Trafic de cocaïne en Côte d’Ivoire : coup de filet au port d’Abidjan

Plusieurs officiers et gendarmes sont soupçonnés d’avoir participé, à des degrés divers, à la dissimulation puis à la revente d’une partie d’un stock de cocaïne saisi en 2021 et évalué à environ 38 millions d’euros. Explications.

Par Jeune Afrique
Mis à jour le 16 novembre 2022 à 16:27
 
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Le port autonome d’Abidjan, en mars 2019. © ISSOUF SANOGO/AFP

 

 

Le commandant de gendarmerie en charge de la cellule anti-drogue du port autonome d’Abidjan a-t-il dissimulé une partie d’une importante saisie de cocaïne réalisée en 2021 par ses services ? C’est en tout cas ce que les enquêteurs ivoiriens, chargés de faire la lumière sur cette affaire, soupçonnent. L’homme a été interpellé fin août et placé en détention provisoire à la Maison d’arrêt d’Abidjan (MACA). Son arrestation a été suivie de celles de plusieurs gendarmes, entendus ce 14 novembre par un juge d’instruction.

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La saisie en question remonte à février 2021, plus précisément dans la nuit du 24 au 25. À l’époque, les autorités communiquent abondement sur cette affaire compte tenu de l’ampleur de la quantité de drogue trouvée au domicile d’un suspect : 48 sacs de 22 blocs de cocaïne chacun, soit 1 056 blocs pour une valeur de 25 milliards de F CFA (environ 38 millions d’euros).

« Transformée, la cocaïne peut valoir le triple »

La cocaïne est alors présentée à la presse dans les locaux du Groupe de sécurité portuaire. Selon un communiqué de la gendarmerie, c’est en exploitant un renseignement que des éléments de la cellule antidrogue du port – dont la zone d’action s’étend au sud d’Abidjan – ont mis la main sur deux individus en Zone 4 qui les ont conduits jusqu’à la marchandise, en provenance d’Amérique latine et stockée dans un domicile d’Angré.

L’opération de destruction est réalisée devant les caméras, en présence du procureur de la République Richard Adou, du commandant supérieur de la gendarmerie nationale Alexandre Apalo Touré et du secrétaire général de la préfecture d’Abidjan, André Martin Kakou, représentant le préfet d’Abidjan, ainsi que de plusieurs officiers et sous-officiers de la gendarmerie nationale. « Transformée, elle peut valoir le double ou le triple. Cela veut dire que ça peut susciter des appétits. Et c’est dangereux pour nous qui la conservons. Il était donc nécessaire de pouvoir, au vu et au su de tous, la détruire le plus tôt possible », s’inquiète alors Richard Adou.

8 milliards de F CFA de drogue dissimulée

La valeur de la drogue dissimulée pour être revendue au détail serait évaluée à près de 8 milliards de F CFA (environs 12 millions d’euros). Un autre officier de gendarmerie, travaillant dans le quartier des affaires du Plateau à Abidjan, serait aussi impliqué. Pour l’heure, à ce stade de l’enquête, aucun lien n’est établi entre cette affaire et celle, retentissante, du démantèlement en avril dernier d’un vaste réseau de drogue impliquant d’importants hommes d’affaires et plusieurs trafiquants internationaux.

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Consciente des trous dans la raquette, la gendarmerie ivoirienne envisage une vaste réorganisation de toutes ses services en pointe dans le cadre de la lutte anti-drogue. La Côte d’Ivoire est aujourd’hui considérée comme un point de passage de plus en plus important dans le trafic opéré entre l’Amérique latine et l’Europe.