Missionnaires d'Afrique

R.D.Congo
Bernard Ugeux M.Afr


En vue du second Synode sur la famille : deux expériences africaines.

Des initiatives pour renforcer la stabilité des familles en RD Congo.

C'est avec beaucoup de réalisme que l'Instrument de travail préparatoire au Synode sur la famille évoque les difficultés des familles liées à la pauvreté ainsi qu'aux mutations sociales et culturelles rapides auxquelles celles-ci sont exposées. J'ai évoqué ces problèmes dans un post précédent dans le cadre de ce blog. J'y reviens car je suis parfois mal à l'aise devant la façon dont certains dignitaires ecclésiastiques africains semblent vouloir minimiser les défis auxquelles les familles sont exposées en Afrique, comme pour se démarquer des interpellations soulevées par des conférences épiscopales occidentales. Je ne m'appesantis pas sur le " mariage pour tous " qui est d'autant plus pourfendu que dans le cadre de ces cultures les questions d'homosexualité restent un tabou pour l'Eglise, même si on en rencontre aussi dans ces cultures. Par contre l'Afrique subsaharienne n'est pas à l'abri des graves défis auxquels les familles sont exposées dans les mégapoles en expansion croissante, de plus en plus marquées par une culture mondialisée. Le modèle traditionnel du mariage chrétien y est battu en brèche par le consumérisme, le matérialisme et l'individualisme dont les couples chrétiens ne sont pas à l'abri dès qu'ils atteignent un certain niveau de vie ou participent à la vie urbaine


Face à ces défis, les couples se sentent souvent dépourvus et les grandes paroisses urbaines n'arrivent pas toujours à faire face à leurs besoins. D'où l'importance d'initiatives comme celles qui ont été suscitées dans un diocèse de l'Est de la RDC, où il n'y a pas encore de commission diocésaine spécialisée pour la pastorale familiale.

Une première initiative se développe depuis un certain nombre d'années, particulièrement sous l'impulsion des " parrains et marraines de mariage ". On entend par là les témoins de mariage qui ont pris au sérieux leur engagement de soutien aux jeunes couples qui les ont invités à les accompagnés en devenant leurs témoins. Ces parrains et marraines se considèrent comme engagés dans un suivi de la vie de couple et de famille de leurs filleuls, dans la mesure où ceux-ci le souhaitent. J'en ai rencontré qui accompagnent plus d'une dizaine de couples et qui ont évoqué le temps que cet engagement leur prend. Comme partout, une des difficultés principales de la vie de couple est la communication ouverte et régulière entre les conjoints. Peu de temps après le mariage, les naissances rapides et de moins en moins espacées, les préoccupations professionnelles et les difficultés économiques réduisent les moments consacrés à la vie du couple et au dialogue, si celui-ci a jamais existé en profondeur. D'où la difficulté d'affronter les conflits internes et les pressions de la famille élargie, ainsi que les défis de la vie urbaine. C'est ici que l'aide des parrains et marraines est précieuse. Mais leur apport va plus loin encore. Ceux-ci réunissent de temps en temps tous leurs couples filleuls pour leur permettre de se connaître et de traiter ensemble d'un certains nombre de difficultés rencontrées. J'ai eu l'occasion récemment de participer à une rencontre de deux générations de parrains (les filleuls accompagnés de leurs propres filleuls) où j'ai abordé la question du dialogue en référence à l'expérience du mouvement Mariage Rencontre. Ce fut un moment d'échanges très riches qui m'ont permis de réaliser l'importance des liens créés entre les diverses générations de couples chrétiens.

Une autre initiative est la création d'une Clinique pour la médiation familiale par l'Union des Supérieures majeures (des congrégations féminines) de cette région. Dans une ville que certains médias ont qualifiés de " capitale du viol ", les religieuses ont décidé de répondre à leur façon aux attentes de tant de familles déstabilisées par les divorces et les mariages recomposés ainsi que et surtout par les déchirements provoqués par le viol des femmes dans le cadre des conflits armés qui déciment la région et l'enlèvement des jeunes filles comme esclaves sexuelles. Depuis environ un an, cette structure, mise en place dans le cadre de l'Institut supérieur de pastorale familiale, commence à recevoir des couples en difficulté ainsi qu'à organiser des formations pour les couples dans les paroisses. Bien que certains d'entre eux aient été dérangés par cette initiative prise par des religieuses, quelques curés ont compris l'importance du service proposé par ces congrégations. Participant à la formation de l'équipe d'encadrement de cette " clinique " composée d'une religieuse et de plusieurs couples engagés, je me réjouis de constater la forte réponse reçue de la part des familles concernées. La demande dépasse l'offre et il faudra envisager de renforcer l'équipe car il est difficile aux mêmes personnes d'assurer l'accueil des familles et de s'investir en même temps la sensibilisation dans les paroisses.

Notons que ce sont principalement des couples laïcs qui sont les grands acteurs dans ces deux initiatives, où l'institution ecclésiale joue un rôle d'encouragement.

Mis en ligne le 05-09-2015

Bernard Ugeux
Son Blog
www.lavie.fr