St. Lawrence ou St Laurent en français, est une nouvelle communauté en recherche de ses repères et de son identité propre. Elle est située non loin du centre-ville de Lusaka et fait le lien entre « Kamwala South » (un espace en pleine expansion) et « Misisi compound » avec des habitations illégales. Misisi est un milieu pour ‘’oser vivre la rencontre’’. Durant mon temps de pastorale, j’y ai rencontré plusieurs expériences qui interpellent et questionnent ma formation en première étape et au noviciat. Ici j’aimerais partager avec vous une rencontre personnelle avec Maria. Maria est une grand-mère joyeuse et une mère pleine d’amertume sur le pourquoi de son existence actuelle.
Pendant longtemps mes confrères me disaient : pour approfondir ta connaissance de la langue locale nous allons t’introduire à une dame qui va t’aider et sera pour toi un point de repère. Alors un jour à la fin de notre visite des malades, nous sommes allés chez Maria, une façon pour le Père Bernard de m’introduire dans cette famille afin de poursuivre la visite de certains malades seul pendant qu’il s’occupe de nouveau cas où les gens ont besoin de se confesser ou encore avec d’autres qui parlent seulement Bemba une autre langue du milieu que je n’ai pas apprise. Avec Maria nous avons eu un accord : je dois lui apporter l’Eucharistie de façon hebdomadaire car elle est aveugle et à des difficultés pour marcher. Progressivement elle fut insérée dans mon programme pastoral.
Les visites chez Maria sont assez riches et encourageantes, cependant elles présentent d’énormes défis je dirai par rapport à ma formation jusqu’ici. Une fois dès mon arrivée j’ai trouvé Maria toute en pleurs, doucement je pris un siège et l’un de ses grands enfants l’informa de ma présence. Après un soupir elle me dit : ‘’ Mon fils c’est bien que tu sois là, es-tu venu avec l’Eucharistie ?’’ Avec plein d’enthousiasme je répondis de façon affirmative. Alors elle me prit par la main et me posa plusieurs question sur le sens de son existence : Pourquoi suis encore en vie ? Pourquoi dois-je vivre ? Quel est le sens de cette vie où le matin, quand tu te lèves tu es simplement assise espérant que quelqu’un t’offre de quoi manger et de quoi boire ? Demande au Seigneur de venir me prendre poursuit-elle. Pendant près de trente minutes je suis resté silencieux ne sachant quoi dire. Au fond de ma pensée j’avais une idée sur ce qu’elle a vécu jusqu’ici : la perte de tous ses enfants, tous ses frères et sœurs et ne vivant que maintenant chez leur benjamin. La question fut pour moi d’autant plus bouleversante que je n’eus pas la force de prier avec elle et pour elle. Pendant un instant, quand elle continua d’insister à ce que je lui donne une réponse à toutes ces questions, je l’ai invité à une séance d’adoration puisque j’y suis allé avec l’Eucharistie. Juste au début j’ai demandé à Maria de poser les mêmes questions au Seigneur venu lui rendre visite et pendant près de 30min elle disait quelque chose tout bas, ensuite des chants. Une semaine plus tard avec toute la maisonnette nous avons eu une autre séance d’adoration en silence pour soutenir Maria dans sa quête. Sa prière journalière s’articule comme suit : Seigneur quand viendras-tu me chercher, je suis inutile à ma maison et à toute l’existence. Viens vite je t’attends.
Comment accompagner une telle personne ? Comment être pour elle un compagnon de route ? Malgré la prière ensemble, la prière de Maria reste toujours la même et elle est resté convaincue qu’elle n’a plus sa place parmi nous alors que faire. Maria reste pour moi un modèle de confiance dans le Seigneur malgré son refus de la vie qu’elle a aujourd’hui. Elle reste pour moi une source de prière, car ses différentes interrogations me questionnent jour et nuit et invitent à la prière de façon plus ardente et sincère, non pas simplement une question de routine. Maria et ses interrogations inspire à réfléchir sur comment faire usage de ce que j’ai reçu de ma formation jusqu’ici.
Bientôt la fin du mois missionnaire, que celle qui la première a donné son OUI prie pour nous et nous aide vraiment à découvrir notre appel et à y répondre favorablement chaque jour.
Jean-Baptiste Todjro,
stagiaire à St Lawrence Lusaka/Zambia,