Mali : libération de l’otage colombienne sœur Gloria Cecilia Narvaez

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 10 octobre 2021 à 10:29


Sœur Cecilia Narvaez Argoti, dans une vidéo rendue publique le 2 juillet 2017. © AFP

Cette religieuse franciscaine colombienne avait été enlevée en février 2017 par des jihadistes au Mali. La présidence malienne a annoncé samedi sa libération.

La présidence du Mali a salué dans un communiqué « le courage et la bravoure de la sœur », précisant que cette libération est « le couronnement de 4 ans et 8 mois d’efforts conjugués de plusieurs services de renseignements ».

« Je remercie les autorités maliennes, le président, toutes les autorités maliennes pour tous les efforts que vous avez fait pour me libérer. Que Dieu vous bénisse, que Dieu bénisse le Mali », a déclaré la religieuse à la télévision publique malienne.

Elle est apparue aux côtés du président par intérim, le colonel Assimi Goïta, est de l’archévêque de Bamako Mgr Jean Zerbo.

NOUS AVONS BEAUCOUP PRIÉ POUR SA LIBÉRATION

Mgr Zerbo a assuré à l’AFP que la religieuse « se porte bien ». « Nous avons beaucoup prié pour sa libération. Je remercie les autorités maliennes et les autres bonnes volontés qui ont permis cette libération », a-t-il dit.

Gloria Cecilia Narvaez fait partie des Franciscaines de Marie Immaculée, une congrégation d’origine suisse fondée en 1893 et présente dans 17 pays.

Elle avait été enlevée le 7 février 2017 près de Koutiala, à 400 km à l’est de Bamako. Elle travaillait alors comme missionnaire depuis six ans dans la paroisse de Karangasso avec trois autres religieuses.

Elle s’était volontairement livrée à ses ravisseurs

Selon une de ses collègues, sœur Carmen Isabel Valencia, sœur Gloria Cecilia Narvaez s’était volontairement livrée à ses ravisseurs alors qu’ils s’apprêtaient à enlever deux religieuses plus jeunes. « Je suis la supérieure, emmenez-moi », avait-elle dit, selon cette collègue.

Le frère de l’ex-otage s’est dit ému, après avoir eu confirmation de la libération. « Dieu merci, elle est en bonne santé, ils m’ont envoyé des photos et elle a l’air bien », a réagi Edgar Narvaez.

Le président de la Conférence épiscopale de Colombie, Mgr Mario de Jesús Álvarez Gómez, a pour sa part exprimé son « immense joie ».

« Je me réjouis énormément de la nouvelle de la libération au Mali de notre chère compatriote, la religieuse Gloria Cecilia Narváez, un objectif que nous nous étions fixé au sein du gouvernement national et pour lequel nous avons travaillé avec le président (colombien Ivan) Duque pendant de nombreux mois », a déclaré pour sa part dans un communiqué la ministre colombienne des Affaires étrangères, Marta Lucía Ramírez.

Mme Ramirez a également souligné les « efforts humanitaires du gouvernement français pour contribuer à cette réussite ».

Une source proche de la médiation a confié à l’AFP que la religieuse n’avait pas été maltraitée pendant sa détention et qu’elle a appris le Coran. « Nous ne dirons pas de détails. Les négociations ont duré des mois, des années », a souligné cette source.

Détenue par « un groupe du GSIM », lié à Al-Qaïda

Un responsable de l’aéroport de Bamako, s’exprimant sous le couvert de l’anonymat, a indiqué à l’AFP que Gloria était arrivée samedi soir dans la capitale malienne d’où elle doit prendre l’avion pour Rome. Le départ de Bamako de la Colombienne a été confirmé par l’archevêché de la ville.

Dans une lettre transmise en juillet dernier par la Croix-Rouge à son frère, sœur Gloria Narvaez expliquait être détenue par « un groupe du GSIM », le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, lié à Al-Qaïda.

Les enlèvements sont courants au Mali, pays sahélien pris dans la tourmente depuis le déclenchement d’insurrections indépendantiste et jihadiste dans le nord en 2012. Le conflit a fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés, malgré l’intervention de forces onusiennes, françaises et africaines.

