kiye2022

L'hebdomadaire de la paroisse de Nioro du Sahel n°60 du lundi 21 novembre 2022: Tout acte agréable à Dieu nous fait appartenir à lui (Une réflexion du Père Vincent KIYE, Mafr)
Textes du jour :
1ère lecture :   Ap 14, 1-3.4b-5
Evangile :  Lc 21, 1-4
« En vérité, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis plus que tous les autres (...) elle a mis tout ce qu’elle avait pour vivre. » (Lc 21, 1-4)
Quel grand risque ! Qu'est-ce qui lui passait dans la tête pour prendre un tel risque ? L'évangile nous dit qu'elle avait mis tout ce qu'elle avait pour vivre. C'est l'expression d'un abandon total à Dieu; l'expression d'une confiance indéfectible en Dieu qui prévoit tout et donne tout. Jésus n'a pas manqué d'éloges à son endroit. Ces éloges sont l'expression d'une récompense qui vient de Dieu lui-même. Voilà ce qui a motivé l'engagement de cette veuve. Elle savait que tout ce qu'elle a vient de Dieu et que le lui confier n'est pas le perdre mais plutôt en recevoir davantage. Par cet acte, elle porte désormais, inscrite sur son front, le nom de l'Agneau et de son Père dont parle Saint Jean dans la première lecture. 
Oui, disons-le, tout acte agréable à Dieu nous fait porter inscrits sur nos fronts, le nom de l'Agneau et celui de son Père.
C'est la grâce que nous allons demander par cette méditation. Celle de poser des actes d'une confiance indéfectible à Dieu, lesquels actes nous font appartenir à Dieu. Amen.
Le Seigneur soit avec vous !
✍🏾 Père KIYE M. Vincent, Missionnaire d'Afrique
Paroisse de Nioro du Sahel
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« Supprimons les structures pour sauver la structure » (Ap. 14, 14-19)


Récollection mensuelle avec la communauté de Salongo à Kinshasa

Le samedi 26 novembre 2022

  1. Mise en place

S’il est vrai que de nos jours le monde est devenu un grand village planétaire, il sied de reconnaître également qu’il y a plusieurs mondes qui se créent dans ce grand village planétaire. Ils se créent souvent sur fond des inspirations ou des idéologies particulières voire partisanes. Ce sont toutes ces tendances antiévangéliques qui tuent l’unité et compromettent l’élan d’une nouvelle humanité. Il en va de-même de nos structures ecclésiales qui voient en même temps des nombreuses autres structures parallèles à caractère ésotériques, naître çà et là. Nous créons des structures (des apostolats privés) au sein de nos communautés qui tuent celles-ci. Mais que vise-t-on dans cette inventivité aux allures démesurées ? Que peut-on attendre de bon, d’intelligible ou de rationnel de toutes ces structures parallèles qui se créent au sein d’une même structure ? Sont-elles une chance ou une menace contre la structure mère, celle qui est l’émanation d’une synthèse entre la raison pure et pratique dont parle le philosophe Emmanuel Kant ? Voilà autant de questions que nous devons nous poser lorsque nous sommes appelés à penser la structure ou les structures du monde possible.

