En Côte d’Ivoire, le défi de l’afflux de réfugiés burkinabè dans le Nord
Jusque-là accueillis par les communautés locales, 10 000 réfugiés burkinabè vont être prochainement hébergés dans deux centres construits par les autorités ivoiriennes. Selon le HCR, environ 1 000 de leurs compatriotes franchissent la frontière chaque semaine.
Des réfugiés burkinabè dans un centre d’accueil situé à Tougbo, dans le nord-est de la Côte d’Ivoire, le 22 janvier 2022. © Sia KAMBOU/AFP
Les Burkinabè fuyant les violences des groupes jihadistes – mais aussi, parfois, celles de l’armée et de ses supplétifs civils, les volontaires pour la défense de la patrie (VDP) – continuent d’affluer dans le nord de la Côte d’Ivoire. D’après le dernier relevé du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR), le lundi 19 juin, ils seraient environ 27 000 à avoir franchi la frontière poreuse, longue de près de 600 kilomètres.
Une capacité totale de 10 000 places
Ils étaient 7 000 en février 2022 et 22 000 à la mi-mai de cette année. Le HCR et les autorités ivoiriennes ont procédé à l’enregistrement de plus de 16 000 d’entre eux. Chaque semaine, environ un millier de Burkinabè supplémentaires viennent chercher refuge en Côte d’Ivoire.
D’ici la fin du mois, deux centres d’hébergement financés par les autorités ivoiriennes devraient être opérationnels, avec une capacité totale de 10 000 places. Le premier se trouve dans la localité de Niorigue, dans la région du Tchologo – région présidée par le ministre de la Défense et frère du président Ouattara, Téné Birahima Ouattara.
Un second centre comptera 600 abris. En cours de finalisation, il est installé dans la région voisine du Bounkani, près de la ville de Bouna, dans le village de Notadouo. Dans cette région vivent actuellement 16 000 réfugiés, dont 10 000 pour le seul département de Tougbo.
Stigmatisation
« La Côte d’Ivoire est le principal bailleur de fonds de cette initiative d’hébergement. C’est une première en Afrique », se réjouit le représentant du HCR dans le pays, Papa Kysma Sylla. Jusqu’à présent, les demandeurs d’asile étaient accueillis par les communautés locales. « Les premiers réfugiés avaient des attaches en Côte d’Ivoire, ce qui n’est pas le cas de ceux qui sont arrivés plus récemment », constate Papa Kysma Sylla, qui salue l’attitude du gouvernement ivoirien « dans l’accueil et la prise en charge des demandeurs d’asile, [à qui il fournit] régulièrement une assistance alimentaire ».
Depuis avril 2022, des équipes du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) sont aussi présentes dans les districts de Tougbo et de Tehini, « pour évaluer les besoins humanitaires des populations réfugiées, des familles d’accueil et des personnes vulnérables, et y répondre conjointement avec son partenaire de la Croix-Rouge de Côte d’Ivoire ».
Selon les données du HCR, environ la moitié de ces réfugiés seraient des Peuls. Soumis à l’insécurité au Burkina Faso, ils subissent aussi une forte stigmatisation. Ils sont souvent les principales victimes des exactions commises par les forces armées burkinabè, alors que nombre de jeunes Peuls ont rejoint les groupes jihadistes.
Ouattara vigilant
Face à l’afflux de réfugiés dans le Nord, les autorités ivoiriennes veillent à maintenir la cohésion sociale entre les populations. Le 25 mai, le Conseil national de sécurité (CNS) a ainsi justifié sa décision d’interdire l’entrée du bétail des réfugiés sur le territoire ivoirien.
Une semaine plus tôt, une délégation du CNS, conduite par son secrétaire exécutif, Fidèle Sarassoro, par ailleurs directeur de cabinet d’Alassane Ouattara, s’était rendue dans la ville nordiste de Ferkessédougou. Objectif ? Suivre et coordonner les interventions étatiques et locales pour l’accueil et la gestion de l’afflux des réfugiés.
De son côté, Alassane Ouattara reste vigilant sur la situation à sa frontière nord, où la dernière attaque terroriste, en juin 2021, a coûté la vie à deux soldats et un gendarme, près de Téhini. Cette attaque était la quatrième en un peu plus de deux mois dans cette région.