Une importante quantité
de riz vendue au Cameroun Cet article fait suite à la lettre du 11 janvier 2008, intitulée " une étrange rencontre ", dans laquelle je concluais que le riz thaïlandais vendu à prix cassé sur le marché ouest-africain provenait de stocks destinés à l'alimentation des animaux. L'article ci-dessous, même s'il date un peu et provient du Cameroun, décrit une situation tout à fait comparable à celle de l'Afrique de l'Ouest d'aujourd'hui. L’offre du marché camerounais en matière de céréales présente une panoplie importante de choix, notamment en ce qui concerne le riz. Plusieurs variétés, importées de divers pays, sont en effet nettement différentiables, par plusieurs paramètres : la couleur, l’aspect physique caractérisé par des grains entiers, sans brisures pour certaines ou à moitié ( cassés ) pour d’autres, et au finish par l’apport nutritif en calories de chacune d’elles. Et au regard des données des importations de cette denrée qu’enregistre chaque année le Cameroun, il apparaît que la demande de consommation est en nette progression. Mais au-delà de la grande diversité de la qualité du riz présent sur le marché local, les consommateurs sont presque livrés à la cupidité de certains opérateurs économiques guidés par le seul souci du bénéfice. Allant jusqu’à introduire sur le marché des qualités de riz uniquement destinées à la consommation animale dans les pays d’origine (Extrême-Orient, Asie du Sud-Est). C’est dans le souci de substituer les importations de ces brisures de riz par une production locale d’autres aliments et de pallier ainsi les carences observées autour de ces " sous-produits du riz ", que des opérateurs économiques, en association avec des scientifiques ( tous engagés aux cotés du ministère du Développement industriel et commercial dans un vaste projet de reconversion économique), viennent de commettre une étude de faisabilité qui relève que : " ces brisures de riz (thaïlandaises) ou riz de basse qualité, qui ne sont en réalité que les écarts de tri des usines de conditionnement de riz, ne sont en effet pas destinés à la consommation humaine d’après le classement de la FAO. " Le cadre logique macroéconomique du document précise que : " bio-chimiquement parlant, il y a dilution graduelle de la calorie lors de la cuisson de ce riz (produit non stabilisé par étuvage ou par pré-cuisson). Ce riz peut se gorger d’autant de parts équivalentes d’eau (2 à 4 volumes équivalents d’eau et même plus) jusqu’à un état totalement pâteux lors de la cuisson. C’est en effet un produit qui, du fait de son effet virtuel de satiété, donne au consommateur une illusion bourrative. La valeur calorifique de cette forme de riz devient de ce fait un paramètre non maîtrisable ". Ce phénomène d’importation et par ricochet de consommation à grande échelle des brisures de riz serait apparemment propre à plusieurs pays en Afrique. Le riz importé par les pays africains contient une grande proportion de brisures. Pour expliquer cette situation, plusieurs raisons sont avancées. Celles liées aux habitudes alimentaires des consommateurs pour certains pays (Sénégal et Mali, notamment), mais surtout les raisons économiques (parce que ces brisures de riz coûtent en effet moins cher). Conséquence, le riz importé a généralement une grande proportion de brisures (entre 15 et 100%). Lorsque les importateurs africains n’achètent pas directement auprès des fournisseurs asiatiques du riz ayant un taux de brisures variant entre 15 et 35%, ils importent régulièrement du riz entier de première qualité qu’ils mélangent à de la brisure en grande proportion, afin de réaliser un maximum de bénéfice, aux dépens de leur valeur énergétique. Par ailleurs, d’après des nutritionnistes, ces brisures de riz n’ont qu’une composition proche de celle du riz " destiné à la consommation humaine ". Elles sont : " très riches en amidon, pauvres en protéines, ne contiennent quasiment pas de fibres alimentaires, de minéraux et de matières grasses." Compétitivité Les brisures de riz viennent dans le peloton de tête des riz les plus consommés par les ménages camerounais, en témoigne la forte demande auprès des commerçants et les revenus moyens des populations. Les brisures de riz (qu’on rencontre sur le marché camerounais sous la forme de riz chinois, ou ancien riz), sont largement à la portée du plus grand nombre de ménages (en moyenne 265 francs le kilogramme au marché Deido de Douala), en comparaison au riz longs grains (encore appelé riz parfumé, qui coûte entre 750 et 800 francs CFA le kilogramme). Au regard des prix pratiqués, cette dernière qualité de riz est importée d’une manière très marginale au Cameroun (moins de 2000 tonnes/an). Pis encore, en ce qui concerne le riz blanchi, étuvé et précuit (riz longs grains 2/4) à l’exemple de " Uncle Ben’s " destiné aux marchés huppés, et vendu à plus de 2000 francs le kg. Le riz paddy produit localement et usiné est entièrement exporté, à cause justement de la non-compétitivité du riz long grain sur le marché camerounais. Très consommées, mais en principe destinées aux animaux, les brisures de riz font les beaux jours de certains commerçants, et cette situation n’émeut personne, même pas les associations de défense des consommateurs. "S’attaquer aux importateurs de ces qualités de riz reviendrait à s’attaquer à la grosse machine", se contente de dire un opérateur économique. Alors que la bonne foi aurait par exemple consisté pour ces opérateurs économiques à identifier clairement la destination finale de ces produits, pour ne pas confondre l’alimentation destinée aux hommes à celle habituellement servie au bétail. Maurice Oudet. Source : http://www.camerounlink.net/fr/news.php?nid=8169&kat=1&seite=532 Article de Lazare Kolyang du 15 juin 2004 |