterrompues de la part des différentes organisations de par le monde dont l’objectif est d’unir l’humanité arriveront sûrement jusqu’à Dieu et Bouddha. Je vous remercie pour votre attention.
Gassho (prière les mains jointes)
Le message final de Mgr Domenico Sorrentino, l’évêque d’Assise
Cher Saint Père François, chères frères et sœurs, chers amis,
L’Eglise d’Assise vous réunit affectueusement, tandis qu’elle revit l’émotion de la grande prophétie posée il y a trente ans sur cette place par Saint Jean Paul II: la prophétie de «l’esprit d’Assise.»
Un esprit de prière, de concorde et de paix, qui veut être une réponse à un monde devenu triste à cause de nombreuses guerres, qui, parfois injustement, ou plutôt, de manière blasphématoire et satanique, agitent des étendards religieux.
Dans cette ville d’Assise, où le jeune François prit ses distances de l’esprit du monde pour être entièrement au Christ et à ses frères, en devenant un homme de paix, notre réflexion et notre prière ont crié, encore une fois, «non» à la culture de la guerre et «oui» à la culture de la paix.
Culture de la paix que, Saint Père, vous nous avez appris à articuler en cette année comme culture de la miséricorde. C’est à dire, une culture de l’amour qui sait prendre soin, s’attendrir et pardonner, selon la béatitude de l’Evangile «Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde».
Dans ces jours, en professant et témoignant nos convictions religieuses, dans l’écoute respectueuse de celles d’autrui, nous avons vécu une véritable expérience d’amitié.
Il faut aller plus loin. Notre amitié veut être une contribution à une politique de la fraternité à l’échelle mondiale.
Est-il possible que l’humanité ait le sentiment d’être une seule famille ? Nous, croyants, pensons que oui, et pour cette raison, nous agissons dans la recherche de ce qui nous unit, en mettant de côté ce qui divise.
L’exemple de François d’Assise nous aide. L’ «esprit d’Assise» n’est pas étranger à sa vie ni à son message.
La formule-même de sa salutation - «Que le Seigneur te donne sa paix !» - n’était pas seulement un souhait, mais une prière pour la paix. Il exprimait la conviction que la véritable paix est un don qui vient d’en haut, sans rien enlever à notre responsabilité.
Que Dieu, qui est la miséricorde, regarde la «soif de paix» de notre monde !
A vous, Saint Père, et à tous ceux qui sont ici présents, j’adresse une accolade fraternelle et un souhait de paix.