Environnement : la Cedeao peut-elle sauver l’Afrique de l’Ouest des eaux ?
Alors que près de 60 % des littoraux du Bénin, de la Côte d’Ivoire, du Sénégal, du Togo ou du Nigeria sont menacés par l’érosion des côtes, l’institution ouest-africaine lance un grand plan de lutte contre les effets du changement climatique.
La Cedeao ne s’occupe pas que de l’érosion démocratique sous l’effet de juntes pourvoyeuses de calendriers jugés indolents. Elle entend prendre à bras-le-corps la question de l’érosion côtière. Plus globalement, l’institution vient d’annoncer, depuis Accra, la mobilisation de 278 milliards d’euros, au cours des dix prochaines années, pour affronter les défis posés par le réchauffement climatique. Pour ne pas faire bande à part vis-à-vis de l’accord de Paris, le programme a été fixé en accord avec l’Union européenne, mais aussi avec les institutions régionales et les acteurs de la société civile.
Pour beaucoup de quidams africains, la lutte contre le réchauffement de la planète ne relève guère de la responsabilité de leur continent, qui n’a émis qu’environ 4 % des gaz à effet de serre depuis 1850. Réticents à assumer des contraintes censément antagonistes avec ce développement économique dont les vrais pollueurs ont eu, eux, le loisir de jouir, nombre de citoyens ne considèrent pas ces enjeux comme prioritaires, comme en témoigne la place infime qu’occupent ces questions dans les programmes des politiciens en quête de suffrages.
Lagos et Cotonou en première ligne
Ce sont pourtant des effets proches et parfois déjà concrets que le réchauffement de la planète implique, avec notamment un impact sur une sécurité alimentaire déjà menacée. Dans cette Afrique qui souffre, ici, d’un déficit d’eau et, là, d’inondations meurtrières, la montée du niveau des océans n’est ni la cause dominante ni la conséquence exclusive des changements environnementaux. Mais près de 60% des littoraux du Bénin, de la Côte d’Ivoire, du Sénégal, du Togo ou du Nigeria sont très concrètement concernées par la dégradation et l’érosion des côtes. Or, c’est dans ces zones que s’agrège une partie croissante de la population – environ un tiers – et 42% des économies locales, selon la Banque mondiale.
SELON LE GIEC, IL RESTE À L’HUMANITÉ TROIS ANS POUR INVERSER LA COURBE DES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE
Sur les côtes d’Afrique de l’Ouest, la mer avance à raison de 1 à 5 mètres par an et certains quartiers de villes côtières risquent de se retrouver sous les eaux dans quelques années. Notamment à Lagos et à Cotonou. Parmi les ébauches de solutions globales figurent l’entretien des forêts, des terres et des façades maritimes, le financement de la recherche, la sensibilisation à l’adoption de nouveaux styles de vie et la transformation des modes de production et de consommation dans tous les secteurs, à commencer par l’énergie.
Le potentiel solaire et éolien de l’Afrique est énorme et le continent pourrait miser, dès aujourd’hui, sur l’agroécologie, l’agroforesterie et l’urbanisation végétale. Selon le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), il reste à l’humanité trois ans pour inverser la courbe des émissions de gaz à effet de serre et éviter que la planète se réchauffe de 3,4°C par rapport à l’ère préindustrielle. Même si l’Afrique ne se préoccupait pas de cette situation d’abord provoquée par les pays du Nord, ce seraient bien, au final, de nombreux migrants climatiques africains qui seraient jetés sur les routes…