Égalité femmes-hommes : une Côte d’Ivoire exemplaire
Le Compendium des compétences féminines de Côte d’Ivoire fête ses dix ans. Une décennie de combats acharnés contre les discriminations à l’encontre des femmes, mais aussi de succès, selon Euphrasie Kouassi Yao, conseillère spéciale d’Alassane Ouattara chargée des questions de genre.
Depuis plus de trente ans, je me bats sur plusieurs fronts dans le seul but de faire la promotion du genre et aux fins d’en faire un outil puissant de développement pour la Côte d’Ivoire, l’Afrique et le monde entier. C’est un vœu cher qui a été entériné et adoubé par les pouvoirs publics ces dix dernières années.
Dès son accession à la magistrature suprême, en 2011, le président Alassane Ouattara a affiché son ambition de faire de l’égalité femmes-hommes une réalité à l’intérieur des frontières ivoiriennes et de positionner notre pays sur l’échiquier international comme un modèle en la matière. Cette ambition s’est matérialisée par la naissance du Compendium des compétences féminines de Côte d’Ivoire (Cocofci).
Femmes leaders
Né le 4 octobre 2011 d’un engagement fort et de la volonté du chef de l’État de rehausser le rôle des femmes à tous les niveaux, dans tous les secteurs, sans distinction de parti politique, d’ethnie ou de religion, le Cocofci vise principalement à renforcer la visibilité, la participation et le leadership des femmes dans la gestion des affaires publiques et privées. Alassane Ouattara a confié la mise en œuvre du Cocofci à la chaire Unesco « eau, femmes et pouvoir de décision », une structure de formation et de recherche.
En ma qualité de titulaire de ladite chaire, j’ai mené la réflexion sur l’ADN du Compendium et conduit le déploiement de ce programme sur le terrain, auprès des populations. Le Cocofci prend en compte toutes les couches socio-professionnelles, des femmes vivant en milieu rural aux femmes cadres de haut niveau. Elles ont bénéficié de formations de proximité et d’un accompagnement pour les rendre plus visibles et en faire des leaders capables de transformer la société.
Cet exercice a permis de recueillir des informations utiles, transmises en temps opportun au président et à l’ensemble des décideurs publics et privés. L’objectif est de faciliter la nomination des femmes à des postes à responsabilités et de les positionner au cœur des grands débats de société afin d’influer sur les décisions engageant la vie de leur communauté et de leur pays.
Désigné Best Practice par l’Unesco
Cette démarche a abouti à la mise en place d’une base de données unique en son genre dans le monde, dans laquelle les femmes, au nombre de 15 000 aujourd’hui, ont la possibilité de s’inscrire librement. Une base de données qui a permis l’édition d’un annuaire qui identifie les femmes, dans chaque région visitée, en vue de répondre à leurs attentes.
Dans la volonté d’ancrer le Compendium des compétences féminines de Côte d’Ivoire dans tout le territoire national, j’ai émis et mis en application l’idée, avec mes collaborateurs, de répertorier les secteurs où les femmes sont sous-représentées pour encourager leur implication en faisant disparaître les préjugés et en levant les barrières.
Au niveau politique, en formant les femmes, en moins de six mois en 2016, nous sommes passés de 105 candidates en 2011 à 328 en 2016 puis à 455 candidates en 2021. Le Pnud a élu le Compendium des compétences féminines de Côte d’Ivoire, à Addis-Abeba en 2018, meilleur programme africain de valorisation des compétences féminines.
C’était dans le cadre de la coopération Sud-Sud. À cette occasion, l’Afrique du Sud a été primée sur les questions de paix, l’Ouganda pour sa gestion des réfugiés, et le Rwanda pour l’économie verte. L’Unesco et l’Union africaine ont formulé le vœu de voir tous les pays se doter de leur propre compendium, et encouragé le partage des acquis et des bonnes pratiques issus de l’expérience exceptionnelle de la Côte d’Ivoire avec les autres pays. Désigné Best Practice par l’Unesco – l’organisation comprend 193 membres et 11 membres associés – et identifié comme programme modèle par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) – 88 États et gouvernements –, reconnu par ONU Femmes comme un excellent programme à protéger et à partager, le Cocofci répond à neuf objectifs de développement durable (ODD) sur dix-sept.
Mais toute cette synergie d’actions ne saurait porter des fruits sans un réseautage favorisant la mise en place d’actions rapides et efficaces. Ensemble, nous l’avons expérimenté au plus fort du Covid-19, avec la création de la Banque d’amour et de solidarité efficace (Base) qui avait vu le jour en un temps record, en 2019, pour faire face aux difficultés rencontrées par les populations en général, et les femmes en particulier. Il y a eu, entre autres, des distributions de vivres, des séances de dépistage du diabète et des dons d’insuline. Ce réseautage a permis de mettre sur orbite, toujours en 2019, les Communautés régionales pour l’autonomisation et la paix (Créa-paix) dont l’objectif est d’œuvrer pour la cohésion sociale.
L’outil genre, un levier de compétitivité
Afin de faire du genre un sujet de premier ordre et un levier puissant de développement, j’ai lancé, en 2021, le label Genre et Compétitivité des entreprises (Gece). Il entend mettre en évidence les problématiques liées à la vie de ces dernières et les inciter à aborder la question du genre comme un critère sine qua non de compétitivité et d’accroissement de leur rentabilité. En d’autres termes, le label Gece est un programme de certification innovant qui ambitionne de lutter contre les stéréotypes, de renforcer la compétitivité et la rentabilité des entreprises, des institutions et autres organisations, tant du secteur public que privé, à l’aide de l’outil genre.
Cependant, de nombreuses attentes existent au sein de notre société. Les femmes veulent voir avancer beaucoup plus vite la question du genre, avec des résultats rapides à la clé. Mais la promotion du genre rime avec transformation profonde, changement de paradigmes, ancrage solide. C’est un processus de longue haleine qui exige beaucoup de patience et des efforts constants au quotidien.
Je peux dire aujourd’hui, en m’appuyant sur des indicateurs clés de performance dont certains ont été évoqués plus haut, que la question du genre en Côte d’Ivoire connaît des avancées notables, même s’il reste encore des défis à relever. Notre pays fait figure de bon élève, son expérience réussie suscitant l’intérêt des nations d’Afrique et d’autres continents.
Deuxième phase en vue
Avec mes compatriotes, nous pouvons être fiers de ces progrès. En dix ans d’existence, marqués par plusieurs actions qui ont contribué à transformer le visage de notre société et permis l’émergence de femmes leaders, le Cocofci a atteint ses objectifs, en adéquation avec la vision du président de la République. Programme leader reconnu au plan national et distingué à l’échelle internationale, le Cocofci poursuit sa mission de renforcer la visibilité, la participation et le leadership des femmes dans la gestion des affaires publiques et privées.
Au sortir de la célébration de son dixième anniversaire, il entamera sa deuxième phase, qui consistera notamment à partager ses acquis et bonnes pratiques avec les pays demandeurs. L’égalité femmes-hommes est en passe de devenir une réalité en Côte d’Ivoire. Les politiques publiques, avec une forte volonté politique et une implication effective au sommet de l’État, sont en faveur de la promotion du genre. Grâce aux plaidoyers réalisés, l’égalité des chances figure dans la Constitution ivoirienne de 2016. Notre pays est exemplaire à plus d’un titre et les actions menées pour l’égalité femmes-hommes convergent toutes dans la même vision, celle d’Alassane Ouattara, de bâtir une Côte d’Ivoire unie, solidaire et prospère.