  1. Pour un engagement chrétien authentique.

La synthèse entre la critique de la raison pure et pratique d’Emmanuel Kant nous a toujours paru comme une thérapie pour un monde malade des conceptions ésotériques. Car la trilogie du questionnement kantien n’est ni plus ni moins, une démarche logique qui vise à libérer la conscience humaine des pesanteurs existentielles ou d’irrégularités dangereuses à l’édification d’un monde plus humain. Il s’agit du que puis-je savoir, que dois-je faire et le que m’est-il permis de d’espérer, englobant ainsi, toute la problématique de l’existence humaine. En faire une préoccupation existentielle délivre la conscience des graves irrégularités et des choix hasardeux, libère la conscience de toute conception épicurienne (la recherche du bonheur par la satisfaction des seuls désirs (naturels et nécessaires) pour l’installer dans l’univers axiologique, qui donne d’aborder les sentiments et le monde avec rationalité plutôt que d’être à la merci de son destin et des émotions. Ici donc, on ne cherche plus à créer des structures au sein de la structure mais à purifier la structure de toute imperfection pour l’inscrire sur les orbites de l’exigence du bien-être de tous. C’est tout l’enjeu du directoire commun à tous les missionnaires du vénérable Geronimo et règles des emplois particuliers de 1874. Avoir en tête cette trilogie du questionnement kantien, nous permet de mettre au centre de notre engagement quotidien, la Mission qui est la raison même de la création de la société des Missionnaires d’Afrique. Aujourd’hui, nous avons l’impression qu’un désordre naît des aspirations anarchiques. L’avenir de la société et de l’église en général est en danger. Rationalisons notre engagement. Sinon, nous ressemblons aux humanitaires ordinaires, toujours dans les affaires mais sans affaire c’est-à-dire sans profondeur. Il faut pour cela, nous arrêter parfois et nous remettre en question.

  1. De l’exigence de la suppression des structures pour sauver la structure

Comme vous pouvez le voir, le titre que nous avons choisi pour cette réflexion est très provocateur certes, mais couvre tout un monde derrière, mieux toute une pensée. Nous nous sommes inspirés de la vision apocalyptique de Saint Jean lorsqu’il dit : « Elle est venue, l’heure de la moisson, car la moisson de la terre se dessèche » (Ap.  14, 14-19), vision que nous reformulons en des termes savants : « Supprimer les structures pour sauver la structure ». Ce n’est ni plus ni moins, une invitation au changement des paradigmes dans notre manière de faire et de voir les choses ; une invitation à nous sentir responsable de la chute vertigineuse que connaît notre monde aujourd’hui. Ce changement n’est possible que si nous acceptons honnêtement de nous inscrire sur le modèle de la vision démystificatrice du Christ. Faire nôtre son courage et sa liberté de pensée pour un agir bon et raisonnable. Pour cela donc, il nous faut avant tout le connaitre réellement, l’aimer et voir en ce qu’il a entrepris des valeurs d’une nouvelle humanité afin de l’imiter. Où en sommes-nous ? Chrétiens de notre état, prêtres, évêques etc. où en sommes-nous. Qu’est-ce qui guide le choix de nos actions et de nos décisions ? Est-ce la rationalité ou l’irrationalité ? Conscient que nous sommes loin de l’imitation du Christ parce que nous n’avons jamais compris ce qu’il voulait voir se réaliser en ce monde, le théologien sud-africain Albert Nolan dit : « De milliers de personnes qui ont suivi le Christ, qui peut me dire celui qui a compris ce qu'il voulait voir se réaliser en ce monde ? » (Albert Nolan, Jésus avant le christianisme : l’Evangile de la libération, 1976) Jésus a voulu avant tout créer autour de lui, une communauté humaine et non religieuse. Une communauté d’hommes de tempérament et de caractère différents mais qui font un autour de lui et s’inspire de lui. Le cardinal n’est pas resté en marge de cette vision en fondant la société des missionnaires d’Afrique qu’il a voulue avant tout, une communauté d’hommes unis (Cf p.50).

