Habib Bourguiba
Habib Bourguiba naît officiellement le 3 août 1903 à Monastir, dans une famille de condition modeste. Après ses études secondaires à Tunis, il obtient son Baccalauréat en 1924. Puis il part à Paris (Sorbonne) pour des études à la Faculté de Droit et à l’Institut d’Études Politiques. En 1927, il obtient sa Licence en Droit et le Diplôme supérieur d’Études Politiques. Durant son séjour à Paris, il rencontre une Française, Mathilde, qu’il épouse en 1927. Elle lui donnera son fils Habib qui deviendra l’un de ses conseillers les plus écoutés.
De retour à Tunis en 1927, il exerce sa profession d’avocat et rédige des articles dans les journaux nationalistes. Il devient, au Congrès de mai 1933, membre de la Commission Exécutive du Parti du Destour, mais il en démissionne en septembre suivant. Au congrès de mars 1934, le parti se scinde en deux branches : l’une conservatrice, qui garde le nom de Destour, et l’autre moderniste baptisée Néo-Destour dont il devient le Secrétaire Général. Au milieu des années 30, la répression coloniale dans le pays assigne Bourguiba avec d’autres dans le sud tunisien. Libéré, il reprend le combat, mais vers la fin de 1937, l‘atmosphère devient des plus tendues. Suite aux événements sanglants du 9 avril 1938, il est envoyé en prison en France. Transféré ensuite en Italie fasciste, il est libéré en avril 1944.
En 1945, Bourguiba part au Caire puis à New York aux Nations Unies pour rallier des soutiens à la cause nationaliste tunisienne. Conscient de l’importance du combat pour la liberté, à partir de l’intérieur même du pays, il rentre en Tunisie en septembre 1949. Le mouvement nationaliste tunisien est mieux connu, mais il refuse le Mémorandum français de décembre 1951 imposant la co-souveraineté. Commence alors la révolution armée qui éclate le 18 janvier 1952. Bourguiba est exilé dans l’archipel de La Galite, puis à l’île de Groix et dans des endroits proches de Paris.
31 juillet 1954, Pierre Mendès-France, qui effectue une visite en Tunisie, prononce un discours dans lequel il annonce que son Gouvernement reconnait l’autonomie interne de la Tunisie, laquelle sera signée le 3 juin 1955. Le 8 avril 1956, élection de l’Assemblée Nationale Constituante, avec Habib Bourguiba comme premier président. Le 14 avril 1956, il est chargé de former le premier gouvernement de la Tunisie indépendante. Le 25 juil-let 1957, est proclamé le régime républicain et Bourguiba devient Président de la République.
Il entreprend alors de débarrasser le pays de toutes les séquelles de la période coloniale. Les réformes se succèdent pour mettre en place un État moderne, parachever la souveraineté nationale et moderniser la société, à travers la propagation de l’enseignement et la promulgation du Code du statut personnel. Le Congrès de Bizerte instaure la coexistence des trois secteurs (public, privé et coopératif); mais l’expérience de coopérativisation tourne à la catastrophe et il se résolut à changer d’orientation économique à partir d’octobre 1969.
Défenseur passionné d’une modernité arabe, il se distingue de ses homologues en politique étrangère. Vingt ans avant l’égyptien Anouar el-Sadate, il préconise la normalisation des rapports avec Israël en proposant la création d’une fédération entre les États arabes et l’État hébreu, idée qui lui attirera les foudres des nationalistes de la région.
Enfin, bien que l’Islam reste la religion d’État, le pouvoir des chefs religieux est grandement réduit. Les femmes accèdent à un statut inouï dans le monde arabe, dépassant même celui des Françaises dans certains domaines. La polygamie est interdite, le divorce autorisé et l’avortement légalisé. Habib Bourguiba divorce de Mathilde puis épouse Wassila à qui il remettra de plus en plus de pouvoir, l’âge venant.
Le 12 septembre 1974, on amende la Constitution de façon à instituer la présidence à vie au bénéfice du Leader Bourguiba. Mais le clientélisme prend de plus en plus d’ampleur jusqu’à étouffer le développement économique social du pays. La situation devient d’autant plus difficile que l’âge avancé du Leader Habib Bourguiba, l’aggravation de son état de santé et son incapacité de gérer les affaires de l’État, attisent les convoitises de tous ceux qui, autour de lui, s’entre-déchirent pour la succession. Cette situation favorise la montée de l’Islamisme, ce qui mène le pays au bord de la guerre civile, avec des émeutes de plus en plus vives.
Devant les dangers qui guettent le pays, sa sécurité et sa stabilité, Zine El Abidine Ben Ali, nommé Premier Ministre, le 2 oc-tobre 1987, se résout à intervenir, le 7 novembre de la même année. Certificats médicaux à l’appui, il destitue le Président Bourguiba, jugé sénile, et prend en main les destinées du pays. Assigné à résidence à Monastir, sa ville natale, Bourguiba y mourra le 6 avril 2000 à l’âge de 97 ans environ.
Avec la disparition du Leader Habib Bourguiba, la Tunisie et le monde perdent l’un des chefs historiques qui ont conduit leurs pays à l’indépendance et à la liberté, et l’un des plus grands hommes que le vingtième siècle ait connus au Maghreb, dans le monde arabe, en Afrique et dans le Tiers-monde.
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