Africae Munus et l’Église Famille
au Burkina Faso
L’Exhortation post-synodale Africae Munus du Pape Benoît XVI (publiée le 19 novembre 2011) a intégré un programme de mise en pratique de son contenu par ses destinataires. C’est ce qui ressort des expressions “Chantiers pour la réconciliation, la justice et la paix”, et “Principaux champs d’apostolat”.Voyons comment l’Église Famille de Dieu au Burkina Faso répond aux attentes d’Africae Munus avec Mgr Raphaël K. Dèr Dabiré, évêque de Diébougou depuis 2006.
L’Église Famille de Dieu est à pied d’œuvre sur les chantiers pour la réconciliation, la justice, et la paix
Au chapitre II de la première partie du document, le Pape indique quatre “chantiers pour la réconciliation, la justice et la paix” : l’attention à la personne humaine, le vivre ensemble, la vision africaine de la vie, le dialogue œcuménique et interreligieux.
S’agissant du 1er chantier, il y a un véritable regain de la pratique religieuse. De façon générale, au Burkina Faso, on constate que des laïcs de plus en plus nombreux prennent part aux manifestations religieuses et aux exercices spirituels jadis pratiqués par le seul personnel ecclésiastique (ex : retraites fermées, formation théologique).
Le “vivre ensemble” (2ème chantier) entre différentes composantes de la famille, en prenant en compte la protection de la vie dès sa conception, trouve son application à plusieurs niveaux : la présence de Commissions épiscopales pour la famille, l’apostolat des laïcs, l’animation de la jeunesse dans les diocèses, la pastorale des enfants à travers les Mouvements d’Action Catholique et la pratique de la parenté à plaisanterie.
Le 3ème chantier, vision africaine de la vie, représente un lieu de combat pour la Conférence épiscopale (Burkina Faso et Niger) : la lutte contre les idéologies du genre, le combat pour que cesse le bannissement des femmes accusées de sorcellerie, des jeunes filles mères et l’auto-prise en charge définie comme priorité en 1999, sous-tendent tous nos projets de développement.
Nous avons aussi répondu aux préoccupations d’Africae Munus de différentes manières, et à différents moments de la vie sociopolitique nationale par des lettres pastorales (décembre 2010, juillet 2013), des communiqués (février 2011) exprimant nos points de vue (l’article 37 de la Constitution), participant à la gestion de crises (février-mai 2011) et au cadre de Concertation pour les Réformes Politiques.
Le dialogue et la communion entre les croyants au Burkina Faso (4ème chantier) : les différentes communautés humaines et religieuses vivent dans une ambiance de fraternité plus que de tolérance, à la faveur du sens de la famille et de la parenté à plaisanterie (gestes de solidarité et d’amitié à diverses occasions).
Quant au dialogue œcuménique, il reste très peu organisé, et les relations restent distantes entre catholiques et protestants.
Mgr. Dabiré avec le P. Richard Baawobr, notre Supérieur général,
lors du Conseil Plénier de 2012 à Ouagadougou
Principaux champs d’apostolat
Dans sa 2ème partie, après avoir rappelé leurs vocations et leurs rôles respectifs aux différents membres de l’Église, Africae Munus indique les principaux domaines d’apostolat dans lesquels s’investir : l’Église comme présence du Christ, l’éducation, la santé, le monde de l’information et de la communication.
L’Église Famille de Dieu au Burkina Faso est-elle à pied d’œuvre sur ces chantiers ?
L’Église comme présence du Christ : depuis 1977, l’Église au Burkina Faso vit l’expérience ecclésiologique et pastorale comme Famille de Dieu, avec le déploiement des Communautés Chrétiennes de Base (CCB). L’Église-Famille, c’est notre manière privilégiée de dire Église-communion. Sa signification et son importance ont été fortement soulignées dans le document PAC/1 élaboré en 2001 par la CERAO. Ce plan d’action est composé de quatre grands objectifs stratégiques, dont le premier a pour titre : Communion, notion si présente dans Africae Munus et dans Novo Millennio Ineunte.
L’Éducation : L’enseignement catholique est très visible, avec des établissements diocésains ou congrégationnels, du préscolaire à l’université. Au niveau supérieur, l’Unité Universitaire à Bobo-Dioulasso (UUB) et l’Université Saint Thomas d’Aquin (USTA), dont le grand séminaire Saint-Pierre Saint-Paul qui abrite la faculté de philosophie, font déjà partie des universités de renom dans notre environnement. Les salaires des enseignants catholiques du primaire connaissent la parité avec ceux du public, au moyen d’une convention signée avec le Gouvernement.
La pastorale de la santé : les formations sanitaires diocésaines ou congrégationnelles sont nombreuses : cliniques, centres de santé et de promotion sociale (CSPS), centres médicaux…
Le monde de l’information et de la communication : le paysage de communication catholique est assez meublé d’organes de presse (les bulletins diocésains, les radios diocésaines, TV Maria, les prestations d’un attaché de presse de la Conférence épiscopale (Burkina Faso et Niger).
Application de Africae Munus à travers la vie des Commissions épiscopales
Nous avons 23 Commissions nationales rassemblées sous quatre grands groupes correspondant aux quatre objectifs stratégiques de notre plan d’action. Toutes ces commissions existent depuis de longues années, sauf celle des pèlerinages et congrès eucharistiques qui vient d’être formellement créée. La nouvelle évangélisation vient aussi d’être formellement mentionnée comme faisant partie de la Commission de catéchèse. Ces Commissions sont toutes des lieux et moyens d’expression de la solidarité pastorale dont parle Africae Munus.
Depuis 2008, elles ont regagné en vitalité avec la nomination d’un Secrétaire général adjoint de la Conférence épiscopale, chargé des Commissions. Chaque année, notre Assemblée générale ordinaire de juin est consacrée à l’examen de la vie des Commissions.
Quelques Commissions en exemple :
La Commission de pastorale : instrument de pastorale organique entre pays de la CERAO et entre diocèses du Burkina Faso. Élaboration, en novembre 2012, du Plan d’action 2013-2025.
Tous les diocèses et plusieurs institutions sont à pied d’œuvre dans ce sens, avec l’appui du Secrétaire général de la Commission épiscopale. Le plan d’action pastoral est un instrument de sanctification et de communion.
La famille : plusieurs diocèses ont formé des prêtres à l’Institut pontifical Jean-Paul II pour la famille à Cotonou au Bénin, qui animent maintenant la pastorale pour la famille. Dans les perspectives, cette pastorale pense à introduire l’éducation sexuelle dans les établissements catholiques et dans les programmes d’animation des Mouvements d’Action Catholique et la formation des couples aux méthodes naturelles de régulation des naissances.
La Commission Justice et Paix. Elle est fortement engagée dans la lutte contre les violences faites aux femmes, en faveur notamment des femmes accusées de sorcellerie. Elle a formé aussi plusieurs dizaines de parajuristes dans six diocèses pour épauler tous ces pauvres dans leur lutte pour plus de justice.
De nombreux autres exemples existent, mais terminons ici en disant qu’Africae Munus nous a redonné du souffle pour être sel de la terre et lumière du monde.
Mgr Raphaël K. Dèr Dabiré