  1. Jésus libère de la mystique des idéologies partisanes

Il n’est un secret pour personne qu’aujourd’hui des théories diverses sont développées et des recherches sont menées çà et là sur Jésus-Christ et sur sa doctrine. L'audace avec laquelle toutes ces recherches sont publiées, montre la ferme volonté de l’homme de notre temps de dire autrement le Christ Jésus et sa doctrine et cela, de la manière la plus vraie possible. Ce qui n'est pas déjà mal. Mais, est-il possible aujourd’hui de laisser parler Jésus par lui-même, de rejoindre l’homme de Nazareth dans son contexte historique, de comprendre ses choix, sa foi et son message ? s’interrogea le dominicain sud-africain, Albert Nolan. Avons-nousvraiment compris ce que cet homme de Nazareth voulait voir se réaliser en ce monde en choisissant de venir habiter parmi nous ? Jésus et son message restent un domaine inépuisable certes, mais insaisissable de toute conscience ésotérique et malade des préjugés, des irrégularités culturelles, tribales et ethniques. Jésus transcende toutes les cultures, toutes les ethnies et les frontières continentales et nationales. Cherchons à le découvrir, à le connaitre et à l’imiter. C’est le visage de ce Dieu qu’il nous faut comme figure de démystification de toutes les pesanteurs existentielles (culturelles, tribales, ethniques etc). Le visage de ce Dieu qui, pendant que nous cherchons la paix, il nous dit qu'il est venu apporter non pas la paix mais le glaive. Qu'il est venu diviser le fils contre son père, la belle fille contre sa belle-mère, etc. C'est justement le contraire de ce que recherchent nos sociétés actuelles sans les atteindre. 

Il faut être fou pour épouser la logique de cet homme ! Mais il le faut pour transformer notre monde. Il mange avec les pécheurs, il accueille et se laisse embrasser par les prostituées. Quel contraste !

Jésus voulait justement supprimer les structures pour sauver "la structure", il voulait faire passer l'humanité de la loi ancienne à une loi nouvelle, centrée sur l'amour authentique, sur la promotion de l'homme. Il voulait l'humanisation de l'homme. Il s'est permis de détruire le mythe de la législation de son temps en appelant Pilate ce Renard etc. Tout cela a fait de lui le véritable roi de l'univers. Voilà le prix à payer que Jésus nous révèle pour bâtir un monde plus humain : détruire les structures irrationnelles et inhumaines pour sauver la structure intelligible, rationnelle et christique. Voilà le chemin que Jésus nous trace pour le salut de l'humanité.

Aujourd'hui plus que jamais, l'humanité que nous formons a besoin d’une certaine inventivité, du changement des paradigmes existentiels qui hâtent l’avènement d’une nouvelle humanité, calqué sur le modèle du Christ. Ce nouveau monde ne peut advenir que si nous acceptons de naviguer à contrecourant, de supprimer les structures inintelligibles qui ont élu domicile en nous, afin de redynamiser la structure initiale existante.

Aujourd’hui plus qu’hier, le constat est le même. Presque partout des structures parallèles naissent au sein d'une même structure et étouffent celle-ci. Des groupuscules naissent autour de certaines idéologies de mort, assises sur le socle du fanatisme, du tribalisme et régionalisme, etc. Ce qui montre qu'il nous faut une révolution copernicienne de nos structures, laquelle révolution doit s’appuyer sur les trois interrogations du philosophe Emmanuel Kant. Il nous faut pour ce faire, nous munir du courage de cet Homme de Nazareth pour dénoncer toutes ces antivaleurs qui minent nos structures aujourd’hui afin de bâtir une église libérée de toutes les irrégularités. L'imitation du Christ devient ici non négligeable pour bâtir ce monde plus fraternel et plus humain. Pour ce faire, Saint Jean dit : « Elle est venue, l’heure de la moisson, car la moisson de la terre se dessèche » (Ap 14, 14-19)

Conclusion

Notre monde connaît de nos jours une multiplicité des structures au sein d’une même structure. Les motivations d’une telle inventivité reste complexe. Lorsque nous savons que Jésus a été envoyé pour rassembler dans l’unité tous les enfants de Dieu dispersés, cette inventivité anarchique pose question. Au lieu de redynamiser notre structure, nous en créons des milliers, nous dispersons. Voilà pourquoi nous émettons la thèse de la suppression des structures pour sauver la structure qui n’est rien d’autre qu’une délivrance de nos pensées de toutes les pesanteurs ésotériques pour un engagement chrétien authentique. Que le temps de l'Avent qui s'ouvre devant nous soit réellement un temps d'attente du Messie, modèle par excellence de démystification des forces négatives, afin de hâter l’avènement d’un monde plus humain et plus fraternel.

Père KIYE M. Vincent, Missionnaire d'Afrique (Père Blanc)

Paroisse de Nioro du Sahel

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