Mohamed Bazoum : qui forme le premier cercle du nouveau président nigérien ?
Le successeur de Mahamadou Issoufou s’est entouré d’une équipe fidèle à son programme,
entre renouvellement et continuité, et entretient aussi son carnet d’adresses diplomatique.
Les premières semaines ont été intenses. Investi mi-avril président du Niger, Mohamed Bazoum a, depuis, dû gérer le difficile dossier tchadien et la mort de celui qui aurait dû être son homologue pour les six prochaines années, Idriss Déby Itno. Il s’est ensuite envolé pour Paris, où la question de la relance des économies d’Afrique subsaharienne était au cœur d’un sommet organisé le 18 mai par Emmanuel Macron.
Comme son prédécesseur Mahamadou Issoufou, le nouveau président nigérien a fait de la sécurité et du développement les axes du programme de son premier quinquennat. Pour cela, il s’est entouré d’un cercle de fidèles entre diplomates chevronnés, jeunes communicants ou encore, caciques du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS, au pouvoir). Il s’appuie également sur un carnet d’adresses qu’il a lui-même développé depuis plus de trois décennies.
Il est le plus proche collaborateur de Mohamed Bazoum, au sens propre comme au figuré. Nommé directeur de cabinet du nouveau président nigérien, Ibrahim Sani Abani est avant tout un spécialiste des questions régionales et internationales. Il était, jusqu’à sa nomination, secrétaire exécutif de la Communauté des États sahélo-sahariens (CEN-SAD), au sein de laquelle il a tissé un carnet d’adresses non-négligeable pour Mohamed Bazoum, qui doit composer avec le difficile dossier sécuritaire sahélien.
Diplomate chevronné disposant de bonnes connexions à l’Union africaine (UA), le nouveau « dircab » a également occupé le poste de secrétaire général du ministère des Affaires étrangères nigérien. Discret, il accompagne aujourd’hui le chef de l’État, lui aussi rompu aux relations internationales, dans tous ses déplacements à l’étranger.
Ils auraient pu être rivaux, lorsque Hassoumi Massaoudou a caressé l’ambition de succéder à Mahamadou Issoufou dans le courant de l’année 2019, en lieu et place de Mohamed Bazoum. Mais les deux hommes sont redevenus de très proches collaborateurs.
Nommé ministre des Affaires étrangères par le nouveau président, l’ancien titulaire des portefeuilles de l’Intérieur, des Finances, de la Communication et de la Défense est l’un des plus fins connaisseurs de l’appareil d’État.
Très proche de Mahamadou Issoufou, il est un ami de longue date de Mohamed Bazoum, avec qui il a fondé le PNDS, puis milité en son sein pendant trois décennies. À 63 ans, cet ingénieur des mines est d’ailleurs l’un des piliers du parti au pouvoir, dont il est toujours le secrétaire général, et il est à ce titre un atout indispensable pour une éventuelle réélection.
Il reste l’homme de l’ombre et l’un des plus précieux soutiens de Mohamed Bazoum au sein du PNDS, dont il est un membre fondateur. Ancien porte-parole de la majorité présidentielle de Mahamadou Issoufou, Alkassoum Indatou est l’un des relais privilégiés du nouveau président sur la scène nationale, en partie grâce à son réseau dans la région d’Agadez, mais il a été nommé à un poste crucial dans l’actuel gouvernement : celui de ministre de la Défense.
En première ligne au niveau sécuritaire, le ministère est également très observé depuis l’affaire de l’audit des comptes de la Défense, qui a ébranlé les derniers mois de la présidence Issoufou et continue d’être une épine dans le pied de son successeur. Mohamed Bazoum a donc choisi d’y nommer un homme de confiance.
Longtemps directeur de cabinet de Mohamed Bazoum lorsque celui-ci était ministre de l’Intérieur, ce sexagénaire, né en 1956, a été nommé ministre de l’Agriculture dans l’actuel gouvernement. Son ancien patron a ainsi choisi de lui confier un portefeuille qui le rapproche de sa formation de base, puisqu’il est spécialiste en médecine vétérinaire et en agroéconomie.
Ancien étudiant à Zinder, Dakar puis aux États-Unis, Alambedji Abba Issa reste, de par son ancien poste, un bon connaisseur des dossiers sécuritaires, en particulier autour de la zone du lac Tchad, où les questions de développement et d’agriculture s’entremêlent avec les problématiques de lutte contre le terrorisme.
Il est l’un des plus anciens amis du nouveau président du Niger. Ce philosophe, chercheur et professeur agrégé, enseigne à l’université française de Montpellier, et partage surtout ses lectures, ses ouvrages et ses réflexions avec Mohamed Bazoum depuis plusieurs décennies.
Conseiller officieux et lecteur assidu des grands penseurs, de Platon à Hegel en passant par Kant, ce spécialiste en philosophie et en épistémologie est l’un des inspirateurs du programme de Mohamed Bazoum sur l’éducation, l’un des axes prioritaires du quinquennat en cours.
Président de la section France du PNDS, il a longtemps été le principal artisan des opérations du parti au pouvoir en Europe. Bien implanté dans les médias internationaux, il est secrétaire à la communication et porte-parole de l’organisation de la jeunesse du PNDS. Idrissa Waziri a en grande partie organisé les visites de Mohamed Bazoum, lorsque celui-ci était en campagne pour succéder à Mahamadou Issoufou.
Le jeune homme est aujourd’hui conseiller spécial du président pour la communication, et est toujours sollicité pour entretenir les réseaux nigériens à Paris, du Quai d’Orsay de Jean-Yves Le Drian à l’Assemblée nationale, où Mohamed Bazoum a tissé des liens avec le député des Français de l’étranger M’Jid El Guerrab.
Mohamed Bazoum le considère comme son propre enfant. Le fils de Mahamadou Issoufou connaît en effet Mohamed Bazoum depuis sa naissance. Conseiller en communication de l’ancien chef de l’État, il a pris peu à peu de l’importance au sein de l’appareil politique nigérien, au point d’être nommé directeur de campagne de Bazoum pour la dernière présidentielle.
Bon communicant, proche de la jeune génération de Niamey, Sani Mahamadou Issoufou, que chacun au Niger surnomme Abba, a été nommé au stratégique portefeuille du Pétrole – Niamey ayant l’ambition de devenir un important exportateur d’or noir. Une façon également pour le nouveau président de ne pas couper avec les réseaux d’affaires de son prédécesseur.
Mohamed Bazoum a connu son actuel homologue sénégalais à l’université de Dakar, à la fin des années 1970. Certes, l’un était dans un cursus scientifique et l’autre préférait les lettres, mais Mohamed Bazoum et Macky Sall fréquentaient à l’époque les mêmes réseaux marxistes-léninistes de la capitale sénégalaise. Depuis, le Sénégalais a quitté ces cercles de gauche, tandis que le Nigérien se revendique toujours d’un certain socialisme. Mais les deux hommes sont restés proches.
Ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bazoum bénéficie en outre d’un important carnet d’adresses diplomatique. Il s’entend particulièrement bien avec Muhammadu Buhari, au Nigeria, mais aussi avec le Burkinabè Roch Marc Christian Kaboré, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, président de la commission de l’UA, et le Mauritanien Mohamed Ould Ghazouani. Plus au sud du continent, il entretient également de bons rapports avec le Congolais Denis Sassou Nguesso.