L’architecte togolais Eya-Eza Kao voit grand en Afrique de l’Ouest

| Par - À Lomé
L’architecte togolais Eya-Eza Kao, à Lomé, en juin 2021.

L’architecte togolais Eya-Eza Kao, à Lomé, en juin 2021. © Innoproduction pour JA

Sièges sociaux, ensembles résidentiels, hôpitaux… De Lomé à Ouagadougou en passant par Kayes, le Togolais impose peu à peu sa marque, avec une vingtaine de réalisations majeures à son actif.

Deux tours pour la Chambre de commerce et d’industrie de Ouagadougou, au Burkina Faso, des agences de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) à Kayes, au Mali, des sièges de sociétés, dont celui de l’African Guarantee Fund (AGF), inauguré en juin 2021 à Lomé… Ce sont quelques-uns des projets qu’a conçu récemment l’architecte-urbaniste togolais Eya-Eza Kao, 43 ans, fondateur d’Eza-Architectures. Son cabinet, situé dans la capitale togolaise, qui réalise environ 400 millions de F CFA (610 000 euros) de chiffre d’affaires annuel et emploie une dizaine de collaborateurs, compte bien s’imposer comme un acteur de référence en Afrique de l’Ouest.

Outre les projets de ses clients, l’architecte supervise la construction du nouveau siège d’Eza-Architectures : un immeuble de trois étages situé à Avédji, dans la banlieue nord-ouest de Lomé, qui doit être prêt en 2022.

Travail collectif

Pour l’heure, c’est à l’entrée sud de la Résidence du Bénin, à Lomé II, qu’il nous reçoit, dans un bureau ovale niché au deuxième étage d’un immeuble qu’il a dessiné en 2009 pour le propriétaire de la pharmacie Yem-Bla, à quelque 500 mètres de là. « Même si chaque projet est le fruit d’un travail collectif, je fais en sorte d’en conserver la direction. Et, comme je pense que l’on peut toujours mieux faire, j’ai tendance à retravailler les plans jusqu’au dernier moment », explique Eya-Eza Kao, qui admet toutefois que cette pratique perturbe ses équipes. Il travaille avec un réseau de techniciens, dessinateurs et fournisseurs, locaux et étrangers, qu’il a fidélisés au fil des ans.

Originaire de Kozah (préfecture située à 420 km au nord de Lomé), Eya-Eza Kao a grandi au sein d’une famille modeste. Son père, ancien attaché de cabinet à la présidence de la République, a été le chef du canton de Pya (dans la Kozah) jusqu’à son décès, en mars 2020.

Après des études au collège Chaminade, à Kara (Nord), suivies, en 1997, d’un baccalauréat scientifique, Eya-Eza Kao intègre l’École africaine des métiers de l’architecture et de l’urbanisme (Eamau) de Lomé, que codétiennent quatorze États subsahariens francophones, et dont il sort diplômé en 2003. En parallèle, il s’inscrit à des cours du soir en gestion de projet et suit une formation (en ligne) de design.

En 2005, il crée Eza-Architectures, y accueillant deux confrères (un Togolais et un Tchadien) et une consœur béninoise. « On gagne davantage en partageant », commente-t-il. Société à responsabilité limitée, le cabinet voit passer son capital de 1 à 4 millions de F CFA en quinze ans et le nombre de ses collaborateurs de quatre à quatorze.

Un hôpital en terre cuite

Avec une vingtaine de réalisations marquantes à son actif, l’architecte a notamment dessiné le nouveau siège de la Société africaine des biocarburants et des énergies renouvelables (Saber-Abrec) à Lomé II, un bâtiment de quatre étages d’une valeur de 1,4 milliard de F CFA, livré en 2018, ainsi qu’une agence de la Compagnie énergie électrique du Togo (CEET), à Akosombo, à la frontière avec le Ghana, pour un montant de 1 milliard de F CFA.

Outre des programmes résidentiels et tertiaires, Eya-Eza Kao a conçu des programmes spéciaux, tels que la British School of Lome (BSL), pour 1,8 milliard de F CFA, située non loin du campus de l’université, dans le centre de la capitale togolaise, ainsi que des équipements sportifs ou de loisirs (piscine, bowling…).

Il est également le concepteur de l’hôpital Braun, à Cinkassé, dans le nord du Togo. Construit principalement en terre cuite, pour un montant de 800 millions de F CFA, ce centre hospitalier a vocation à devenir un établissement régional de référence, prêt à accueillir des patients togolais, ghanéens et burkinabè.

Eza-Architectures dirige aujourd’hui la construction du siège de la Caisse de retraite du Togo, un immeuble de huit étages (coût : 7 milliards de F CFA) situé au côté nord de l’Université de Lomé. Avec deux autres cabinets d’architecture loméens, Sara Consult et Ingénierie développement espace architecture (Idea), il vient aussi de remporter l’appel d’offres, lancé en septembre 2020, portant sur l’érection du siège de la Société autonome de financement de l’entretien routier (Safer).

Construction durable

En Afrique de l’Ouest, où il est confronté à la vive concurrence de ses confrères ivoiriens, sénégalais, béninois et burkinabè, Eya-Eza Kao n’est pas en reste. Il a ainsi décroché deux importants contrats au Burkina : la construction du complexe immobilier de l’agence auxiliaire de la BCEAO, à Ouahigouya (pour près de 7 milliards de F CFA), et la création de tours jumelles pour la chambre de commerce et d’industrie, à Ouagadougou (pour 14 milliards de F CFA), en collaboration avec le cabinet burkinabè Carure.

Depuis quatre ans, il supervise la construction des immeubles de l’agence auxiliaire de la BCEAO à Kayes, au Mali (pour 6,6 milliards de F CFA), dont la livraison est prévue pour le début de 2022.

Rejetant les critiques que l’on adresse de manière récurrente aux concours d’architecture, prétendument« pipés », Eya-Eza Kao affirme qu’il ne connaissait personne parmi les jurés des prix qu’il a remportés et que parce que, justement, ils sont transparents et anonymes, ces concours sont « les meilleures occasions de prouver son potentiel et son originalité ».

Afin de se démarquer, il revendique pour principale marque de fabrique son attachement aux espaces verts, au développement durable et à l’utilisation de matériaux modernes, tant pour la conception des bâtiments que pour leur aménagement intérieur. Des caractéristiques que l’on retrouve au nouveau siège social de l’African Garantee Fund, qui a nécessité un investissement de 3,4 milliards de F CFA : situé au cœur de la Cité OUA, cet immeuble de 400 mest en partie alimenté en énergie par les panneaux solaires installés sur le toit du bâtiment et équipé de mobilier écologique, notamment en bois.