Un journaliste français, Olivier Dubois, a été enlevé début avril dans le Nord du Mali par des jihadistes affiliés à Al-Qaïda.

 

 

Libération de sœur Gloria : les proches des otages maliens se réjouissent mais s’interrogent

Plusieurs otages, dont une dizaine de Maliens, sont encore aux mains des jihadistes du GSIM (« Jnim »), le Groupe de soutien de l’islam et des musulmans, dirigé par Iyad Ag Ghali. (Illustration)

Plusieurs otages, dont une dizaine de Maliens, sont encore aux mains des jihadistes du GSIM (« Jnim »), le Groupe de soutien de l’islam et des musulmans, dirigé par Iyad Ag Ghali. (Illustration)
 AFP - HANDOUT

La religieuse colombienne sœur Gloria Cécilia Narvaez a été libérée samedi 9 octobre après quatre années et huit mois de captivité. Mais les jihadistes détiennent encore plusieurs otages, dont au moins une dizaine de Maliens.

Sœur Gloria Narvaez était détenue par les jihadistes du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM ou Jnim), dirigé par Iyad Ag Ghali. Sa libération a été obtenue au terme de négociations menées par les autorités maliennes de transition et par l’association chrétienne Sant’Egidio, à la demande du Vatican.  

Une libération qui ne doit pas faire oublier les autres otages toujours aux mains du Jnim, parmi lesquels le journaliste français Olivier Dubois, détenu depuis plus de six mois, parmi lesquels également au moins une dizaine de Maliens –tous les cas ne sont pas publics-, dont beaucoup de représentants de l’État, enlevés précisément pour cette raison.  

Sakouba Mady Dembele, le secrétaire général adjoint du Syltmat, le Syndicat libre des travailleurs du ministère de l'Administration territoriale, est mobilisé pour la libération de ses collègues. « Les syndicats du ministère de l’Administration territoriale se réjouissent de la libération de sœur Gloria, nous avons toujours compati à sa douleur. Mais chez nous, les collègues Drissa Sanogo préfet de Gourma-Rharous, le sous-préfet Ali Cissé, ont été enlevés dans l’exercice de leurs fonctions. Il y a aussi des agents de collectivité, des régisseurs et mêmes des enseignants qui sont aux mains des ravisseurs, et il y a longtemps de cela. Nous apprécions la libération de sœur Gloria, mais nous attendons la libération de nos collègues depuis des années. »

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À cette occasion, le président de la transition Assimi Goïta a précisé que des actions étaient toujours en cours pour faire libérer tous les otages détenus, étrangers et maliens. « Les plus hautes autorités du Mali nous ont fait comprendre qu’elles sont à pied d’œuvre, admet le secrétaire général adjoint du Syltmat, avant de nuancer : Mais pour le moment, nous sommes dans l’attente et il n’y a rien de concret. »

Si Sakouba Mady Dembele se réjouit bien évidemment de la libération de sœur Gloria, elle a également pour lui un goût amer. « C’est avec stupéfaction qu’on a appris la libération de sœur Gloria sans nos collègues. Je pense que s’il y a la volonté, les hautes autorités pouvaient le faire. Mais nous restons optimistes : tous les Maliens en otage vont être libérés. Il est important pour soulager les familles qu’elles sentent les efforts des hautes autorités. Donc communiquer, au moins avec les familles, pour qu’elles sachent à quel niveau ils sont dans la recherche de solution dans la libération de ces otages. »

Le représentant du Syltmat précise que depuis la libération de sœur Gloria, il n’a eu aucun contact avec les autorités. Il espère néanmoins pouvoir discuter de la situation avec elles bientôt. « Dans les jours qui viennent, nous souhaitons les rencontrer pour savoir ce qu’il s’est passé, qu’est-ce qui a empêché la libération de nos collègues et des autres maliens ? On s’interroge sur la sincérité des propos qu’on nous tient. Est-ce que, réellement, on est en train de faire quelque chose pour la libération de nos otages ? »

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