2014 - Année Internationale
de l´Agriculture Familiale
70% des pauvres sont localisés dans les zones rurales et sont agriculteurs
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Situation
de l’agriculture familiale
L’agriculture familiale africai-ne est concernée directement par l’Objectif 1 du Millénaire pour le Développement, de réduire de moitié d’ici 2015 l’extrême pauvreté et la faim. En effet, selon la plupart des observateurs, 70% des pauvres sont localisés dans les zones rurales et sont agriculteurs.
L’écrasante majorité des agriculteurs en Afrique demeurent “familiaux” au sens où leur activité économique est structurelle-ment liée à leur famille. Ce lien, au-delà de la très large diversité de taille, de système de production, d’insertion au marché, de niveau technologique et de capital, conditionne la prise de décision, l’organisation du travail, la gestion des activités et des facteurs de production et la transmission du patrimoine. Assurer la sécurité alimentaire de la famille est donc sa priorité. Mais l’agriculture familiale porte aussi un système d’organisation et de décision.
Toute la famille participe au travail dans l’exploitation.
Il n’en reste pas moins que les problèmes sont nombreux :
Baisse de compétitivité : la sous-alimentation chronique a progressé, en Afrique, ces vingt dernières années, touchant 239 millions de personnes en 2012, et la production agricole par tête continue de chuter ces quarante dernières années. En fait, l’agriculture fami-liale souffre encore des suites de l’”ajustement structurel”, imposé dans les années 80 aux pays les moins avancés. Il a provoqué le retrait de l’État du secteur agricole avec toutes ses conséquences : dégradation des infrastructures agricoles, forte baisse de l’utilisation d’engrais, disparition des structures d’accompagnement technique, érosion des capacités de recherche, accentuation de la pauvreté rurale et de la faim...
Des politiques agricoles inadaptées : mises en œuvre par les dirigeants africains pendant près de 50 ans, elles n’ont privilégié que les cultures de rente. De ce fait, tout a été mis au service du coton, du cacao, du palmier à huile, de l’hévéa, de l’arachide, etc. exportés pratiquement sans valeur ajoutée pour alimenter les industries du Nord. Malheureusement, les prix de tous ces produits sont fixés par l’Occident au détriment des producteurs africains.
Les responsables politiques, qui affichent aujourd’hui des objectifs agricoles très ambitieux, se basent souvent sur un modèle de “modernisation” passant par les grandes exploitations mécanisées au risque de provoquer l’éviction des petits paysans pauvres, jugés non viables.
Les tensions sur le foncier : la situation des exploitations familiales en Afrique est rendue très difficile par les tensions que connaît actuellement le secteur foncier. Il y a comme une course aux acquisitions foncières, phénomène communément appelé « accaparement des terres ». Cela cache une substitution de l’agriculture familiale par l’agriculture capitaliste, avec un risque majeur de ne plus être en mesure de nourrir les villes. Rappelons-nous le cas de Madagascar qui avait concédé près d’un million cinq cents mille hectares à l’entreprise coréenne DAEWOO. Beaucoup de réformes foncières en cours dans la plupart des pays ne visent qu’à légitimer pareilles situations, et à laisser la porte ouverte, tout en légalisant le pillage des terres.
La concurrence pour l’eau : certes, la concurrence pour l’accès à l’eau augmente sous l’effet de la croissance démographique, de l’urbanisation, des installations touristiques et industrielles. Mais les petits agriculteurs sont les premières victimes de cette course à l’eau. Ils font face à plus puissants politiquement et économiquement qu’eux. Dans les cas d’accaparement des terres, il s’agit aussi de l’accaparement de l’eau par les nouveaux acquéreurs. En effet nombre de pays déficients en eau épargnent leurs propres ressources en acquérant des terres agricoles étrangères.
Nécessaire développement des marchés régionaux : Les marchés des produits alimentaires au niveau régional restent les plus accessibles et bénéficient d’une demande forte et durable ; leur développement est une clé pour l’innovation et la diversification rurale, ce qui suppose des politiques très volontaristes de soutien, voire de protection. Il faut aussi faire redécouvrir l’alimentation basée sur la culture traditionnelle comme le sorgho, le mil, les haricots plutôt que le riz.
Progresser vers une agriculture intensive : il n’y aura pas de développement à long terme possible sans une agriculture de plus en plus intensive qui contribue tout d’abord à la sécurité alimentaire du pays, qui ensuite gagne des devises et crée un marché intérieur pour des produits manufacturés et des services.
Prendre en compte les jeunes qui montent : L’Afrique sub-saharien-ne n’a pas vécu, comme les autres continents, sa “transition économique”, entraînant un passage massif de l’activité agricole vers les autres activités ; elle a vécu une urbanisation sans industrialisation, sans nouveaux gisements d’emplois. Pourtant, plus de trois cents millions de jeunes vont arriver sur le marché du travail dans les quinze prochaines années, presque l’équivalent de la population des États-Unis. Une majorité (environ deux cents millions) de ces nouveaux actifs vivront en zone rurale. Les politiques agricoles doivent donc prendre en compte ces emplois des jeunes ruraux afin de réduire l’exode rural et de lutter contre les inégalités et la pauvreté qui concernent d’abord les campagnes.
Souvent les cultures vivrières ont été sacrifiées
au profit des cultures de rente