Sénégal : Macky Sall nomme Amadou Bâ Premier ministre

Le chef de l’État, qui avait annoncé le rétablissement de la fonction il y a dix mois, a porté son choix sur son ancien ministre des Finances et des Affaires étrangères. Cette nomination intervient après la percée historique de l’opposition lors des législatives du 31 juillet.

Mis à jour le 17 septembre 2022 à 16:06
 
 
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Macky Sall et Amadou Bâ. © DR/présidence Sénégal

 

Après avoir fait durer le suspens durant plusieurs mois, Macky Sall a finalement procédé, samedi 17 septembre, à la nomination du chef de gouvernement. Et son choix s’est porté sur Amadou Bâ, ancien ministre des Finances entre 2013 et 2019, puis des Affaires étrangères jusqu’en novembre 2020.

Supprimé en mai 2019 par le chef de l’État sénégalais afin d’accélérer la mise en œuvre des politiques publiques, le poste de Premier ministre avait été rétabli en décembre 2021. Une réforme notamment justifiée par les impératifs liés au fait que Macky Sall exerce, depuis début 2022, la présidence tournante de l’Union africaine (UA).

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De ce fait, la nomination avait paru imminente. Mais, au lendemain des élections locales, organisées en janvier dernier, et dans la perspective des élections législatives (qui se sont finalement tenues le 31 juillet), Macky Sall avait paru hésiter sur la marche à suivre, peu désireux de mettre en place une nouvelle équipe dont les caciques auraient pu essuyer un revers dans les urnes.

Retour en grâce

La nomination d’Amadou Bâ marque un retour en grâce pour l’ancien directeur des Impôts et ex-ministre, qui figurait sur la liste nationale lors des législatives, mais dont le fief, les Parcelles assainies, la plus grande des communes qui composent Dakar, a été remporté par l’opposition.

Il aura donc fort à faire, d’autant que Benno Bokk Yakaar (BBY, la coalition présidentielle) ne dispose que d’une très courte majorité à l’Assemblée nationale et que l’opposition, emmenée par l’inter-coalition Yewwi Askan Wi (YAW)- Wallu Sénégal, semble déterminée à faire de cette nouvelle législature un casse-tête pour le chef de l’État.

Si la tache s’annonce compliquée, c’est aussi parce que la majorité a montré des signes de fragilité après que Macky Sall a choisi de faire d’un inconnu, Amadou Mame Diop, le nouveau président de l’Assemblée nationale le 12 septembre dernier.

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Parmi les caciques déçus : Aminata Touré, ancienne Première ministre et tête de liste nationale lors des législatives. Elle n’a pas caché sa frustration et sa colère à se voir préférer le maire de Richard-Toll, allant jusqu’à dénoncer un choix guidé uniquement par les liens du nouveau président de l’Assemblée avec la famille présidentielle.

Vendredi 16 septembre, le chef de l’État sénégalais s’est exprimé dans une allocation télévisée, la première depuis les élections du 31 juillet. Il a salué la tenue d’un “scrutin libre et transparent, garantissant la sincérité et la crédibilité du vote”. “L’échéance électorale refermée, il n’y a plus, à mes yeux, de candidats de camps opposés, mais des représentants du peuple”, a-t-il ajouté, avant avant de “regretter profondément” le chaos dans lequel s’est déroulée de l’élection du bureau politique de l’Assemblée.

« Spectacle désolant »

“Le spectacle désolant auquel certains [députés] se sont livrés dans l’enceinte de la représentation nationale en détruisant du matériel et en violant la sacralité des lieux est d’une extrême gravité, indigne d’une démocratie majeure et de la confiance du peuple”, a-t-il dénoncé.

LA SÉANCE AVAIT VIRÉ À LA FOIRE D’EMPOIGNE ET LA GENDARMERIE AVAIT DÛ INTERVENIR

Le 12 septembre, plusieurs députés de l’opposition dont Barthélémy Dias, l’actuel maire de Dakar, et l’activiste Guy Marius Sagna avaient tenté de bloquer l’élection du président de l’Assemblée nationale après de vives altercations avec des élus de la majorité. La séance avait viré à la foire d’empoigne et la gendarmerie avait dû intervenir. “Au delà de nos convictions et de nos choix individuels,  nous sommes un même peuple. Le choc des idées et des ambitions ne doit jamais nous faire oublier notre vivre ensemble”, a conclu Macky Sall.

Le président sénégalais doit maintenant s’envoler pour Londres, où il assistera aux obsèques de la reine Élisabeth II, puis il se rendra à New York pour l’ assemblée générale de l’ONU.