Le Père Maurice Oudet

Nous dépensons beaucoup d'énergies, de moyens financiers pour porter secours aux plus pauvres, aux plus démunis. Mais sommes-nous assez attentifs aux structures qui engendrent la pauvreté ou qui maintiennent les plus démunis dans leur pauvreté. Sommes-nous capables de nous poser la question suivante  : « Comment se fait-il qu'il y ait encore un milliard de personnes sur la terre qui souffre de la faim, et que parmi elles, 750 millions sont des paysans ?  » Comment se fait-il que l'Afrique subsaharienne soit la seule région du monde où le nombre de sous-nutris est encore en augmentation ?  »

Or voici qu'un livre (qui vient de sortir sous le titre « Réguler les prix agricoles ») donne des clés pour comprendre pourquoi il a tant de pauvres en Afrique de l'Ouest, et pourquoi la plupart de ces pauvres sont des paysans. Mais surtout l'auteur (Jacques Berthelot, spécialiste du commerce mondial et de l'agriculture) montre que cette situation n'est pas une fatalité. Il suffirait que les gouvernements de la CEDEAO fassent preuve de courage politique pour obtenir à l'OMC (Organisation Mondiale du Commerce) quelques changements relatifs au commerce des produits agricoles. D'après Jacques Berthelot, il faudrait que la CEDEAO fasse reconnaître son droit d'établir des prélèvements variables sur les produits agricoles et alimentaires.

Cela mérite quelques explications  !Le lait cowbell n'est pas notre lait

Pour comprendre la pensée de l'auteur, il faut savoir qu'aucun pays aujourd’hui industrialisé, y compris les pays émergents, n’ont pu le devenir sans une forte protection agricole  ; et aujourd’hui encore ils protègent fortement leurs produits alimentaires de base. La façon ordinaire pour un pays (ou un groupe de pays, comme l'Europe ou la CEDEAO) c'est d'établir des droits de douane à l'importation. Or ces droits de douane sont définis par des pourcentages qui s'appliquent sur le prix d'achat d'un produit auquel on ajoute les frais de transport à l'entrée du pays.

Manifestation lutter contre la pauvreté

 

Prenons l'exemple d'un importateur burkinabè de riz thaïlandais. Si cet importateur a payé 300 000 F pour faire venir une tonne de ce riz à Abidjan (prix d’achat + transport jusqu'à Abidjan), il devra s'acquitter d'un droit de douane de 10 %, soit de 30 000 F. Les producteurs de riz de l'Afrique de l'Ouest souhaiteraient que cette taxe passe à 35 %.

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