Sanctions contre le Mali : les finances publiques et le commerce durement frappés

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Mis à jour le 22 septembre 2020 à 18h21
Des manifestants célèbrent la chute d'IBK à Bamako

Des manifestants célèbrent la chute d'IBK à Bamako © © Baba Ahmed/AP/SIPA

De premières évaluations recueillies par Jeune Afrique permettent de mesurer l’impact des sanctions, décrétées par la Cedeao après le coup d’État, sur l’économie malienne.

En marge des cérémonies du 60e anniversaire de l’indépendance du Mali, le chef de la junte, le colonel Assimi Goïta, a pressé la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) de lever ses sanctions. «Je pense que dans les jours à venir la Cedeao doit enlever ces sanctions pour le bonheur de la population malienne», a-t-il déclaré mardi 22 septembre, confirmant les craintes d’asphyxie de l’économie malienne. Une demande qui résonne avec celles exprimées depuis plusieurs semaines par les acteurs économiques.

Première victime de l’embargo décidé par l’institution régionale ouest-africaine :  l’émission de titres publics sur le marché financier régional. Selon les estimations de Jeune Afrique, sur la période d’août à septembre, ce sont environ 60 milliards de francs CFA (91,5 millions d’euros) qui n’ont pu être mobilisés.

« Nos émissions du Trésor sont arrêtées depuis le 18 août. Nos comptes BCEAO sont également bloqués, ce qui implique une impossibilité en l’état de transférer ces fonds », glisse sous couvert d’anonymat un cadre du trésor public malien contacté par JA. « La mobilisation des ressources notamment des partenaires financiers et techniques accuse le coup », ajoute notre interlocuteur.

Après une brève suspension de son activité pour raisons de sécurité au lendemain de la prise du pouvoir par les militaires en août dernier, la BCEAO rappelle, elle, continuer à mener des opérations via ses trois agences dans le pays, à Bamako, Mopti et Sikasso.

Le commerce en net recul

JA a également obtenu copie d’une note d’information sur les indicateurs de conjoncture de la Banque centrale, au titre du mois d’août. Elle confirme une détérioration de l’activité économique. Ainsi, le chiffre d’affaires du commerce marque un recul de 16,7 % contre 1,1 %  pour les services marchands, moins affectés.

« Pour l’instant , il est difficile de mesurer l’impact des sanctions financières de la Cedeao sur notre économie qui subit déjà les conséquences de la pandémie et du climat d’insécurité. L’activité économique a ralenti », juge Mamadou Sinsy Coulibaly, le patron des patrons maliens.

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SI LES SANCTIONS PERDURENT, LE MALI COURT VERS LA CATASTROPHE ÉCONOMIQUE

«Si les sanctions perdurent, le Mali court vers la catastrophe économique et je pense que les militaires ont compris cela. Étant donné que l’approvisionnement en biens transite par les ports de Dakar, Abidjan et Lomé, la fermeture des frontières va très vite asphyxier l’économie, déjà fortement perturbée », souligne l’économiste sénégalais et ancien vice-président de la Cedeao, Abdoulaye Fall.

Pour rappel, Bamako vient de voir sa notation financière réduite par l’agence Moody’s à la catégorie « risque substantiel » à la suite du coup d’État. En 2019, le Mali avait obtenu la note « B3 », la plus basse dans la catégorie des dettes dites « spéculatives ». Un niveau certes bas, mais qui est également celui du Ghana. Or, par comparaison, le PIB de la deuxième économie de la Cedeao atteint 67 milliards de dollars (en 2019) soit près de quatre fois celui du Mali (17,5 milliards).