Avec le Mifa, le Togo a-t-il (enfin) trouvé la clé du financement de l’agriculture ?

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Travail du manioc dans le village de Gnita, qui va bientôt être équipé d’une unité de production de farine.

Travail du manioc dans le village de Gnita, qui va bientôt être équipé d’une unité de production de farine. © MIFA S. A TOGO

 

En deux ans, le Mécanisme incitatif de financement agricole a permis de rapprocher les banques et le monde rural. Même si les besoins de ce dernier sont encore loin d’être satisfaits.

Au mois de juin dernier, le Mécanisme incitatif de financement agricole (Mifa) avait déjà mobilisé 26 milliards de F CFA (plus de 39,6 millions d’euros) sur les 50 milliards de F CFA prévus pour l’année 2020.


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Une performance qui rappelle celle de 2019, où le niveau de financement a été supérieur à 8,1 milliards de F CFA, dépassant les prévisions qui avaient été établies à 7 milliards de F CFA. Ces ressources ont bénéficié en 2019 à 76 500 producteurs, qui ont ainsi pu améliorer leurs rendements et embaucher.

Grâce à ce dispositif, le village de Gnita (près d’Akoumapé, à 40 km au nord-est de Lomé), spécialisé dans la production de manioc, a pu obtenir le financement de 50 millions de F CFA nécessaire à l’installation de l’une des cinq nouvelles unités de production de gari (farine de manioc) en cours de construction dans la préfecture de Vo.

Partage des risques

« Un soulagement » très attendu par Afi, l’une des centaines de femmes du village qui, au moyen de techniques archaïques, transforment inlassablement le manioc en produits variés. « C’est aussi une bonne nouvelle pour le pays, qui produit 900 000 tonnes de manioc par an, mais dont 400 000 t ne peuvent pas être transformées localement pour le moment », ­souligne un cadre du Mifa.

Ce mécanisme a été lancé en juin 2018 avec pour objectif d’augmenter le volume de financement alloué au secteur, de professionnaliser les filières agricoles en structurant les chaînes de valeur, mais aussi de développer des produits assurantiels et technologiques innovants et adaptés.

Fondé sur le partage des risques, le Mifa permet à l’État et à ses partenaires de se porter garants des producteurs, rassurant ainsi les banques afin qu’elles acceptent d’accorder des financements aux exploitations agricoles, dont l’activité est considérée comme comportant « trop de risques » et qui, en l’absence de garanties, avaient jusqu’à présent peu de chance de bénéficier de crédits.

450 000 exploitants concernés

Le mécanisme est porté par une société anonyme dotée d’un capital de 10 milliards de F CFA qui, au-delà de la mobilisation des financements, travaille à organiser les producteurs en coopératives, à renforcer leurs capacités et leur maîtrise des techniques, et à aider les petits exploitants à élaborer des plans d’affaires.

Grâce au partenariat stratégique scellé en février 2019 entre le ministère togolais de l’Économie et le Fonds international de développement agricole (Fida), dans le cadre du Projet d’appui au Mécanisme incitatif de financement agricole fondé sur le partage de risques (ProMifa), pas moins de 450 000 exploitants – contre 76 500 en 2019 – auront bénéficié du Mifa en 2020.

Des résultats louables, mais encore insuffisants, selon le directeur général du Mifa : « Notre objectif est d’avoir rapidement un impact sur 1 million de personnes dans le secteur », explique Kodjo Aristide Agbossoumonde.

Taux d’intérêt élevé

Les financements dégagés par les institutions financières restent encore modestes par rapport aux besoins du secteur agricole. En 2019, les crédits qui lui ont été accordés ne représentaient en effet que 4,6 % du total des prêts mis en place par les banques.

« Nous venons de loin, mais vous verrez que l’on progressera rapidement », nuance un expert du Mifa, en citant l’exemple de la BOA-Togo, qui a promis de mobiliser 7 milliards de F CFA de crédits pour le secteur agricole en 2020, contre 4,8 milliards en 2019, soit une hausse de plus de 45 % en un an.

La mobilisation des ressources financières n’est pas le seul défi à relever. Le taux d’intérêt des prêts agricoles, aujourd’hui de l’ordre de 15 %, reste trop élevé pour la plupart des producteurs. L’un des objectifs du Mifa est de le réduire à 7,5 %. Une cible qui semble encore lointaine.